Le Tribunal de Paris récompensé par l’Equerre d’argent
Le Tribunal de Paris récompensé par l’Equerre d’argent
Par Jean-Jacques Larrochelle
Le plus grand complexe judiciaire d’Europe a été conçu, porte de Clichy, par Renzo Piano Building Workshop.
Le nouveau bâtiment du Tribunal de Paris, porte de Clichy, dans le 17e arrondissement, en octobre 2017. / STÉPHANE DE SAKUTIN/AFP
Le jury de l’édition 2017 de l’Equerre d’argent s’est dit « bluffé ». Lundi 27 novembre, réuni au Conseil économique, social et environnemental, et après des heures de délibération, il a attribué cette distinction au Tribunal de Paris – conçu, porte de Clichy, dans le 17e arrondissement, par Renzo Piano Building Workshop. Le programme a fait l’objet d’un contrat de partenariat public privé (PPP), signé en 2012 entre le ministère de la justice et la société de projet Arelia, présidée par Bouygues. Autre distinction d’importance, le prix de la première œuvre a été décerné au centre d’hébergement d’urgence à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), réalisé par l’atelier Rita pour le compte d’Emmaüs Solidarité.
Deuxième plus haut bâtiment dans l’intra-muros de la ville après la tour Montparnasse (210 mètres, dans le 15e arrondissement), le Tribunal de Paris, plus grand complexe judiciaire d’Europe, concentre tous les superlatifs : 160 mètres de haut, 38 étages, 90 salles d’audience, plus de 100 000 m2 de planchers, une capacité d’accueil de 2 500 salariés et 8 500 visiteurs. Livré en juin, il doit abriter les vingt tribunaux d’instances de la capitale, le tribunal de grande instance (TGI) de Paris, le tribunal correctionnel, le tribunal de police, le tribunal pour enfants et le tribunal des affaires de sécurité sociale.
Système à gradins
Posé à la lisière nord de la capitale, le projet est d’une très grande visibilité, en dépit d’un important maillage de hautes constructions alentour. Afin d’en atténuer le caractère trop massif, voire martial, le bâtiment, où le verre domine et dont la transparence se révèle dès le soir venu, se décompose en quatre volumes superposés de taille décroissante. Ce système à gradins permet l’installation de grandes terrasses, où seront plantés quelque 500 arbres.
Les équipes du plus français des architectes italiens ont aussi pensé à l’inscription de l’édifice dans son contexte immédiat. Dans un souci d’intégration qui « saute aux yeux », ils l’ont dessiné dans le prolongement exact de l’oblique que trace la voie principale du parc des Batignolles, tout proche.
Surtout, ils ont imaginé, au pied du tribunal, une vaste place publique réservée à la circulation des piétons. Ce parvis de granit, arboré, doit permettre de ne pas isoler l’institution du tissu urbain du quartier. Une précaution qui a, hélas, toujours fait défaut à la tour Montparnasse, la grandeur d’un bâtiment dans la ville ne se mesurant pas à sa hauteur mais à la qualité de ses racines.
Un coût de 2,4 milliards d’euros
La grandeur du Tribunal de Paris se mesure aussi au montant de sa facture : 670 millions d’euros pour la construction (estimation 2015). Si, pour la troisième fois (après la Philharmonie de Paris et l’Hexagone de Balard), l’Etat signe un PPP avec Bouygues, le cas de figure est cette fois-ci différent puisque le constructeur devient propriétaire des lieux. L’Etat s’acquittera d’un loyer de 90 millions d’euros pendant vingt-sept ans. Coût total de l’opération : quelque 2,4 milliards d’euros, la chancellerie ayant obtenu une réduction de 360 millions sur le montant initial.
Le prix de l’Equerre d’argent, créé dès 1960 puis repris en 1983 par la revue Le Moniteur, récompense la collaboration entre une équipe composée du maître d’ouvrage et celle du maître d’œuvre pour un bâtiment réalisé sur le sol français et terminé dans l’année. Outre le premier prix et la première œuvre, trois autres catégories ont été distinguées cette année : « culture-jeunesse-sport » (Musée Camille-Claudel, par Adelfo Scaranello et Nogent Musée et Ville de Nogent-sur-Seine, dans l’Aube), « ouvrage d’art » (Passerelle à Creil, dans l’Oise, signée par Jean-François Blassel pour la Communauté de l’agglomération creilloise) et « lieu d’activité » (hôpital à Trévenans, dans le Territoire de Belfort, réalisé par Brunet Saunier Architecture, avec Gerold Zimmerli et Serge Gaussin & Associés, pour Hôpital Nord Franche-Comté).