Frais de mandat des députés : un chantier compliqué
Frais de mandat des députés : un chantier compliqué
Par Manon Rescan
Les questeurs de l’Assemblée nationale ont présenté une première liste de frais autorisés et de dépenses interdites au défraiement. Le système actuel doit changer au 1er janvier 2018.
Payer un baby-sitter pendant qu’un député siège en séance de nuit à l’Assemblée nationale peut-il être considéré comme un frais lié au mandat ? Faut-il demander un justificatif à chaque euro dépensé lors d’une kermesse à laquelle participe un élu ? C’est ce type de questions que les questeurs du Palais-Bourbon, la déontologue et les différents représentants de groupe tentent de démêler pour mettre en œuvre la réforme de l’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM).
Cette année, les députés perçoivent chaque mois 5 840 euros brut pour s’acquitter des dépenses liées à leur activité d’élus. Une somme qu’ils peuvent dépenser à leur guise, aucun contrôle n’étant effectué sur la manière dont ils l’utilisent.
A partir du 1er janvier 2018, le système doit changer à la faveur de la loi de moralisation de la vie publique votée cet été. L’IRFM est transformée en un système d’avance sur frais dont l’utilisation sera contrôlée. Les bureaux des deux Assemblées législatives (les sénateurs sont aussi concernés) ont été chargés de décider des modalités de ce nouveau régime.
Mercredi 8 novembre, les trois questeurs de l’Assemblée ont présenté à leurs collègues du bureau une première liste de dépenses autorisées et interdites avec l’enveloppe de l’IRFM. Ainsi, les frais de baby-sitter ne seront pas remboursés, mais des questions demeurent sur d’autres points.
Des députés sont ainsi tombés de leur chaise en découvrant la proposition permettant à des élus de se faire indemniser un pied-à-terre en circonscription, alors qu’ils sont censés y être implantés. « C’est pour les députés parachutés ! », note une députée LR, qui se dit « choquée » par la proposition. Les députés des Français de l’étranger ont, eux, fait valoir qu’avoir deux logements dans leurs vastes circonscriptions pouvait dans leur cas être justifié, et pourraient avoir gain de cause.
L’Etat viendra-t-il en outre rembourser des députés passant par des plates-formes de location entre particuliers type Airbnb pour leur hébergement à Paris ? « Ce serait cautionner un système qui fait des ravages dans l’industrie touristique et hôtelière ! », s’indigne le député socialiste Luc Carvounas, opposé à une telle proposition.
Affiner la méthode de contrôle des dépenses
Après avoir relevé les doléances des différents membres du bureau, les questeurs ont été invités à retravailler, avant de présenter un nouveau dispositif à adopter le 29 novembre. D’ici là, ils devront également affiner la méthode de contrôle des dépenses. Seule certitude à ce jour : c’est la déontologue qui s’en chargera. Avec quels moyens ? Ce n’est pas encore acté. Lors de la réunion du bureau, la députée Clémentine Autain (La France insoumise) s’est opposée à ce que la déontologue soit épaulée par un cabinet comptable privé. Le contrôle devrait être effectué de manière aléatoire, sur des députés tirés au sort chacun au moins une fois au cours de la législature.
Chaque élu devra néanmoins transmettre ses comptes et ses justificatifs tous les mois. Pour éviter l’empilement de cartons de factures, la dématérialisation du processus est envisagée. Mais ses modalités ne sont pas encore arrêtées. Les questeurs devront enfin proposer des sanctions pour les contrevenants. Autant de questions qui devront trouver des réponses rapides, à moins de deux mois de l’entrée en vigueur du nouveau système.