A l’occasion de l’inauguration de la première éolienne flottante française, vendredi 13 septembre, à Saint-Nazaire, le secrétaire d’Etat à la transition écologique et à la solidarité, Sébastien Lecornu, précise la politique du gouvernement pour « libérer » le secteur des contraintes qui pèsent sur l’éolien.

Le gouvernement va-t-il soutenir la filière des énergies marines, encore émergente, par des appels d’offres réclamés par les professionnels ?

Le projet Floatgen que j’inaugure vendredi vise à confirmer la faisabilité technique et la viabilité économique de l’éolien flottant. Il s’agit d’une technologie parfaitement adaptée à la France, où l’éolien en mer dans son ensemble a pris un gros retard. Quatre fermes pilotes d’éoliennes flottantes ont déjà été attribuées par le gouvernement précédent, sur les sites de Groix, Leucate, Gruissan et Fos-sur-Mer. Avec cette inauguration, il s’agit de donner le coup d’envoi de l’éolien flottant. L’Etat croit beaucoup à cette filière que nous allons promouvoir durant le quinquennat, pour la faire monter en puissance.

Des députés européens écologistes et des ONG accusent la France de tenir un double discours, en se targuant d’exemplarité dans la lutte contre le changement climatique tout en freinant les efforts de développement des énergies renouvelables au niveau de l’Europe. Celle-ci a un objectif global de 27 % d’énergies vertes en 2030, mais la France ne propose un point d’étape qu’en 2026 ou 2027…

C’est un bien mauvais procès, que je m’explique mal. La France soutient pleinement l’objectif communautaire de 27 % de renouvelables en 2030, et elle s’est elle-même fixé, dans la loi de transition énergétique de 2015, un objectif plus élevé, de 32 %. Ce n’est pas au moment où nous nous engageons dans le « plan climat » présenté cet été par Nicolas Hulot, où nous programmons l’arrêt progressif de nos quatre dernières centrales à charbon, et où nous nous préparons à réduire la part du nucléaire dans notre bouquet électrique, que nous pouvons mollir sur les énergies renouvelables. Le gouvernement va au contraire « mettre le paquet » dans les mois qui viennent pour libérer le secteur des contraintes qui pèsent sur lui. Les objectifs, tant français qu’européen, seront tenus.

Les professionnels de l’éolien dénoncent les contraintes qui pénalisent le développement en France de cette énergie renouvelable…

Je connais très bien ces contraintes, pour en avoir moi-même vécu l’expérience localement. Dans mon département de l’Eure, les approches et les radars de l’aéroport d’Evreux imposent sur une partie du territoire des impératifs techniques de hauteur et de zone d’implantation. L’autre partie du territoire est soumise à des contraintes patrimoniales liées à des monuments architecturaux, comme un manoir et une église. Résultat : cela fait un bassin de près de 600 000 habitants un peu vitrifié en matière d’énergie éolienne. Et des exemples comme celui-ci, il y en a partout en France, car il y a toujours une raison objective de s’opposer à un projet d’éolienne. Aussi, pour répondre aux inquiétudes, légitimes, des opérateurs, je vais installer jeudi 19 octobre un groupe de travail national.

Quel sera l’objectif de ce groupe de travail ?

L’idée est de parvenir à une dizaine de propositions visant à simplifier et à clarifier les règles dans l’éolien, que ce soit en matière de procédures, de financement ou de fiscalité. Et aussi d’être en mesure, à terme, de proposer des cartographies qui rendront les choses plus simples. Pour la première fois, nous allons réunir autour d’une même table tous les acteurs pour faire le point sur l’acceptabilité locale des éoliennes. On y retrouvera tous les intervenants classiques représentant l’Etat et les collectivités territoriales, comme l’AMF [l’association des maires de France] ou les DRAC [Direction régionale de l’action culturelle]. Mais les ONG seront aussi représentées avec France nature environnement, WWF et la Ligue de protection des oiseaux. Et j’ai aussi souhaité qu’il y ait des juristes pour dire le droit. Au niveau du gouvernement, enfin, outre celui de la transition écologique et solidaire, les ministères de la culture et de la défense seront associés. Car au niveau de l’Etat, on doit reconnaître que la simplification et la prévisibilité interministérielle n’ont pas toujours été au rendez-vous.

Au sujet de la défense, les acteurs de l’éolien se plaignent particulièrement des contraintes militaires…

L’armée étudie chaque dossier en prenant en compte les perturbations que génèrent ces dernières sur les radars qui protègent notre territoire et les obstacles que les éoliennes peuvent représenter dans ses zones d’entraînements. Je souhaite que l’on puisse travailler à des logiques de compensation. Les terrains du ministère des armées peuvent peut-être permettre d’installer des panneaux photovoltaïques, et peut-être pourra-t-on aboutir à un accord gagnant-gagnant.