La Russie accusée d’avoir utilisé l’antivirus Kaspersky pour espionner la NSA américaine
La Russie accusée d’avoir utilisé l’antivirus Kaspersky pour espionner la NSA américaine
Les services israéliens avaient alerté en 2015 leurs homologues américains après avoir eux-mêmes piraté l’éditeur russe, affirme la presse américaine.
Le siège de Kaspersky Lab à Moscou, en janvier. / PAVEL GOLOVKIN / AP
Le logiciel antivirus de la société russe Kasperksy a été piraté par les services de renseignement israéliens, qui ont découvert au cours de leur intrusion que le logiciel était déjà utilisé par les services de renseignement russes, qui s’en servaient pour espionner la NSA américaine. Cet étrange bal des espions est décrit, mardi 10 octobre, par le New York Times et le Washington Post, qui citent des sources anonymes du renseignement américain.
Selon les deux quotidiens, les services israéliens ont alerté leurs homologues américains après avoir découvert, en 2015, des outils de piratage appartenant à la NSA sur le réseau de Kaspersky dans lequel les agents israéliens s’étaient introduits. Selon les services américains et israéliens, les agents russes sont parvenus à dérober des documents confidentiels de la NSA en accédant à l’ordinateur personnel d’un agent de la NSA, qui avait stocké ces fichiers, en violation des règles de l’agence, sur un PC connecté à Internet et utilisant l’antivirus de Kaspersky.
De par leur fonctionnement même, les logiciels antivirus ont accès à tous les fichiers d’un ordinateur, qu’ils analysent pour détecter s’ils contiennent des lignes de code correspondant à un logiciel malveillant. Toute personne ayant le contrôle d’un de ces logiciels peut donc aisément rechercher un fichier particulier et avoir accès à son contenu. D’après les services israéliens, les agents russes utilisaient leur accès au réseau de Kaspersky pour rechercher « agressivement » un certain nombre de fichiers appartenant à la NSA.
Kaspersky avait découvert l’intrusion israélienne en 2015, après plusieurs mois, et publié un rapport qui n’accusait pas directement Israël mais épinglait un groupe paraétatique déjà identifié, « Duqu ». Ce groupe est soupçonné d’être à l’origine du virus Stuxnet, conçu pour attaquer les centrales d’enrichissement d’uranium iraniennes, et avoir tenté d’espionner plusieurs réunions internationales consacrées au nucléaire iranien.
Le 13 septembre, le ministère de l’intérieur américain avait ordonné à l’ensemble des agences fédérales de cesser d’utiliser les produits de Kaspersky, évoquant le « risque que le gouvernement russe, seul ou en collaboration avec Kaspersky, puisse utiliser l’accès (aux fichiers) des logiciels de l’entreprise pour accéder à des informations et à des systèmes informatiques fédéraux liés à la sécurité nationale ». Les autorités américaines accusent régulièrement et plus ou moins ouvertement l’éditeur de collaborer, de plein gré ou sous la contrainte, avec les services russes, ou d’avoir été infiltré par des agents russes.
Kaspersky a, de son côté, nié toute collaboration avec le gouvernement russe dans des opérations d’espionnage. « Kaspersky Lab n’a jamais aidé, et n’aidera jamais, aucun gouvernement dans le monde dans des opérations d’espionnage », dit l’entreprise dans un communiqué. Une enquête interne a été ouverte par l’éditeur de logiciels.
Reste que plusieurs observateurs s’étonnent que deux ans séparent la découverte des services israéliens de l’interdiction faite aux services fédéraux d’utiliser les outils de Kaspersky. Sollicitée par la presse américaine, la NSA n’a pas souhaité commenter ces révélations.