A Bruxelles, Puigdemont réunit ses députés mais n’évoque toujours pas son retour en Catalogne
A Bruxelles, Puigdemont réunit ses députés mais n’évoque toujours pas son retour en Catalogne
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen)
L’ex-président, destitué par Madrid, sait que s’il regagne l’Espagne, il sera arrêté. Ce qui pose la question d’une éventuelle investiture à distance et de la manière dont il entendrait exercer le pouvoir.
Vingt-cinq élus posant devant une grande structure métallique sciemment choisie pour sa couleur jaune, la teinte fétiche des indépendantistes catalans. C’est à peu près tout ce que l’on retiendra de la « séance de travail » organisée, vendredi 12 janvier, dans un hôtel de Bruxelles, par Carles Puigdemont et une grande partie des députés de sa formation, le Parti démocrate européen catalan (PDeCAT, droite). Deux autres sont emprisonnés et certains n’avaient pu quitter Barcelone, leur passeport leur ayant été retiré.
Une fois la séance de pose achevée, l’ex-président de Catalogne, candidat à sa réélection mais toujours en exil, s’est retiré avec son groupe sans répondre à aucune question. Le but essentiel était manifestement d’éviter l’oubli médiatique et de mobiliser les nombreux correspondants espagnols présents dans la capitale belge et européenne.
Deux porte-parole, s’exprimant surtout en catalan pour cette troisième conférence de presse des indépendantistes à Bruxelles, ont, une nouvelle fois, appelé le pouvoir espagnol à « respecter la démocratie » et « la normalité », concrétisée par la mise en place d’un gouvernement que dirigerait leur leader.
Etre ou ne pas être présent physiquement
Carles Puigdemont, mis en examen pour « rébellion », ne manifeste toutefois pas l’intention de regagner Barcelone. « Il aimerait rentrer, mais… », a seulement lâché un membre de son entourage. L’ancien président, destitué par Madrid après la déclaration d’indépendance du 27 octobre 2017, sait que s’il met un pied en Espagne, il sera arrêté. Ce qui pose la question de son éventuelle investiture à distance et de la manière dont il entendrait exercer le pouvoir.
Deux voies sont ouvertes : présider la Catalogne à distance, par vidéoconférence, ce que la presse espagnole a surnommé ironiquement la « Skype-présidence », ou rentrer à Barcelone, éventuellement accompagné de milliers de personnes, pour se livrer à la justice après avoir été réélu à la tête de la région.
La Gauche républicaine de Catalogne (ERC), dont M. Puigdemont a besoin pour être réélu, a prévenu qu’elle attendrait l’accord des services juridiques du Parlement catalan avant de se prononcer sur son investiture à distance.
Les juristes de la Chambre régionale catalane jugent apparemment que la présence physique du candidat serait indispensable.
Le PDeCAT estime, en revanche, que d’autres solutions sont possibles et dépendent de la future présidence de l’assemblée, qui fixera les règles de l’élection.
Plusieurs scénarios possibles
Les porte-parole du PDeCAT évoquent plusieurs scénarios possibles, sans les détailler outre mesure, avant l’élection du bureau du Parlement, qui doit avoir lieu mercredi.
La séance de travail à huis clos de vendredi visait probablement à trancher entre ceux-ci. L’hypothèse de voir M. Puigdemont céder finalement sa place à un autre candidat n’a, en tout cas, pas été mentionnée devant les journalistes.
Lors de la conférence de presse soigneusement encadrée, le temps manquait aussi, semble-t-il, pour évoquer Carme Forcadell, la présidente du Parlement régional sortant, poursuivie pour avoir fait voter des lois jugées anticonstitutionnelles par Madrid. Ou pour parler du retrait récent d’Artur Mas, président du PDeCAT et mentor de M. Puigdemont. Or, avant l’annonce de son départ, M. Mas s’était prononcé en faveur d’une législature « longue » et « constructive » qui « respecte le cadre légal espagnol ».