« La Légende du héros chasseur d’aigles » : quand la BD chinoise s’empare d’un classique de sa pop culture
« La Légende du héros chasseur d’aigles » : quand la BD chinoise s’empare d’un classique de sa pop culture
Par Pauline Croquet
S’il n’offre pas un regard nouveau sur ce best-seller chinois, le dessinateur Li Zhiqing livre une adaptation vive et soignée qui ravira les amateurs de chevaliers et de kung-fu.
Les récits de chevaliers et d’arts martiaux chinois nous sont largement parvenus en France au travers du cinéma. On se rappelle du cultissime Tigre et Dragon, et peut-être un peu moins bien de Tai-chi Master avec Jet Li et Michelle Yeoh. Ce style appelé wuxia, très populaire en Asie, compte les exploits dans les temps anciens de chevaliers errants, de justiciers loyaux et puissants. Mais il est avant tout un genre littéraire, dont le pape est Jin Yong, le Maurice Druon chinois.
Dans les années 1950, le romancier, l’un des auteurs d’Asie les plus distribués dans le monde, publie le premier tome d’une trilogie, La Légende du héros chasseur d’aigles. XIIe siècle, dans une Chine écartelée entre la dynastie des Jin et celle des Song, deux hommes, frères de cœur, se font assassiner par des envahisseurs. Leurs deux fils, sous la houlette d’un maître taoïste, se forment au kung-fu pour les venger. Si l’un choisit la voie de l’honneur pour parvenir à ses fins, le second fait preuve de beaucoup moins de droiture.
« La Légende du héros chasseur d’aigles ». / LI ZHIQING
Ce best-seller sera adapté à de multiples et infatigables reprises sur les écrans, dans les théâtres et les opéras. C’est une énième mais pour le moins originale interprétation que propose l’éditeur français Urban China : le récit en bande dessinée de Li Zhiqing, un auteur hongkongais qui a forgé sa réputation dans la reprise de récits historiques et wuxia.
L’atout majeur de cette série d’albums, bien accueillie par les lecteurs de BD en Chine, est sans aucun doute le dessin : puissant et dynamique, le coup de crayon sublime les combats et la ferveur omniprésente dans cette œuvre majeure de la pop culture asiatique. « Quand j’ai vu les premières illustrations du manhua [terme chinois qui signifie BD] de La Légende du héros chasseur d’aigles, j’avoue avoir été plus que satisfait des personnages que Li Zhiqing avait imaginés, et je le félicite du résultat final. Je n’avais après tout qu’une seule exigence : qu’il ne dénature pas l’œuvre originale », écrit Jin Yong dans la préface de la version française.
« La Légende du héros chasseur d’aigles ». / LI ZHIQING
Le format A4 des albums permet d’apprécier toute la saveur de son trait, que l’on pourrait rapprocher à certains égards du style du mangaka Hiroaki Samura dans son histoire de samouraïs, L’Habitant de l’infini. Cette version permet également au lecteur non aguerri au wuxia de découvrir une épopée fondatrice du genre avec moins de difficulté.
Le premier album de cette série se tient seul et se dévore lentement. La somme constituée de 19 tomes épais de 400 pages a toutefois de quoi décourager. Urban China a déjà publié les trois premiers depuis la fin de l’été, espérant garder son lectorat dans le rythme. L’histoire un peu compliquée – propre au wuxia et à cette époque de l’histoire –, mérite toutefois de la persévérance. Qui aime les sagas ne sera ici vraiment pas déçu.
La Légende du héros chasseur d’aigles, tomes 1, 2 et 3, de Li Zhiqing, d’après l’œuvre de Jin Yong, Urban China, 402 pages, 19,95 €.
« La Légende du héros chasseur d’aigles ». / LI ZHIQING