« C’est une affaire privée qui déborde sur la sphère publique », reconnaît à mots couverts un élu du Front national. En l’occurrence, en plein cœur du conseil régional d’Ile-de-France. Le 6 juillet, les conseillers régionaux siègent en séance plénière quand deux agents de la région, alertés par des cris, surprennent les élus frontistes Aurélie Cournet et Pierre-Charles Cherrier en pleine altercation physique, seuls dans une salle allouée au FN.

Selon plusieurs sources, l’élue aurait été bousculée violemment par M. Cherrier et serait tombée, se blessant légèrement. « Une rupture qui se passe mal », explique-t-on au FN pour qualifier l’attitude des deux élus, qui ont entretenu une relation amoureuse.

« Monté de toutes pièces »

« Pierre-Charles a voulu me parler, et comme j’ai refusé il m’a forcé à le suivre en m’arrachant des mains mon téléphone portable. Il m’a piégé en m’entraînant jusqu’à l’intérieur de la salle de réunion du conseil régional où il m’a arraché ma robe puis m’a giflé et m’a ensuite poussé violemment contre le mur où je me suis écroulée par terre », raconte la jeune femme dans un email qu’elle a fait parvenir à la présidente du FN, Marine Le Pen, le 7 septembre. « C’est elle qui m’a suivi dans la salle, elle a voulu reprendre son portable et elle est tombée en arrière, assure quant à lui M. Cherrier. C’est monté de toutes pièces, je me demande si elle n’a pas fait exprès de tomber. »

Les agents s’interposent entre eux tandis qu’un membre du personnel régional appelle la police. Mme Cournet ayant décidé de porter plainte, les services de la présidente de région Valérie Pécresse ont, selon nos informations, mis un agent et une voiture du conseil régional à disposition pour la conduire au commissariat du 7e arrondissement de Paris. Ce que confirme l’entourage de Mme Pécresse. La conseillère régionale frontiste avait déjà déposé, en mai, une main courante pour harcèlement et menaces contre son ex-amant. Lors de la séance du conseil régional du 21 septembre, les services ont été de nouveau mobilisés : Mme Cournet a bénéficié, à sa demande, de la protection d’un agent pour suivre les débats sous bonne garde.

« Il fait partie du clan »

La jeune femme a rencontré Marine Le Pen et réclamé que M. Cherrier soit traduit devant la commission des conflits du parti. Ce qui doit être fait, selon Wallerand de Saint Just, président du groupe FN au conseil régional – M. Cherrier affirme, lui, ne pas être au courant. « Il s’agit d’une affaire privée. C’est entre les mains de la justice », élude M. de Saint Just, qui aurait, selon plusieurs sources, plaidé en faveur de l’exclusion du conseiller régional. « J’ai assisté Mme Cournet, elle n’était pas dans un bon état, se contente d’indiquer le trésorier du FN. Je l’ai assistée pendant plusieurs heures. » Mme Le Pen, elle, ne voudrait pas écarter M. Cherrier tant qu’une condamnation judiciaire n’est pas prononcée. « Je comprends ton désarroi autant que ton souhait de ne plus le croiser au conseil régional mais je n’ai pas les moyens juridiques pour empêcher Pierre-Charles d’exercer son mandat, a répondu par email la présidente du FN à Mme Cournet. Nul ne peut se substituer au travail de la police et de la justice. »

« Dans de nombreux autres cas, l’élu aurait été suspendu, mais il fait partie du clan », estime un conseiller régional qui a quitté le groupe FN pour rejoindre Les Patriotes de Florian Philippot. M. Cherrier est en effet le gynécologue d’une grande partie de la famille Le Pen.