TV – « L’Art du crime » et les ruses du pinceau
TV – « L’Art du crime » et les ruses du pinceau
Par Véronique Cauhapé
Notre choix du soir. La nouvelle série de France 2 met en scène un duo épatant qui, pour résoudre des énigmes policières, doit se glisser dans l’histoire intime de grands peintres (sur France 2 à 21 heures).
L'Art du crime : Making of
Durée : 02:58
Viré de la PJ pour insubordination, il a été muté à l’OCBC (Office central de lutte contre le trafic des biens culturels). Il est antipathique, inculte et bon enquêteur. Elle est historienne de l’art, réputée, pleine de fantaisie et d’imagination. Or ces deux-là vont être contraints de travailler ensemble afin d’élucider un crime commis pour un tableau volé, pourtant sans grande valeur. A moins que le portrait qui s’offre à notre regard (coqué par un peintre de seconde zone) n’en dissimule un autre, signé Léonard de Vinci dont la valeur serait inestimable.
Voilà en somme exposé les deux intérêts – et non des moindres – que présente cette nouvelle série de France 2. D’abord, un duo mal assorti qui fournit au récit une dynamique humoristique dont les scénaristes comme les acteurs n’abusent pas plus que de raison. Ensuite, le terrain de jeu sur lequel ses deux protagonistes Antoine Verlay (Nicolas Gob) et Florence Chassagne (Eléonore Gosset) sont chargés de mener leur action : le trafic d’art. Un terrain qui nous conduit dans des lieux tels que les musées, les laboratoires et cabinets d’expertise. Plus que des décors, ceux-ci sont les passeurs d’un savoir technique et d’une connaissance historique capables de révéler les secrets, le sens caché d’une œuvre.
« L’Art du crime », une série créée par Angèle Herry-Leclerc et Pierre-Yves Mora. / FRANCE 2
Et de cela on ne se lasse pas dans L’Art du crime qui, avec pédagogie (et sans prendre le téléspectateur pour un idiot), révèle l’intimité et le savoir-faire de l’artiste, les ruses auxquelles il a dû se plier pour déjouer la censure et la morale de son époque ; décrypte un tableau à travers certains de ses indices, à la manière d’un crime et des traces laissées pas l’assassin. Ce parallèle auquel se sont livrés avec beaucoup d’amusement, semble-t-il, les scénaristes Angèle Herry-Leclerc et Pierre Yves Mora, fournit matière à réflexion, à la fois sur l’art du crime et la création (ainsi que les motivations de leurs auteurs), l’art de la dissimulation, de la représentation, de la posture et de l’imposture.
Portée par une réalisation dont la maîtrise éclaire finement le propos – tant du côté de Charlotte Brändström (pour les épisodes 1 et 2) que de celui d’Eric Woreth (épisodes 3 à 6) – L’Art du crime a aussi la bonne idée d’étendre chaque enquête sur deux épisodes. Le moyen est judicieux, autorisant à creuser le profil des personnages, principaux ou secondaires ; et à distiller – plutôt que de les asséner par manque de temps – les éléments nécessaires à la connaissance et à la compréhension d’une œuvre.
Du coup, c’est à une leçon fort divertissante à laquelle nous fait assister cette série, et non à un cours magistral. Leonard de Vinci, Watteau, Artemisia, Gentileschi et Guéricault ont plus que le beau rôle. Ils passionnent.
L’Art du Crime, série créée par Angèle Herry-Leclerc et Pierre-Yves Mora. Avec Nicolas Gob, Eléonore Gosset-Bernheim, Philippe Duclos (Fr., 2017, 6x50 min).