Depuis un an, les démocrates avaient perdu le goût de la victoire. Les élections pour le poste de gouverneur en Virginie et dans le New Jersey, mardi 7 novembre, les ont remis dans la course : les deux candidats démocrates, Ralph Northam et Phil Murphy, y ont été élus confortablement face à leurs adversaires républicains.

Ces résultats constituent un avertissement pour le président américain. Ils représentent aussi, pour le parti démocrate, un signe encourageant un an avant les mid-terms, scrutins de mi-mandat qui renouvelleront la Chambre des représentants et un tiers du Sénat. Jusqu’à présent, en dépit d’une forte mobilisation anti-Trump, les démocrates n’avaient pas réussi à gagner une seule des cinq élections partielles ayant eu lieu depuis le début de l’année. La victoire de M. Northam (53,9%) sur son adversaire républicain Ed Gillespie (45%) et celle, attendue, de M. Murphy (plus de 55%), devraient rassurer un parti démocrate déboussolé depuis la défaite d’Hillary Clinton.

Mais si le « trumpisme » ne l’a pas emporté mardi en Virginie, la rhétorique du président a marqué la campagne électorale qui a précédé ce scrutin, et donné une idée de l’état des forces politiques un an après l’élection de Donald Trump.

Thèmes clivants

La bataille pour le poste de gouverneur en Virginie aurait dû être une formalité pour le parti démocrate. Pourvu d’une avance confortable jusqu’à ces dernières semaines, porté par des changements démographiques favorables à son parti, M. Northam a pourtant subi la remontée spectaculaire de son adversaire dans le seul Etat du sud où Mme Clinton l’avait emporté, l’an dernier, avec cinq points d’avance. Des millions de dollars ont été dépensés dans les deux camps au cours d’une campagne, qui s’est transformée au fil des semaines en un test national.

Empruntant sans modération le nationalisme et le populisme qui ont fait le succès de M. Trump, sans toutefois se référer au président à la popularité écornée, le candidat républicain a agité les thèmes les plus clivants pour capter l’électorat du Grand Old Party (GOP) : immigration et problèmes raciaux. Ses diatribes contre la « criminalité » des immigrants illégaux ou sa promesse de ne pas toucher aux monuments confédérés de la Guerre civile ont transformé ce républicain classique en un partisan zélé de la « guerre culturelle » alimentée par le président. Jusqu’à récemment, M. Gillespie prônait pourtant l’avènement d’un GOP plus accueillant pour les minorités.

« Trumpisme sans Trump »

Signe d’un glissement idéologique du GOP depuis l’élection de M. Trump, ce changement de pied avait été salué par Stephen Bannon, l’ancien conseiller du président. « Le trumpisme sans Trump montre la voie », avait-il analysé avant le vote. M. Trump, qui avait apporté son soutien à M. Gillespie, a visiblement peu apprécié sa défaite, qu’il a commentée en des termes peu amènes : « Ed Gillespie a travaillé dur mais il n’a pas assumé ce que je suis et ce que je défends ». Une leçon à méditer pour les candidats républicains lors des prochains scrutins.

Côté démocrate aussi, ces élections pourraient laisser des traces et faire bouger des lignes. M. Murphy a assumé un virage à gauche sur les questions sociales. De son côté, M. Northam a été débordé par son aile la plus libérale, qui a critiqué sa tiédeur sur le dossier des sans papiers. Mais les électeurs, qui selon un sondage de la chaîne MSNBC, mettaient la santé au premier rang de leurs préoccupations, devant le contrôle des armes ou l’immigration, ont apparemment été sensibles à sa promesse d’étendre à 400 000 personnes aux revenus modestes la couverture santé prise en charge par l’Etat. Une mesure que rejettent les républicains, mais qui pourrait bien être un enjeu des scrutins à venir.