Un moyen-métrage « Harry Potter » réalisé par des fans redéfinit les contours du « fanfilm »
Un moyen-métrage « Harry Potter » réalisé par des fans redéfinit les contours du « fanfilm »
Par Morgane Tual
« Voldemort : Origins of the Heir » raconte l’émergence de Voldemort, l’ennemi d’Harry Potter, en 52 minutes. Réalisé avec soin, ce film a déjà cumulé plus de quatre millions de vues en ligne.
Voldemort: Origins of the Heir - An unofficial fanfilm (HD + Subtitles)
Durée : 52:41
C’est un film impressionnant qui a été mis en ligne, samedi 13 janvier, quand on sait qu’il a été réalisé par des fans de Harry Potter. Voldemort : Origins of the Heir raconte l’émergence de Voldemort, l’ennemi de Harry Potter, en 52 minutes, réalisées de façon très professionnelle. De quoi pousser encore un peu plus loin les limites des « fanfilms », ces vidéos créées par des fans – une pratique courante, dont certains n’ont plus rien de la petite production artisanale et amateure.
Tryangle Films, qui produit ce moyen-métrage anglophone financé par les internautes, met les choses au point dès le début de sa vidéo : « ce film est un film non commercial réalisé par les fans pour les fans et n’est pas approuvé, affilié ou associé avec Warner Bros. ou J. K. Rowling ». Sur YouTube, la vidéo affiche pourtant de la publicité, et avec plus de quatre millions de vues obtenues en moins de quarante-huit heures, elle générera des revenus pour ses créateurs.
Dans un premier temps, Warner Bros., qui détient les droits des adaptations cinématographiques de Harry Potter, s’en était pris au projet et avait notamment demandé en juillet dernier son retrait de la plate-forme de financement participatif Kickstarter. Tryangle Films avait plus tard annoncé avoir trouvé un accord avec l’entreprise. « Nous avons eu une conversation privée et confidentielle avec Warner Bros., qui nous a contactés pendant la campagne de crowdfunding », a expliqué le réalisateur du film au site spécialisé Polygon. « La seule chose que nous pouvons dire, c’est qu’ils nous laissent continuer le film, évidement sans que nous en tirions profit. » Sans connaître les détails de l’accord, difficile de savoir pourquoi ce film « non commercial » affiche de la publicité.
La délicate question des « fanfilms »
J. K. Rowling, l’autrice de Harry Potter, ne s’est pas exprimée publiquement sur ce film. Par le passé, elle s’est généralement montrée bienveillante à l’égard des créations de fans, et notamment des « fanfictions » (récits) et « fanarts » (dessins) qui pullulent sur la Toile. Une tolérance qui a notamment permis à la communauté de fans de Harry Potter de devenir l’une des plus grandes du Web et l’une des plus actives – toujours aujourd’hui, alors que le dernier livre de la saga originale a été publié en 2007 et le dernier film diffusé en 2011.
Le sujet des « fanfilms » est une question délicate pour les détenteurs des droits des franchises à succès. D’un côté, ils représentent un bel hommage et une forme de publicité gratuite – puisqu’ils font parler de la franchise et participent à animer la communauté de fans. De l’autre, ils peuvent être considérés, notamment quand ils sont de grande qualité, comme une forme de concurrence directe et de violation du droit d’auteur.
Un « fanfilm » de Star Trek en a notamment fait les frais. CBS et Paramount avaient porté plainte en 2015 contre ce projet de long-métrage, nomme Axanar, dont le budget financé par les fans avait atteint pas moins de 1 million de dollars. Qui plus est, le film comptait au casting un ancien acteur de Star Trek. Alors que les plaignants réclamaient l’abandon du projet et 150 000 dollars de dommages et intérêts « pour chaque œuvre Star Trek dont le copyright a été violé », un accord a, finalement, été trouvé l’an dernier, imposant notamment au film une durée de trente minutes maximum. L’affaire, qui a fait grand bruit dans la communauté des fans, a aussi poussé CBS et Paramount à publier un règlement concernant les « fanfilms », leur imposant plusieurs restrictions. Ce qui avait suscité de vives critiques dans la communauté des fans de Star Trek, et au-delà.
« Voldemort : Origins of the Heir » : l’avis de Pixels
C’est en relisant le sixième livre de la saga de J.K. Rowling, Harry Potter et le prince de sang mêlé, que les créateurs du film ont eu l’idée de développer l’histoire de Voldemort. « qu’est-ce qui a poussé le personnage de Tom Jedusor à devenir le sorcier le plus détesté et craint du monde ? », expliquent-ils sur leur site. Résultat : un fanfilm impressionnant, avec des images, des décors et des costumes soignés, qui met en scène Grisha Mac Laggen, héritière de Godric Gryffindor, dans sa tentative de sauver Tom Jedusor « de lui-même ».
C’est un vrai plaisir que de voir réalisé avec autant de professionnalisme une histoire écrite par des fans – le fantasme de tout amateur de fanfictions, ces écrits inspirés d’une œuvre comme Harry Potter. Le film n’est toutefois pas parfait (effets de mise en scène parfois trop appuyés, tout comme le jeu des acteurs), et l’histoire, bien qu’intéressante, n’est toutefois pas palpitante. Mais comment en tenir rigueur à un si beau projet ? Pour le moment, le film, tourné en anglais, ne dispose que de sous-titres dans la même langue. Gageons que la communauté de fans proposera bientôt des sous-titres en français.