Airbus, Siemens et Rolls-Royce préparent un moteur d’avion hybride
Airbus, Siemens et Rolls-Royce préparent un moteur d’avion hybride
Par Eric Albert (Londres, correspondance)
Les tests sont espérés en 2020, mais il faudra attendre 2030 pour en voir, peut-être, les premières applications commerciales.
Ne retenez pas tout de suite votre souffle : la commercialisation des avions de ligne hybrides, c’est-à-dire fonctionnant partiellement à l’électricité, n’est pas prévue avant les années 2030. Mais, mardi 28 novembre, Airbus, Siemens et Rolls-Royce ont fait un pas de plus sur le chemin vers cet objectif. Les trois entreprises européennes ont annoncé à Londres qu’elles allaient travailler à un prototype de moteur hybride, E-Fan X, dont les premiers vols sont prévus pour 2020.
Il est destiné à être utilisé à terme à des appareils qui transporteront entre cinquante et cent passagers. « Potentiellement, cela peut révolutionner l’aviation de la même façon que l’introduction des turbines à gaz dans les années 1940 », estime Frank Anton, de Siemens.
Une très forte diminution du bruit
Les tests seront réalisés sur un avion BAe146, un petit appareil quadrimoteur d’une centaine de places. Au premier stade, l’un des quatre moteurs sera remplacé par le prototype électrique de 2 mégawatts. Il sera accompagné d’une batterie de 2 mégawatts, qui se rechargera pendant le vol avec l’énergie des trois autres moteurs conventionnels. A terme, deux des moteurs devraient être électriques.
Pour les trois entreprises, le défi est de travailler à – relativement – grande échelle, pour dépasser les petits prototypes qui se sont multipliés ces dernières années. « Le premier avion hybride a volé en 2011, mais il était pour deux personnes. Maintenant, nous devons passer à la taille supérieure », explique M. Anton.
Sur le papier, les avantages des avions hybrides sont clairs : réduction de la consommation de carburant et très forte diminution du bruit, d’autant que l’électricité est particulièrement utilisée au décollage et à l’atterrissage. « Les moteurs actuels sont extrêmement efficaces (en matière de consommation de carburant) quand l’avion est dans les airs, explique Mark Cousin, d’Airbus. Mais c’est moins le cas à d’autres moments, notamment au décollage. Comme pour les voitures, on veut utiliser l’électricité lors du démarrage ou d’autres phases similaires. »
Un défi, le poids des batteries
Sur cette base, Paul Stein, de Rolls-Royce (l’entreprise de moteurs d’avion, qui n’a rien à voir avec les voitures du même nom), imagine un avenir lointain où l’aviation pourrait supplanter le transport ferroviaire. « Avec la baisse de la pollution sonore, on peut envisager des aéroports plus proches des centres-villes, permettant de voyager facilement sur des petits trajets régionaux. » Il pense en particulier à des pays émergents où les infrastructures sont encore peu développées, et où le transport est difficile, comme l’Indonésie.
Mais avant d’arriver à cette lointaine vision, il va falloir mettre au point la technologie. Le poids des batteries, en particulier, est un défi gigantesque. Celle utilisée dans le prototype fabriqué par les trois entreprises, d’une puissance de deux mégawatts, pèsera deux tonnes. « Il faut qu’on divise par dix le poids tout en conservant la même puissance », résume M. Anton. Le décollage n’est pas imminent.