François Fillon, à Paris, le 21 avril. / Christian Hartmann / REUTERS

Finalement, les passerelles entre la finance et la politique autorisent la circulation dans les deux sens. Trois mois après que les Français lui ont préféré Emmanuel Macron, ancien banquier d’affaires de Rothschild & Cie, le candidat malheureux à la présidentielle François Fillon a choisi de rejoindre une société de gestion d’actifs.

Tikehau Capital a annoncé mardi 22 août que l’ex-premier ministre allait devenir au 1er septembre son trentième associé. « Son expérience internationale – le développement international de Tikehau Capital étant un de ses axes stratégiques majeur – et sa connaissance aiguë des problématiques économiques françaises et européennes constituent des atouts majeurs pour accompagner le développement de la société de gestion et d’investissement », justifie le Petit Poucet français aux ambitions dévorantes.

La firme, cofondée en 2004 par deux anciens financiers de la City, Antoine Flamarion, venu de Goldman Sachs, et Mathieu Chabran, passé par Merrill Lynch et Deutsche Bank, constitue un choix très anticonformiste, voire provocateur pour M. Fillon. L’ex-député de Paris avait jusque-là choisi d’exploiter son carnet d’adresses à travers sa société de conseil, comme nombre d’anciens membres de gouvernement, à commencer par Dominique de Villepin.

Investir à contre-courant

Tikehau (170 employés, 10,3 milliards d’euros d’actifs) constitue l’une des plus belles réussites récentes de la finance française. La firme, partie de rien, a su investir à contre-courant après la crise financière de 2007-2008, dans l’immobilier ou encore la dette des PME. De quoi se bâtir une réputation sur la scène internationale, notamment, qui lui a permis de récolter en juillet 702 millions d’euros en Bourse, soit presque la moitié de ses fonds propres.

Cette croissance fulgurante, cependant, bâtie sur les codes anglo-saxons, ne s’embarrasse pas des susceptibilités de l’establishment français. Cet été, Tikehau a mis en émoi le « triangle d’or » parisien en s’invitant sans bristol au capital d’Eurazeo, la société d’investissement autrefois dans l’orbite de la banque Lazard. Le tout-Paris des affaires s’était alors mobilisé pour empêcher les jeunes loups de prendre le contrôle de la vieille dame.

Autant dire que l’arrivée de M. Fillon, à peine cette polémique éteinte, constitue un beau pied de nez pour Tikehau. L’affaire s’est nouée très vite apparemment. Il est probable que Nicolas Calcoen, directeur financier du géant de la gestion d’actifs Amundi qui a investi chez Tikehau, et membre des cercles économiques ayant entouré le candidat durant sa campagne, a joué les entremetteurs.