Indignation au Maroc après les propos d’un ministre algérien sur « l’argent du haschich »
Indignation au Maroc après les propos d’un ministre algérien sur « l’argent du haschich »
Le Monde.fr avec AFP
Après que le chef de la diplomatie algérienne a accusé les banques du royaume de blanchir de l’argent en Afrique, Rabat a décidé de rappeler son ambassadeur à Alger.
Le Maroc a annoncé, samedi 21 octobre, avoir décidé du rappel pour consultation de son ambassadeur à Alger, en réaction à des déclarations du ministre algérien des affaires étrangères, Abdelkader Messahel, accusant des entreprises marocaines de « blanchir l’argent du haschich » en Afrique. Qualifiant dans un communiqué les déclarations de M. Messahel de « gravissimes », le ministère marocain des affaires étrangères a également indiqué avoir convoqué vendredi soir le chargé d’affaires de l’ambassade d’Algérie pour lui faire part du « caractère irresponsable » des propos visés.
Intervenant la veille à Alger lors de l’université d’été du Forum des chefs d’entreprise (FCE), M. Messahel avait évoqué la montée en puissance des investissements marocains sur le continent, ces dernières années, et la rivalité entre voisins maghrébins dans ce domaine.
« Les banques marocaines, c’est le blanchiment de l’argent du haschisch, ça tout le monde le sait. Ce sont des chefs d’Etat africains qui me le disent », a affirmé le ministre, selon des extraits de l’intervention largement partagés sur les réseaux sociaux. « Si c’est ça les banques, je ne sais pas, personne ne nous impressionne. La Royal Air Maroc [compagnie publique marocaine] transporte autre chose que des passagers, et cela tout le monde le sait. On n’est pas le Maroc », a-t-il renchéri.
« Des allégations graves et mensongères »
Pour Rabat, ces propos sont « d’un niveau d’irresponsabilité sans précédent dans l’histoire des relations bilatérales » et « témoignent d’une ignorance aussi profonde qu’inexcusable des normes élémentaires du fonctionnement du système bancaire et de l’aviation civile ». « Ces déclarations sans fondement ne sauraient porter atteinte à la crédibilité ni au succès de la coopération […] avec les pays africains », a encore souligné Rabat, avant de cibler à son tour Alger. « Ces allégations mensongères ne peuvent justifier les échecs ou cacher les véritables problèmes économiques, politiques et sociaux de ce pays », a ainsi fustigé le ministère marocain.
Dans un communiqué diffusé samedi soir, la Royal Air Maroc, au cœur de la stratégie diplomatique africaine du royaume, s’est dite « scandalisée par les allégations calomnieuses » du chef de la diplomatie algérienne, se targuant d’être une « compagnie internationalement reconnue ». Les banques marocaines ont elles aussi réagi aux « allégations graves et mensongères » de M. Messahel. Dans un communiqué, le Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBN) a affirmé que le « secteur bancaire marocain est cité comme référence dans la région MENA [Moyen-Orient et Afrique du Nord] et en Afrique par sa solidité, ses performances et son respect des règles prudentielles les plus avancées ».
Les sources de tensions – parfois marquées par des rappels d’ambassadeur pour « consultation » – sont relativement fréquentes entre les deux frères ennemis du Maghreb. La frontière algéro-marocaine est fermée depuis 1994 et les deux pays entretiennent des relations difficiles, en particulier autour de la question du Sahara occidental. Cette ancienne colonie espagnole est en grande partie sous contrôle du royaume, qui la considère comme partie intégrante de son territoire. Mais le Front Polisario, soutenu par l’Algérie, en réclame l’indépendance.