• Georges Aperghis
    Concerto pour accordéon. Six études pour orchestre

    Teodoro Anzellotti (accordéon), Orchestre symphonique de la radio bavaroise, Emilio Pomàrico (direction)

Pochette de l’album consacré à Georges Aperghis par le label Neos. / NEOS

A la différence de la plupart des compositeurs d’aujourd’hui qui s’intéressent à l’accordéon, Georges Aperghis (né en 1945) n’emploie aucun des effets offerts par l’instrument version « musique contemporaine ». Il préfère œuvrer à partir de ce qui fait son originalité propre, le soufflet. Merveille de respiration collective, le Concerto vaut alors à l’orchestre d’apparaître comme un accordéon maintes fois démultiplié sous l’action discrète d’un agent infiltré aux allures d’anguille (le très souple Teodoro Anzellotti). Tout aussi fascinantes, les Six études pour grand orchestre confirment que l’expression d’Aperghis est celle d’un rôdeur dans les coulisses du théâtre instrumental. Pierre Gervasoni

1 CD Neos/Socadisc.

  • Enrico Pieranunzi Quartet
    New Spring

Pochette de l’abum « New Spring », d’Enrico Pieranunzi Quartet. / CAM JAZZ

Depuis quelques années, Enrico Pieranunzi est régulièrement invité à se produire au Village Vanguard, le mythique club new-yorkais. En 2015, année où cet enregistrement en public a été réalisé, le pianiste romain avait délaissé son format de prédilection, le trio, pour un quartette américain avec le saxophoniste ténor Donny McCaslin, le contrebassiste Scott Colley et le batteur Clarence Penn. Un répertoire d’excellente qualité, issu de la plume de Pieranunzi sauf une composition de Scott Colley et le standard I Hear a Rhapsody pour une musique de haute volée, énergique, engagée et inventive, que demander de plus ? Enrico Pieranunzi est décidément l’un des pianistes actuels les plus passionnants. Paul Benkimoun

1 CD CAM Jazz.

  • Angus & Julia Stone
    Snow

Pochette de l’album « Snow », d’Angus et Julia Stone. / Pias

Si Angus Stone et sa sœur Julia ont baptisé Neige leur quatrième album en duo, c’est sans doute moins pour évoquer les frimas que le confort ressenti quand on se calfeutre près du feu pour se protéger du monde extérieur. Les chansons des deux Australiens exploitent en effet plus que jamais la délicate chaleur d’une complicité exprimée dans le moelleux dépouillement de leur instrumentation et la tendresse réciproque de leurs voix. Sept ans après leur tube Big Jet Plane, Angus et Julia s’y entendent pour façonner le cocon d’une bohème qui oscille entre vague à l’âme folk et électricité cosy. On peut craquer pour le velours mélodique des attachants Chateau ou Sylvester Stallone, s’agacer quand le duo glisse vers la mièvrerie (My House Your House) et préférer les touches plus sombres de Nothing Else ou de Oakwood et Who Do You Think You Are, marqués par un éraillement springsteenien. Stéphane Davet

1 CD Le Label/PIAS.

  • Ariel Pink
    Dedicated To Bobby Jameson

Pochette de l’album « Dedicated To Bobby Jameson », d’Ariel Pink. / MEXICAN SUMMER-A+LSO

Auteur-compositeur et interprète passé inaperçu avec quelques singles et trois albums entre 1963 et 1968, mort en 2015 à l’âge de 70 ans, Bobby Jameson donne son nom au titre et à une chanson du nouvel album d’Ariel Pink. En évoquant lointainement le dédicataire de son album, Ariel Pink évolue surtout vers la pop et le psyché. Il va ainsi de passages rêveurs (Another Weekend) en envols emphatiques (Feels Like Heaven), de parties à envies expérimentales (Time To Live) à des citations-copies du son psyché de la seconde moitié des années 1960 (la chanson-titre, Dreamdate Narcissist). Comme souvent chez Ariel Pink, l’exercice de style est réussi, les mélodies accrocheuses, le travail vocal bien tourné. Ici, en plus, l’on entend un effort qualitatif sur la production qui pouvait manquer dans certains albums précédents. Sylvain Siclier

1 CD Mexican Summer-A + LSO.

  • Wyclef Jean
    Carnival III

Pochette de l’album « Carnival III », de Wyclef Jean. / LEGAL RECORDINGS/SONY MUSIC

Nous aurions rêvé d’un retour des Fugees, groupe phare de la culture hip-hop des années 1990, qui réconciliait la soul et le rap américains avec ses racines caribéennes. On se serait consolé avec un nouvel album studio de sa rappeuse-chanteuse, la prodigieuse Lauryn Hill mais il faudra se contenter du troisième volet de Carnival, la série de son homme-orchestre Wyclef Jean. Il y a vingt ans, le rappeur new-yorkais né en Haïti lançait cet album concept qui sous sa baguette faisait se rencontrer le hip-hop avec le meilleur des musiques caribéennes et latines. Le premier volet mettait en scène Célia Cruz et les Kassav, le deuxième, le Jamaïcain Sizzla et la Brésilienne Daniela Mercury. Ce troisième album se disperse et invite une myriade d’artistes inconnus mais il ne faut jamais douter du talent de dénicheur de Wyclef. C’est lui qui a lancé, par exemple, la carrière de Destiny’s Child et donc de Beyoncé en 1997 avec le tube No, No, No. Il faudra passer sur les titres ennuyeux comme Borrowed Time qui porte bien son nom, et ne retenir que ceux qui portent la marque de fabrique de Carnival comme le rastafari Turn Me Good, l’hispano-créole Double Dutch, le beau portrait du guerrier Johnny, Warrior, et enfin sa réponse à ceux qui réclament un nouveau Fugees, Shotta Boys. Stéphanie Binet

1 CD Legal Recordings/Sony Music.

  • Trio Da Kali and Kronos Quartet
    Ladilikan

Pochette de l’album « Ladilikan », du trio Da Kali avec le Kronos Quartet. / WORLD CIRCUIT/PIAS

Un trio de musique traditionnelle malien avec un quatuor à cordes occidental ? Suspect, penseront certains, passant leur chemin et se privant d’une rencontre musicale souvent passionnante d’impertinence. Réunissant la puissante chanteuse Hawa « Kassé Mady » Diabaté (fille du célèbre griot Kassé Mady Diabaté), le précis et délicat balafoniste Lassana Diabaté (ancien membre du Symmetric Orchestra de Toumani Diabaté) et Mamadou Kouyaté, devenu un maestro du luth n’goni en jouant avec son père Bassekou Kouyaté, virtuose éclairé de l’instrument, le trio Da Kali est parfait de cohérence et de musicalité. C’est loin d’être la première fois que le quatuor américain, créé par violoniste David Harrington en 1973 et réputé pour son esprit d’ouverture, se tourne vers l’Afrique (réécouter son album Pieces of Africa, sorti en 1992, avec le joueur de kora gambien Foday Musa Suso ou son intervention sur l’album Bowmboï (2003) de la chanteuse malienne Rokia Traoré). Il s’insinue dans le répertoire traditionnel proposé par le trio malien (hormis la reprise – dispensable – en bambara, du gospel God Shall Wipe All Tears Away que chantait Mahalia Jackson), avec une audace jamais déplacée, y injectant parfois une singulière dramaturgie. Patrick Labesse

1 CD World Circuit/PIAS.