Rwanda, la question qui fâche
Rwanda, la question qui fâche
M le magazine du Monde
Vingt-trois ans après le génocide rwandais, la publication d’un « Que Sais-je » sur le sujet ravive la polémique sur les responsabilités. Un débat qui déchaîne les passions en France, dont le rôle dans le massacre des Tutsi reste âprement discuté.
Depuis 1994, le rôle de la France dans le génocide au Rwanda divise les militaires et les politiques.
2017, le « Que sais-je ? » « inverse » les rôles
« Le génocide des Tutsi au Rwanda » de Filip Reyntjens (PUF, 9 euros). / Que sais-je ?
Le 25 septembre, un collectif d’historiens signe, dans Le Monde, une tribune dénonçant
la parution d’un « Que sais-je ? » écrit par Filip Reyntjens consacré au Rwanda. Ils lui reprochent d’attribuer une responsabilité « historique et politique » au FPR, le parti de Paul Kagamé, minorant le rôle des génocidaires, le gouvernement hutu de l’époque. « Rien ne peut justifier cette inversion des responsabilités. »
2005, le colonel Jacques Hogard monte au front
Le colonel Jacques Hogard a participé à l’opération « Turquoise » au Rwanda. / Capture d'écran Web
Dans Les Larmes de l’honneur. 60 jours dans la tourmente du Rwanda, Jacques Hogard défend l’armée française et tente de réhabiliter la controversée opération « Turquoise », dont il dirigeait l’un des groupements au Rwanda, en 1994. Pour l’armée et ses défenseurs, son objectif, uniquement humanitaire, a permis de sauver des milliers de vies. Pour ses détracteurs, l’armée a soutenu les Hutus.
2005, Pierre Péan défend la France
Pierre Pean dans son bureau, en 2017. / Manuel Cohen / Epicureans
La même année, le pamphlet Noires fureurs, blancs menteurs de Pierre Péan appuie la thèse du juge Bruguière. Qui consiste à défendre l’opération « Turquoise » et faire porter la responsabilité à Paul Kagamé. Un passage du livre a particulièrement heurté : le journaliste évoque la « culture du mensonge » des Tutsi. Poursuivi pour « provocation à la haine raciale », il n’a pas été condamné.
2004, Patrick de Saint-Exupéry réplique à Villepin
Patrick de Saint-Exupéry, en 2009. / Philippe Matsas/Opale/Leemage
En 2003, lorsque le journaliste Patrick de Saint-Exupéry entend Dominique de Villepin parler, au pluriel, des « génocides rwandais », induisant l’idée de massacres réciproques entre Hutus et Tutsi, il reprend la plume et publie L’Inavouable. La France au Rwanda. Ce sont ses articles parus en 1998 dans Le Figaro qui avaient été à l’origine de la mission d’information parlementaire sur le rôle de la France au Rwanda.
1994, François-Xavier Verschave lance le débat
François-Xavier Verschave auteur de « Complicité de génocide » (La Découverte, 1994). / Jean-Claude Jaffre/La Saif images
Paru quelques mois après le génocide, le livre de François-Xavier Verschave dont le titre résume la thèse, Complicité de génocide ? La politique de la France au Rwanda, a suscité un scandale dans les rangs de l’armée française. Militant et président de l’association Survie, Verschave, disparu en 2005, est l’auteur de nombreux ouvrages dénonçant la « Françafrique ».