Les étudiants de plus en plus formés aux compétences « douces »
Les étudiants de plus en plus formés aux compétences « douces »
Par Béatrice Madeline
Les écoles comme les recruteurs valorisent désormais les « soft skills » ou « qualités comportementales », comme la confiance en soi, la créativité, la gestion du stress ou la capacité à travailler en groupe. Ce qui conduit les écoles à intégrer ces aptitudes dans leurs cycles d’apprentissage.
Olivier Bonhomme
Face à des profils de jeunes diplômés de plus en plus comparables (parcours internationaux, stages, expériences associatives), les « soft skills » retrouvent leurs lettres de noblesse aux yeux des recruteurs. Qualités comportementales et relationnelles, confiance en soi, créativité, capacité à résoudre des problèmes ou à prendre des décisions, gestion du stress, gestion du temps, ces « compétences douces », réunies sous un anglicisme à la mode, pèsent lourd dans une carrière. Parfois autant, sinon plus, qu’un diplôme.
Pour le psychiatre Jacques-Antoine Malarewicz, également intervenant en entreprise, rien d’étonnant à ce que ces « soft skills » refassent surface après avoir été un peu oubliées.
« Dans les entreprises, aujourd’hui très fortement informatisées et numérisées, il y a une énorme souffrance. Pour contrebalancer cette toute-puissance de la technologie, il faut améliorer la communication interhumaine, la coopération, qui est une notion incroyablement importante, décrypte-t-il. Et aujourd’hui, une entreprise a absolument intérêt à ce que les gens travaillent ensemble. »
Module obligatoire
A tel point que quelques grandes écoles ou universités ont travaillé sur des programmes spécifiques pour « apprendre » ces « savoir-être » à leurs étudiants. Au Pôle universitaire Léonard-de-Vinci, dans les Hauts-de-Seine, il s’agit même d’un module obligatoire pour tous dès la première année, et doté de crédits ECTS.
« C’est un programme récent, que nous avons créé il y a deux ans, explique Laure Bertrand, directrice des soft skills et services pédagogiques transverses, mais il a pris d’emblée une importance réelle dans le cursus. » Sur leurs cinq années d’études, les étudiants bénéficieront donc de trois cent cinquante heures d’enseignement autour de la connaissance de soi, des relations avec les autres et du travail d’équipe, et de la capacité à communiquer ses idées, à construire un discours…
Les « soft cursus » sont dispensés par des professionnels en exercice – coachs, psychologues, formateurs certifiés… Si une évaluation complète du bénéfice de ce programme ne pourra être faite qu’au bout d’un cycle complet de cinq ans d’études, les parents sont d’ores et déjà satisfaits, affirme Laure Bertrand :
« Ils sont ultrasensibles à notre discours autour des soft skills, car ils voient très bien que, dans le monde du travail, les compétences techniques ne suffisent absolument plus. »
Etudiants enthousiastes
Partant des mêmes réflexions, Paris-Dauphine a mis en place un programme comparable, Trajectoires, conçu pour les trois années de la licence. « Les soft skills ont vocation à irriguer les autres savoirs, souligne Renaud Dorandeu, directeur du département LSO (Licence sciences des organisations). Nous pensons que les étudiants vont mieux apprendre si on les aide à discerner leurs forces et leurs faiblesses, à se responsabiliser. »
En cours ou en travaux de groupe, ils planchent donc sur quelques thèmes-clés : « Qui suis-je, quelles sont mes ressources ? » ; « Me connaître dans mon environnement » ; « Comment me connaître mieux dans ce qui correspond à ma personnalité professionnelle ? »
Obligatoires mais non notés, ces séminaires représentent actuellement une douzaine d’heures par an mais vont monter en puissance pour atteindre deux à trois heures par semaine, car, note Renaud Dorandeu, « tous les retours que nous avons eus depuis deux ans de la part des RH qui ont recruté nos étudiants sont extrêmement enthousiastes ».
A Sciences Po Paris, enfin, « la notion de soft skills, ou “savoir être”, fait partie de l’ADN de l’école », fait valoir Delphine Grouès, directrice des études et de l’innovation pédagogique. Mais ces compétences sont plus que jamais encouragées dans le contenu même des cours : capacité à argumenter sur une thématique, prise de parole, cartographie des controverses pour entraîner les étudiants au débat sont au cœur de la pédagogie. En première année de l’Ecole d’affaires publiques et de l’Ecole de droit, l’art oratoire est une discipline obligatoire, il est aussi développé dans toutes les conférences de méthode et lors des simulations internationales.
Créativité encouragée
Depuis 2010, les étudiants du Collège universitaire (premier cycle) doivent en outre choisir un atelier artistique pour développer différents modes d’expression et une démarche collective : écriture, théâtre, chant… La créativité est aussi enseignée au travers d’ateliers de « design thinking », une méthode pour « trouver des solutions originales aux problèmes les plus complexes », proposés en particulier aux étudiants en entrepreneuriat.
Enfin, l’université Grenoble-Alpes a mis en place un programme essentiellement tourné vers la créativité, qui entretient un lien étroit avec les soft skills. Les étudiants sont amenés à travailler sur des projets d’innovation transversaux, qui peuvent toucher toutes les disciplines : littérature, histoire, informatique, géographie…
Des projets qui « les amènent à mieux se connaître, à oser des expériences, à être capables de générer de nouvelles idées », explique Valérie Chanal, professeure de management et directrice scientifique du programme Promising. Autant de qualités qui s’avéreront précieuses dans une carrière.
« Le Monde » organise son 13e salon des masters et mastères spécialisés, samedi 27 janvier 2018
Avec la réforme de la sélection en master, qui s’effectue principalement à l’entrée du M1, il est important de se renseigner en amont sur les critères d’admission dans les différents cursus. Le 13e Salon des masters et mastères spécialisés du groupe Le Monde, organisé samedi 27 janvier aux Dockes - cité de la mode et du design à Paris, sera l’occasion d’assister à six conférences animées par la rédaction et de rencontrer près d’une centaine d’établissements – grandes écoles de commerce et d’ingénieurs, universités et Instituts d’administration des entreprises (IAE) –, qui présenteront quelque 3 000 programmes, toutes spécialités confondues. L’entrée sera gratuite, la préinscription est recommandée pour éviter l’attente à l’entrée.
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