Bientôt plus personne n’aura le droit de grimper Uluru, rocher sacré des Aborigènes d’Australie
Bientôt plus personne n’aura le droit de grimper Uluru, rocher sacré des Aborigènes d’Australie
Par Luc Vinogradoff
Considérée comme une profanation et un manque de respect, la montée sur l’immense rocher rougeâtre sera interdite à partir d’octobre 2019.
L’ilsenberg Uluru – qui s’élève à 348 mètres au-dessus du sol – est situé au centre de l’île principale. Ce site emblèmatique d’Australie est un lieu sacré pour les autochtones. / TORSTEN BLACKWOOD / AFP
Dans deux ans, plus personne n’aura le droit de grimper Uluru, l’immense rocher situé au centre de l’Australie et considéré comme un lieu sacré par les autochtones. Fouler la roche rougeâtre d’Uluru était mal vu par les Anangu, les premiers habitants de la région, mais pas officiellement interdit, jusqu’à la décision unanime prise par le conseil du parc national d’Uluru-Kata Tjuta.
« Le conseil, composé de huit membres aborigènes et de trois représentants des parcs nationaux, a pris sa décision après avoir consulté l’ensemble de la communauté anangu, qui était très majoritairement en faveur de l’interdiction », rapporte la chaîne ABC.
La date à laquelle s’applique l’interdiction – le 26 octobre 2019 – marquera le 34e anniversaire du retour du mont sacré sous le contrôle des aborigènes.
« La montée n’est pas interdite mais… »
Le rocher est une attraction touristique à dimension internationale, qui attire toujours autant de personnes dans cette région désertique du centre de l’Australie. Après des années d’études et de réunions, dirigeants aborigènes et autorités locales sont arrivés à la conclusion qu’interdire son ascension n’aurait pas de conséquence financière négative : « Les expériences culturelles et naturelles que l’on peut offrir aux visiteurs font la différence dans leur décision de visiter le parc », écrivent-ils.
Aujourd’hui, le rocher est entouré d’une chaîne, et un panneau d’information est disposé à l’attention des touristes. / TORSTEN BLACKWOOD / AFP
Autrement dit, pas besoin de continuer de défendre une activité qui :
- est déjà interdite 80 % du temps en raison du climat ;
- a abîmé des parties du rocher – « une cicatrice blanche, visible de loin, faite par les touristes empruntant le même chemin » ;
- n’est plus pratiquée que par une minorité de visiteurs (16,2 % en 2015, alors qu’ils étaient 38 % en 2010 et 74 % en 1990) ;
- est considérée comme une profanation d’un lieu sacré.
Actuellement, le rocher géant est entouré d’une simple chaîne, facilement contournable. Un panneau, disposé par les Anangu, informe les touristes :
« Nous, les Anangu, les propriétaires traditionnels, avons cela à vous dire : la montée n’est pas interdite mais nous vous demandons de respecter notre loi et notre culture en ne grimpant pas dessus. Nous sommes responsables de la sécurité de ceux qui visitent notre terre. La montée peut être dangereuse. Trop de gens sont morts en train d’essayer de grimper Uluru. »
Au moins 36 personnes sont mortes depuis les années 1950, sans compter les fréquentes alertes pour venir en aide à des touristes coincés en altitude. Et on ne parle même pas des ceux qui se filment au sommet en train de jouer au golf ou de se déshabiller.
Le chemin parcouru par les touristes a laissé une cicatrice blanche sur le rocher au fil du temps. / TORSTEN BLACKWOOD / AFP
« C’est un endroit extrêmement important, mais pas un terrain de jeu ou un parc d’attraction comme Disneyland », dit Sammy Wilson, président du conseil du parc national d’Uluru-Kata Tjuta, en s’adressant aux futurs visiteurs :
« Nous voulons que vous veniez, que vous nous écoutiez et que vous appreniez. (…) Nous sommes fiers de cette décision prise par les Anangu et les non-Anangu. (…) Cette terre a une loi et une culture. Nous accueillons les touristes ici. Interdire l’ascension ne devrait pas provoquer la colère, ça devrait être une source de joie. »
La période de deux ans avant l’interdiction totale a été décidée, selon ce même conseil, pour permettre aux tour-opérateurs ayant déjà vendu des billets incluant une montée de ne pas se retrouver en porte-à-faux avec leurs clients qui voudraient, malgré tout, encore monter sur Uluru.
Passé ce délai, toute personne retrouvée à entrer illégalement dans ce site sacré risquera 60 000 dollars australiens (39 500 euros environ) d’amende et deux ans de prison.