Ultra-trail : la controverse autour des morts du Mont-Blanc
Ultra-trail : la controverse autour des morts du Mont-Blanc
Deux traileurs sont morts sur les pentes du massif avant le départ de la course. Les coureurs s’aventurant sur les glaciers avec un équipement léger sont montrés du doigt.
Entraînement avant le départ de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc, en 2015. / JEAN-PIERRE CLATOT / AFP
A quelques jours du départ de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc (UTMB), et en une semaine, deux traileurs sont morts sur les pentes du massif. Une controverse s’en est suivie, stigmatisant ces coureurs qui s’aventurent sur les glaciers et les hautes cimes en tenue légère et ciblant la figure emblématique du trailrunning, Kilian Jornet. Un bouc émissaire idéal, car gravir le mont Blanc et le redescendre en quelques heures est un entraînement usuel pour le sprinter des cimes catalan.
Le maire de Saint-Gervais, commune d’où part la voie classique vers le sommet, a dénoncé les « têtes brûlées » qui confondent ascension du mont Blanc et ultra-trail. Le commandant du peloton de gendarmerie de haute montagne (PGHM) de Chamonix, Stéphane Bozon, a déploré un afflux de traileurs sur la voie du mont Blanc, fustigeant « l’inconscience pure » de ceux qui s’engagent, seuls, en baskets et sans crampons sur cet itinéraire d’alpinisme et allant jusqu’à dénoncer un « effet Jornet » : « Ce qu’il véhicule participe de tout cela. »
Comportements irresponsables
Directrice de la Chamoniarde, société de prévention et de secours en montagne, Océane Vibert confirme que « le trailrunning est devenu en quelques années un sport de masse qui comme toute nouvelle discipline cherche ses limites ». Mais dans un contexte de banalisation, voire d’hyperconsommation du mont Blanc, elle regrette ce haro sur les traileurs et souligne que l’été a été très « compliqué, avec, dès juin, une sécheresse qui laissait redouter des accidents ».
Il y en a eu : douze morts du côté français du sommet, quatre fois plus que l’été dernier, avec « des personnes qui avaient pourtant bien le matériel d’alpinisme mais pas leur tête ! », dit Mme Vibert qui déplore des comportements irresponsables : « Des alpinistes partis seuls et qu’on n’a pas retrouvés, ou engagés dans de longues courses malgré l’orage annoncé », ou encore des personnes aimantées par le sommet mythique et « hermétiques aux messages de prévention ».
La veille du départ de l’UTMB, interrogé sur le supposé mauvais exemple qu’il pourrait donner avec ses vidéos postées du sommet du mont Blanc et ses ascensions rapides et réalisées avec un équipement léger, Kilian Jornet observait que « les gens retiennent seulement l’image au sommet. Derrière, il y a tout un travail et une expérience d’alpiniste. J’ai gravi cent fois le mont Blanc. La première fois, avec mes parents. Ensuite, avec des amis. Puis, plus vite et en mode léger, mais toujours avec du matériel adapté aux conditions. Moi aussi ça me fait rêver quand je vois Alex Honnold [célèbre grimpeur américain] gravir El Capitan dans le Yosemite en solo ! Mais je ne vais pas faire de même pour autant ! »