Le difficile parcours des femmes pilotes de ligne
Le difficile parcours des femmes pilotes de ligne
Par Jean-Claude Lewandowski
Dans les cockpits comme dans les écoles de pilotage, la féminisation du métier de pilote de ligne se fait lentement.
Air France, avec quelque 300 femmes sur environ 3 800 pilotes, se classe plutôt au-dessus de la moyenne en termes de nombre de femmes pilotes dans ses cockpits. / Pixabay / Creative Commons CC0
Si quelques pionnières ont joué un rôle important dans l’histoire de l’aviation, les femmes peinent toujours à s’imposer dans les cockpits des avions de ligne. La proportion de pilotes de sexe féminin y tourne autour de 10 % dans les meilleurs des cas ; mais elle est parfois proche de zéro – notamment dans certaines compagnies asiatiques, qui se refusent à féminiser leurs équipages. Air France, avec quelque 300 femmes sur environ 3 800 pilotes, se classe plutôt au-dessus de la moyenne.
La situation n’est guère différente dans les écoles de pilotage. « Nos promotions comptent autour de 10 % de femmes, indique Philippe Crébassa, directeur adjoint de l’Ecole nationale de l’aviation civile (ENAC), qui dispense la formation (gratuite) de l’Etat et forme aussi des « cadets » étrangers. Depuis quelques années, ce taux progresse légèrement, mais cela porte sur de tout petits effectifs. De façon générale, la représentation du métier demeure très masculine. » Le concours d’entrée à l’ENAC n’est d’ailleurs ouvert aux femmes que depuis 1973. Constat similaire pour l’Association française des femmes pilotes, qui souligne que, « si la présence des femmes dans les cockpits des avions de ligne a cessé d’être une exception, leur parcours reste difficile ».
Quelques signes d’évolution
Ces difficultés, Amélie Bussonet, 27 ans, diplômée de l’ENAC en 2012, y a longtemps été confrontée. « Dans ma promotion, nous n’étions que trois filles sur cinquante élèves, explique-t-elle. Mais cela ne m’a pas trop gênée. Après tout, quand tout va bien, on est aussitôt remarquée… »
Attirée dès l’enfance par « l’envie de voler »,la jeune femme a passé dès le lycée son brevet d’initiation à l’aéronautique. On lui déconseille cependant d’envisager une carrière de pilote, à cause de sa myopie. Elle se présente malgré tout au concours d’entrée à l’ENAC… et est admise en 2009. A sa sortie, pas de chance : la crise ralentit le rythme des embauches dans les compagnies. Bien décidée à atteindre son objectif, Amélie Bussonet exerce donc divers emplois dans le secteur : pilote pour une ONG en Afrique, instructrice en aéro-club, puis à l’ENAC… Aujourd’hui, elle vient enfin d’être recrutée par Air France et se dit « ravie d’exercer ce métier magnifique ».
Un biais dans la sélection ?
En dépit des clivages persistants, quelques signaux montrent une évolution du secteur. Plusieurs compagnies commencent à afficher des objectifs ambitieux de recrutement de pilotes femmes. C’est le cas des compagnies marocaines. Parallèlement, la proportion de candidates à l’ENAC augmente peu à peu : elle tourne désormais autour de 20 % du total. Ce qui a conduit l’école à engager une réflexion sur la sélection à l’entrée.
« Avec 20 % des candidatures, les femmes ne sont que 10 % à réussir le concours, constate Philippe Crébassa. A quoi attribuer ce décalage ? Existe-t-il un biais quelque part – dans les tests psychologiques ou lors de l’entretien ? Nous sommes en train d’y réfléchir. » Mais la route est encore longue vers la parité dans les cockpits…