BERTRAND GUAY / AFP

Il est encore trop tôt pour mesurer toute la portée de la découverte. Elle a cependant paru suffisament inquiétante pour que la section antiterroriste du parquet de Paris décide d’ouvrir une enquête pour association de malfaiteurs terroriste criminelle. Mercredi 6 septembre, en fin de matinée, la police a découvert fortuitement des produits chimiques et des explosifs dans un appartement de Villejuif (Val-de-Marne). Deux suspects ont rapidement été placés en garde à vue, puis un troisième dans la nuit.

La mise au jour de ce petit laboratoire artisanal procède d’un véritable coup de chance. C’est une fuite d’eau dans un appartement qui a conduit le syndic de l’immeuble à faire appel à un plombier, mercredi matin. A son arrivée sur place, l’artisan aperçoit par une fenêtre des ustensils qui lui paraissent suspects, et alerte aussitôt la police. Le ministre de l’intérieur, Bernard Collomb, a salué par communiqué ce « geste citoyen ».

100 grammes de TATP, de l’acétone et de l’acide sulfurique

Dépêchés sur place, les hommes du laboratoire central de la préfecture de police passent l’appartement au crible. Ils recensent environ 100 grammes de TATP, un explosif artisanal prisé des djihadistes, ainsi que des ingrédients pouvant entrer dans sa composition : de l’eau oxygénée, plusieurs litres d’acétone, un litre d’acide sulfurique et un litre d’acide chloridrique. Ils mettent également la main sur des composants électriques susceptibles d’entrer dans la fabrication d’un détonateur, précise une source proche de l’enquête, ainsi que deux feuilles portant « des écritures en langue arabe ».

En début d’après-midi, deux hommes en lien avec l’appartement ont été interpellés au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), une commune voisine de Villejuif, et placés en garde à vue. A bord de leur utilitaire, un pilon en bois et une bouteille d’eau oxygénée ont été retrouvés. L’un des suspects, âgé de 36 ans, est né à Amiens (Somme), le second, âgé de 47 ans, en Tunisie. Aucun n’était connu des services de police.

Dans le courant de la nuit, un troisième suspect, âgé de 37 ans, a été arrêté et lui aussi placé en garde à vue, a précisé au Monde le parquet de Paris. L’enquête a été confiée à la section antiterroriste de la brigade criminelle parisienne (SAT) et à la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

Le TATP, baptisé « mère de Satan » par l’organisation Etat islamique, a été utilisé dans la plupart des attentats revendiqués par l’organisation. Facile à fabriquer à partir d’élements disponibles dans le commerce (de l’acétone, de l’eau oxygénée et un acide), il possède un redoutable pouvoir détonant mais présente le défaut d’être très instable.

Depuis un décret officiel du 31 août, cependant, toute personne désirant acheter des produits pouvant entrer dans la composition d’explosifs doit désormais décliner son identité et préciser l’utilisation qu’elle compte en faire. Cette mesure, prévue par la loi du 3 juin 2016, fait suite à une demande de l’Union européenne, qui avait enjoint dès 2013 les Etats membres à contrôler la vente des précurseurs explosifs.