En RDC, l’empire économique de Zoé Kabila s’étend des mines à la restauration rapide
En RDC, l’empire économique de Zoé Kabila s’étend des mines à la restauration rapide
Par Elena Blum
Selon une enquête de l’agence Bloomberg, le frère du président congolais a investi dans une myriade d’entreprises depuis l’arrivée au pouvoir de Joseph Kabila.
Zoé Kabila (ici à Kinshasa en octobre 2014), le frère du président congolais, est député depuis 2012. | STR/AFP
Des concessions de diamants et d’or, un hôtel de luxe, une compagnie aérienne, une franchise de fast-food… Depuis que son grand frère Joseph a accédé à la présidence de la République démocratique du Congo (RDC), en 2001, Zoé Kabila a investi dans de nombreuses sociétés, selon une enquête de l’agence Bloomberg publiée mercredi 19 juillet. Sans parler des contrats et partenariats avec les sociétés minières Ivanhoe Mines et Nzuri Copper. Son vaste réseau d’entreprises a rapporté plusieurs dizaines de millions de dollars au clan Kabila.
L’agence de presse économique révèle notamment que, jusqu’en novembre 2016, Zoé Kabila était impliqué dans ISIS-Congo. Cette entreprise avait remporté un juteux contrat d’Etat, en 2007, pour produire des permis de conduire biométriques. ISIS-Congo et son partenaire français avaient alors touché 15 millions de dollars (environ 10 millions d’euros à l’époque) du gouvernement, selon Théophas Mahuku, associé à Zoé Kabila dans au moins sept sociétés.
Des transactions confidentielles
Si, comme l’affirme M. Mahuku, « rien ne défend ce gars de faire des affaires » – en tout cas pas la Constitution congolaise –, le cinquième enfant de Laurent-Désiré Kabila et de Sifa Mahanya est aussi député depuis 2012 : il est donc tenu de divulguer ses activités commerciales et ses actifs. S’il en a bien déclaré certains, comme un hôtel de luxe, par le biais de son entreprise Cosha Investment, dont il possède 90 % des parts, Bloomberg révèle d’autres transactions commerciales plus confidentielles.
Via Cosha Investment, Zoé Kabila a notamment acquis des parts dans une compagnie aérienne et dans une franchise du groupe de restauration rapide Nando, et obtenu huit concessions minières d’or, de diamants et de calcaire, selon des documents d’entreprise et le registre minier congolais épluchés par Bloomberg.
En 2007, Cosha a aussi racheté 90 % des actions de la Générale industrielle et commerciale au Congo (GICC), une entreprise créée peu de temps auparavant par M. Mahuku. La GICC a été appelée à guider un exploitant minier dans les méandres de l’administration. L’opération a finalement rapporté plusieurs millions de dollars à la GICC, sans que ne soit jamais rendu public le lien entre l’entreprise et Zoé Kabila.
Selon Bloomberg, cette compagnie a aussi collaboré avec au moins trois autres sociétés minières internationales : la canadienne Ivanhoe Mines, l’australienne Nzuri Copper et, surtout, la Société sino-congolaise des mines (Sicomines), un énorme projet de 3,2 milliards de dollars dont la compagnie de Zoé Kabila bénéficie directement.
« La famille cherchait quelque chose à faire »
Bloomberg rapporte que, depuis la mort de Laurent-Désiré Kabila, en 2001, M. Mahuku a aidé Zoé et d’autres membres du clan Kabila, comme ses sœurs Jaynet et Joséphine, à fonder au moins douze sociétés, selon des documents d’entreprise.
Un rapport publié le 20 juillet par deux ONG américaines, le Congo Research Group et le Pulitzer Center on Crisis Reporting, révèle que le clan Kabila détient 80 entreprises en RDC et à l’étranger, 71 000 hectares de terres agricoles ainsi que toutes les licences d’exploitation des mines de diamant le long de la frontière avec l’Angola.
Pour M. Mahuku, les Kabila ont pris des parts dans de nombreuses entreprises parce que, pendant des années, Joseph Kabila n’a pas fait participer sa famille à la vie politique du pays – ils ont donc dû se lancer dans le business. Il explique à Bloomberg : « Les membres de la famille cherchaient quelque chose à faire, à gagner leur vie, et à ce moment ils me demandaient : “Théo, on peut créer une entreprise ?” »