Virginia Raggi à Rome, le 12 octobre. / Massimo Percossi / AP

La scène a été dressée sur une grande place ouverte à tous les vents, à une centaine de mètres du bord de la mer. Devant elle se sont amassés près d’un millier de personnes, venues écouter la fine fleur du Mouvement cinq étoiles (M5S) romain, dont les orateurs se relaient en tribune. Si l’Italie tout entière a les yeux tournés vers la Sicile, où se tient dimanche une élection régionale considérée comme le véritable coup d’envoi de la campagne en vue des législatives, qui devraient se tenir en mars 2018, on vote également le même jour pour désigner le conseil gérant la dixième municipalité de la métropole romaine, regroupant Ostie et ses environs.

A l’extrême périphérie de Rome, à une trentaine de kilomètres du centre historique, cet arrondissement grand comme Milan, peuplé de plus de 250 000 habitants, avec ses transports publics déficients, son ramassage des ordures erratique et son administration placée sous tutelle en 2015 pour infiltration mafieuse, apparaît comme un concentré de tous les maux de la capitale.

« Mafia Capitale »

Virginia Raggi, la maire de Rome, est venue soutenir la candidate présentée par le mouvement, Giuliana Di Pillo. Lors de son élection, en 2016, elle avait réalisé ici un de ses scores les plus importants (44 % des voix au premier tour, 76 % au second). Elle joue gros dans le vote de dimanche, qui sera l’occasion de mesurer ce qui reste de sa popularité auprès du cœur de son électorat, un an et demi après sa chaotique entrée en fonctions.

Aux critiques stigmatisant son inaction et son amateurisme, elle répond en rappelant l’ampleur de la tâche qui lui incombe. « Nous sommes ici dans un endroit dévasté depuis dix ans par la Mafia et la délinquance en col blanc », avance-t-elle devant un public acquis à sa cause, avant de réclamer un peu de patience : « C’est vrai que ce que nous entreprenons prend du temps, parce que nous voulons travailler dans les règles. Ceux qui vont plus vite, ce sont les autres, c’est Mafia Capitale ! »

Dans l’arrondissement, la candidate du M5S, Giuliana Di Pillio, qui fait figure de favorite, est opposée à huit concurrents venus de tous les horizons. Selon les sondages, sa principale rivale devrait être Monica Picca, qui dispose du soutien de l’ensemble de la droite, et notamment de Giorgia Meloni, la dirigeante du mouvement postfasciste Fratelli d’Italia, très bien implanté dans la région de Rome. Mais c’est une autre candidature, encore plus à droite, qui attire tous les regards : celle de Luca Marsella, soutenu par le mouvement CasaPound, qui entend incarner rien de moins que le « fascisme du troisième millénaire ».

A la veille d’une percée

Né à Rome fin 2003, avec l’occupation d’un immeuble transformé en « centre social », ce groupuscule a grandi lentement au fil des années, aux marges de la politique italienne, réalisant des scores confidentiels aux élections (moins de 50 000 voix dans tout le pays lors des législatives de 2013). Mais il semble à la veille d’une percée retentissante. A Ostie, il s’est constitué une clientèle en portant ses efforts sur les quartiers les plus délaissés, notamment les barres d’immeuble de Nuova Ostia, construites dans les années 1970, y prodiguant une importante aide sociale exclusivement destinée aux Italiens.

Sur le terrain, sa campagne a été très discrète, mais selon les instituts de sondage il pourrait dépasser les 10 % des voix. S’il atteint ce résultat, le mouvement fasciste pourrait même se trouver en position d’arbitre à la veille du second tour.