Aux Pays-Bas, des révélations sur l’intrusion du Kremlin dans la présidentielle américaine
Aux Pays-Bas, des révélations sur l’intrusion du Kremlin dans la présidentielle américaine
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, Correspondant)
Les services néerlandais ont espionné dès 2014 les hackeurs qui sont entrés dans les réseaux de la Maison Blanche et du Parti démocrate.
Donald Trump et Hillary Clinton, alors candidats à la présidentielle américaine, à Las Vegas, le 19 octobre 2016. / ROBYN BECK/AFP
Des médias néerlandais ont publié, vendredi 26 janvier, des informations sur le rôle des services de renseignement du royaume (AIVD et MIVD) dans les révélations sur l’intervention de la Russie lors des dernières élections présidentielles américaines. Une enquête conjointe de la chaîne publique NOS et du quotidien De Volkskrant indique qu’une opération de piratage informatique menée par des spécialistes néerlandais à partir de l’été 2014 leur a permis d’infiltrer le groupe russe de hackers Cozy Bear. Celui-ci se livrait déjà à ce moment à des opérations d’intrusion dans les systèmes d’information de la Maison Blanche, du département d’Etat et du Parti démocrate.
En 2014, les autorités de La Haye ont créé le Joint Sigint Cyber Unit (JSCU), une nouvelle unité spéciale spécifiquement chargée de la cybersécurité, qui aurait notamment permis de repousser des attaques russes contre des ministères du royaume. Le JSCU a rapidement identifié, expliquent les journalistes de la NOS et du Volkskrant, le groupe de hackers russes chargés d’espionner les Etats-Unis, localisés dans un bâtiment universitaire de Moscou et placés sous l’autorité des services de renseignement extérieurs. Le piratage d’une caméra de surveillance aurait permis d’identifier les membres – une dizaine – de ce groupe.
Courriels de Barack Obama
Ces indications sur « le plus grand piratage de l’histoire » selon des experts ont été rapidement communiquées au FBI, indiquent les deux médias. Mais les intrusions se sont poursuivies sur une longue période, pour des raisons qui restent inexpliquées compte tenu des avertissements lancés par les Néerlandais.
Le New York Times, notamment, a publié depuis le récit des erreurs et des hésitations du Parti démocrate et de l’entourage du président Barack Obama à l’époque. Elles ont permis à Cozy Bear et à un autre groupe, Fancy Bear – aussi connus sous les noms de APT 29 et APT 28, ou The Dukes – de disposer d’un flux massif d’informations, dont les milliers de courriels de la candidate démocrate Hillary Clinton, parvenus aux services russes FSB et GRU. Ils ont ensuite été transmis à WikiLeaks, qui les a publiés.
Des courriels du président Obama, des plans de voyage de celui-ci et des notes confidentielles auraient également été dérobés. L’enquête du FBI, actuellement menée par le procureur spécial Robert Mueller, aurait, selon les journalistes néerlandais, été déclenchée à la suite des informations livrées par l’AIVD et le MIVD. Le Washington Post avait déjà évoqué l’aide apportée par « un allié occidental » pour repousser la première attaque connue des cyberpirates russes, au bout de 24 heures seulement.
Pour les patrons des services de renseignement néerlandais, qui se sont exprimés publiquement il y a quelques jours sans évoquer le rôle précis de leurs spécialistes, le rôle du Kremlin dans la tentative d’influencer la campagne américaine ne fait en tout cas « aucun doute ». La ministre de l’intérieur, Kajsa Ollongren, s’est contentée d’indiquer que les responsables du renseignement alertent de longue date sur le possible rôle de puissances étrangères. Depuis 2017 et les révélations faites aux Etats-Unis, les experts néerlandais n’auraient plus d’indication sur les activités de Cozy Bear.