Documentaire sur Arte à 22 h 35

La banane : l’histoire d’un simple fruit devenu symbole de la mondialisation, ainsi que nous le raconte le documentaire de Mathilde Damoisel. Ce fruit consommé par les ouvriers costaricains – réquisitionnés en 1871 par l’entrepreneur new-yorkais Minor Cooper Keith pour la construction d’une ligne de chemin de fer dans le pays –, apparaît au tournant du XXe siècle sur les étals des marchés nord-américain. A l’époque c’est une denrée rare et chère, car rapidement périssable. Celui qui assurera son transport à temps en fera son business. Et cela, Minor Keith l’a vite compris. En redoutable homme d’affaires, il utilise ses lignes ferroviaires pour exporter le fruit, faisant ainsi de la banane un produit de consommation populaire. Et va plus loin encore, en créant en 1899 la United Fruit Company (UFC), une des premières multinationales au monde.

Dans son film, Mathilde Damoisel tente de démontrer comment l’UFC aurait introduit le capitalisme en Amérique centrale. Et nous fait découvrir les méthodes utilisées par Minor Keith pour étendre son empire. Dès la fin de la première guerre mondiale, notamment, l’entrepreneur s’empresse de proposer aux pays d’Amérique centrale en quête de développement, d’asseoir leur économie sur l’exportation de bananes. Et ce en échange d’argent destiné à racheter les terres des paysans souvent à prix dérisoire – quand elles ne leur sont pas directement confisquées –, de l’usage gratuit des lignes ferroviaires qu’il construit, et d’une faible charge en impôt.

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Les plantations de Minor Keith deviendront ainsi de véritables petites enclaves américaines aux relents racistes et esclavagistes. La Jamaïque, où est notamment implantée l’UFC, sera un grand pourvoyeur de main-d’œuvre. Tous les employés sont payés en bons d’achat exclusivement utilisables dans les commerces de la United Fruit Company, en situation de monopole. La machine capitaliste est désormais lancée. Dangereuse et brutale, mettant en jeu la santé des ouvriers, sommés d’utiliser des produits toxiques pour produire toujours plus de bananes, elle le sera davantage encore lorsque le moldave Samuel Zemurray, surnommé le « Tsar de la banane », succédera en 1933 à Minor Keith, décédé en 1929,

La Loi de la banane illustre les balbutiements de l’impérialisme américain et ses dérives, à l’aide d’images d’archives et d’analyses de spécialistes comme Gaël Giraud, économiste à l’Agence française pour le développement (AFD). Et donne à réfléchir sur l’héritage laissé par la United Fruit Company en Amérique latine, notamment dans l’utilisation intensive de pesticides.

La loi de la banane, de Mathilde Damoisel (Fr., 2017, 53 min).