La pétaudière du président Trump
La pétaudière du président Trump
Editorial. Affaire russe, paralysie de l’administration, règlements de comptes… Le président a beau répéter sur Twitter qu’« il n’y a pas de chaos à la Maison Blanche », l’agitation, le désordre et l’amateurisme sont sans précédent.
Donald Trump, le 31 juillet 2017, au cours d’une conférence de presse à la Maison Blanche, à Washington. | Evan Vucci / AP
Editorial du « Monde » Valse des conseillers les plus proches, règlements de comptes assassins au sein de l’équipe de la Maison Blanche, pans entiers de l’administration dépourvus de titulaires, sans parler des enquêtes chaque jour plus embarrassantes du Congrès et du FBI sur l’ingérence éventuelle de la Russie dans la campagne électorale de 2016 : six mois après l’entrée en fonctions de Donald Trump, Washington vit désormais au rythme d’un feuilleton aussi ahurissant qu’inquiétant. Le président a beau répéter sur Twitter qu’« il n’y a pas de chaos à la Maison Blanche », l’agitation, le désordre et l’amateurisme qui règnent à la tête de son administration sont sans précédent.
C’est du jamais-vu, en effet. En six mois, neuf personnes issues des plus hauts cercles du pouvoir ont été limogées ou poussées à la démission. Le 21 juillet, le porte-parole du président, Sean Spicer, jetait l’éponge. Une semaine plus tard, c’est le secrétaire général de la Maison Blanche, Reince Priebus, qui prenait la porte.
Nouveau coup de théâtre, le 31 juillet : à peine nommé pour remplacer M. Priebus, John Kelly a exigé le limogeage du sulfureux Anthony Scaramucci, qui occupait depuis dix jours seulement les fonctions de directeur de la communication.
Invraisemblable hécatombe
Auparavant, l’on avait assisté aux départs tumultueux de Sally Yates, ancienne ministre de la justice ; de Michael Flynn, ancien conseiller à la sécurité nationale ; de James Comey, ancien patron du FBI, la police fédérale ; de Mike Dubke, ancien directeur des communications de la Maison Blanche ; de Katie Walsh, ex-chef de cabinet adjointe ; de Walter Shaub, ancien directeur du Bureau pour l’éthique gouvernementale.
A cette invraisemblable hécatombe, il convient d’ajouter les rumeurs de mise à l’écart de Rex Tillerson, le ministre des affaires étrangères. Mais aussi les attaques répétées du président contre Robert Mueller, le procureur spécial chargé d’enquêter sur le rôle joué par la Russie pendant la campagne électorale. Ou encore les tentatives visant à discréditer, à son tour, le nouveau ministre de la justice, Jeff Sessions.
Pour nombre d’observateurs, ces agissements jettent une lumière crue non seulement sur la volonté du président de mettre fin à une enquête indépendante sur ses liens avec la Russie, mais aussi sur sa propension à se placer au-dessus des lois. Un comportement propre à engendrer une crise politique profonde, susceptible d’endommager les institutions démocratiques du pays. Et ce, d’autant plus que l’administration gouvernementale est également paralysée par l’extrême lenteur des nominations à des centaines de postes-clés : sur les 575 fonctions de haut rang, la Maison Blanche n’a proposé de candidats que pour 218 d’entre elles, dont bon nombre n’ont pas encore été confirmées par le Congrès.
Les élus républicains font bloc
Certes, Donald Trump continue à bénéficier d’indéniables soutiens. Ses partisans restent nombreux. Bien que la majorité des Américains estime que le président fait un mauvais travail, près de 40 % des électeurs (et 80 % des républicains) approuvent sa gestion. Et si un certain nombre d’élus républicains du Congrès ont contesté ses attaques contre M. Sessions et voté contre certaines de ses mesures, la grande majorité d’entre eux semble encore faire bloc derrière lui.
Il reste que la pétaudière qui règne à la Maison Blanche et à Washington pose chaque jour un peu plus la question de la capacité du patron de l’empire Trump à présider la première puissance mondiale.