Ce soir à la TV : « Les Enfants loups, Ame et Yuki »
TV : « Les Enfants loups, Ame et Yuki »
Par Thomas Sotinel
Notre choix du soir. Histoire d’amour bouleversante, chronique familiale aux accents animistes, ce dessin animé est une ode à la nature (sur 6ter à 21 heures).
Les enfants loups, Ame & Yuki - Bande annonce [VF|HD]
La vogue du loup-garou égale presque celle du vampire, et l’on pourrait, en lisant distraitement le titre du long-métrage de Mamoru Hosoda, croire que le cinéaste japonais y a « succombé ». L’idée de faire d’Ame, petite fille née un jour de neige, et de son frère, Yuki, né sous la pluie, deux créatures fantastiques, susceptibles de se transformer en loups, n’est pas à l’origine de ce film, sorti en 2012.
Contrairement à ce que pourraient faire croire les thèmes de ses précédents opus (le voyage dans le temps, la guerre entre le monde réel et le monde virtuel, les humains qui se transforment en loups), Mamoru Hosoda est un cinéaste très réaliste qui puise son inspiration dans son propre quotidien. « Des amis ont eu des enfants, je suis allé chez eux, raconte-t-il, pour expliquer la conception des Enfants-Loups. J’ai été frappé par le changement quiétait intervenu chez eux. »
Initialement, le réalisateur ne pensait même pas donner une dimension fantastique à son film. « Avant de m’y lancer, j’ai rencontré plusieurs mères qui m’ont dit que, vers 2, 3 ans, les enfants étaient un peu comme des monstres. Je me suis demandé ce que ce serait d’avoir une bête sauvage à la maison. »
【Neko】Les enfants loups, Ame et Yuki - La dispute 【FanDub FR】
Les Enfants-Loups est donc une épopée intime, un dessin animé centré autour de la maternité. Commencé en ville, dans les espaces brutaux et confinés de Tokyo, le film s’épanouit dans la campagne japonaise, où des paysans arrachent le produit de la terre aux montagnes qui les entourent.
Il raconte l’histoire de Hana, une jeune fille esseulée, amoureuse d’un sombre et bel inconnu, dont elle apprend qu’il est le dernier descendant d’une lignée d’hommes-loups susceptibles de se transformer en prédateurs. Ils ont à peine le temps d’avoir deux petits qu’il est tué. Après avoir lutté des mois pour élever ses enfants – dont elle s’aperçoit vite qu’ils ressemblent beaucoup à leur père –, Hana décide de s’établir loin du monde, dans une maison traditionnelle au pied des montagnes.
MAMORU HOSODA
Les Enfants-Loups prend alors une dimension lyrique inattendue. Les premiers films de Mamoru Hosoda, La Traversée du temps et Summer Wars, se distinguaient par leur rigueur narrative et la soumission de l’invention visuelle aux exigences de la mise en scène. Cette fois, la peinture (au sens original du terme) de la vie du Japon rural porte le film. Hana découvre pas à pas les exigences d’une agriculture de subsistance, parfaitement opposées à celles de la vie moderne. Le mouvement des branches dans le vent, la pluie ou la neige sont dessinés, peints et filmés avec une infinie délicatesse. Cet animisme est bien plus intime que les rêves extravagants du cinéma de Miyazaki. On pense parfois, en regardant le film d’Hosoda, à certaines séquences des films que Naomi Kawase a tournées dans les environs de Nara.
On pourrait s’attendre à ce que les enfants-loups trouvent leur bonheur dans cet habitat, mais seule l’aînée se tourne vers la vie sauvage, tandis que son frère hésite entre ces deux destins. Le récit s’étire sur treize ans, de la conception des enfants au moment où ils acquièrent leur autonomie. Là encore, ce sont les éléments (une tempête) qui orchestrent cette rupture finale, apportant aux Enfants-Loups la conclusion épique que ce beau film mérite.
Les Enfants-Loups Ame et Yuki, de Mamoru Hosoda (Japon, 2012, 115 min).