Des troupes russes et biélorusses lors de l’exercice militaire annuel Zapad en Biélorussie, le 20 septembre 2017. / Sergei Grits / AP

Le grand exercice militaire annuel russe Zapad, qui s’est tenu du 14 au 20 septembre pour son édition 2017, a été beaucoup plus ambitieux qu’annoncé par Moscou, à savoir un entraînement en matière de contre-terrorisme engageant 12 700 soldats, estime aujourd’hui l’OTAN. « Mon sentiment est qu’il y avait probablement plus de 40 000 militaires mobilisés », a dit lundi 2 octobre le commandant des forces terrestres américaines en Europe, le général Ben Hodges.

Pour ces manœuvres, qui se sont déroulées sur dix terrains différents, en Russie et en Biélorussie, l’effectif de 12 700 militaires annoncé par Moscou avait l’avantage de se situer juste en deçà du plafond — 13 000 soldats — au-delà duquel, au titre des mesures de transparence nécessaire à la confiance, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) impose l’invitation d’observateurs étrangers.

Plusieurs pays européens frontaliers, eux, évoquaient 70 000 à 100 000 soldats mobilisés. Ces chiffres restent à consolider, explique le président du comité militaire de l’Alliance atlantique, le général Petr Pavel, et pourraient se situer autour de 70 000, mais là « n’est pas le plus important », selon lui. « C’était un exercice très complexe, qui n’était que très partiellement centré sur le contre-terrorisme », a-t-il ainsi expliqué au Monde, lors d’une visite sur la base sous-marine britannique de Faslane, en Ecosse, vendredi 29 septembre.

Préparation pour une guerre majeure

Le général Petr Pavel précise qu’il s’agit là d’« une préparation pour une guerre majeure contre un ennemi situé à parité » :

« L’OTAN voit Zapad 2017 comme un exercice parapluie, qui a couvert de nombreux exercices, connectés directement ou indirectement ensemble, sous le seul commandement et contrôle de Moscou. »

La Russie a déclaré avoir déployé 70 avions et hélicoptères, 680 unités d’équipement militaires, dont 250 tanks, et dix navires. Selon le général, les rapports otaniens indiquent que « depuis le Grand Nord, où les forces russes s’entraînent dans l’Arctique, en passant par la mer Baltique et le long des frontières ouest de la Russie avec l’OTAN jusqu’en mer Noire, tous les niveaux ont été entraînés, du conventionnel jusqu’au nucléaire, du tactique jusqu’au stratégique ».

Les administrations civiles de l’Etat ont aussi été concernées par l’exercice. « Il a inclus ce que nous appelons la “guerre de la nation tout entière” [« all nation warfare »] avec l’implication de nombreux ministères, des relations civilo-militaires, des industries de défense. » De quoi, selon le président du comité militaire, « ressembler à tout autre chose qu’une opération de contre-terrorisme », à laquelle le scénario, fondé notamment sur une infiltration de groupes extrémistes en Biélorussie, laissait croire.

Lundi, le général Hodges a plaidé pour que les Européens acceptent un « Schengen militaire » qui permettrait aux forces de l’OTAN d’être très rapidement déplacées en empruntant, avec un minimum de contrôle, les voies civiles (autoroutes et rail) :

« L’Alliance doit être capable de se déplacer aussi vite, voire plus vite, que ne le font les forces de la Fédération de Russie, si nous voulons que notre capacité dissuasive soit efficace. »

La Russie « a parfaitement le droit de procéder à des exercices militaires, comme l’OTAN », souligne le général Pavel. Mais « lors du prochain conseil OTAN-Russie, nous demanderons à notre partenaire russe des explications sur les contradictions que nous avons relevées, non seulement au sujet des effectifs, mais aussi en ce qui concerne le spectre de l’exercice ».

Après une conversation téléphonique le 3 mars, la première tenue au niveau militaire depuis l’annexion de la Crimée en 2014, le général Pavel et le chef d’état-major des forces armées russes, Valeri Guerassimov, se sont rencontrés à Bakou le 7 septembre. « Nous sommes convenus de poursuivre nos entretiens face à face dès que la situation l’exigerait », précise le président du comité militaire de l’OTAN.