Daimler a ordonné, le 18 juillet, le rappel de plus de 3 millions de véhicules de sa marque Mercedes. | Michaela Rehle / REUTERS

Les services français de la répression des fraudes, prompts à transmettre à la justice les dossiers « pollution au diesel » des constructeurs nationaux Renault et PSA, seraient-ils passés à côté du cas Mercedes ?

Selon nos informations, le 15 mai, le parquet du pôle de santé publique du tribunal de grande instance de Paris a classé sans suite la plainte pour « tromperie » du propriétaire français d’une Mercedes diesel. Ce particulier ayant été informé, en mars, d’une enquête de la justice allemande concernant cette marque, se demandait s’il était lui aussi victime d’une manipulation du moteur de son véhicule, comme dans l’affaire Volkswagen (VW).

Cette décision du parquet fait suite à un avis dédouanant Mercedes, rendu par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), et qui a été transmis par courrier en date du 4 avril au parquet de Paris. Dans cette lettre, que Le Monde a pu consulter, le chef des enquêtes de la DGCCRF déclare que, dans le cadre de ses investigations sur d’éventuelles fraudes à l’homologation menées auprès de l’ensemble des constructeurs, le cas de véhicules Mercedes a bien été étudié. Et le constat est clair : « Une série d’analyses complémentaires a écarté toute intention frauduleuse de la part du constructeur. »

Une conclusion un peu rapide

Ceci permet donc au parquet d’affirmer que « le service national des enquêtes de la DGCCRF (…) n’a pas décelé d’infraction en ce qui concerne les véhicules Mercedes ». Une conclusion qui paraît un peu rapide à l’heure où Mercedes Daimler est dans la tourmente. Le constructeur a tacitement reconnu l’existence d’un problème majeur de dépollution de ses moteurs en ordonnant, le 18 juillet, le rappel spectaculaire de plus de 3 millions de véhicules.

Comment la DGCCRF en est-elle arrivée à se forger une opinion manifestement différente de celle des enquêteurs allemands ? La « série d’analyses complémentaires » à laquelle se réfère la répression des fraudes est une enquête approfondie de l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (Ifpen) menée début 2017. Cette enquête faisait suite aux investigations de la commission Royal mise en place en France après le déclenchement de l’affaire VW.

Or, les dix analyses supplémentaires de l’Ifpen n’ont concerné qu’un véhicule Mercedes (une Classe S), alors que la commission Royal en avait étudié quatre et que, parmi ces véhicules, l’un d’entre eux (une Mercedes Classe B) présentait, lors de mesures sur route, des niveaux d’émission d’oxydes d’azote (NOx) 8,6 fois supérieurs à la norme autorisée.

La DGCCRF a-t-elle pris cette plainte à la légère ? Le fait est que suite à ses enquêtes, la répression des fraudes a transmis à la justice le résultat de ses investigations sur quatre constructeurs (VW, Renault, PSA, Fiat-Chrysler) et en a « blanchi » deux : Opel et – on le sait désormais – Mercedes.