Ta-Nehisi Coates : « Captain America est comme Barack Obama, il croit en l’idéal de l’Amérique »
Ta-Nehisi Coates : « Captain America est comme Barack Obama, il croit en l’idéal de l’Amérique »
Par Pauline Croquet (Austin (États-Unis), envoyée spéciale)
Le journaliste et scénariste du comics « Black Panther », est revenu, lors du festival South by Southwest, sur sa participation à l’univers Marvel.
Journaliste et auteur à succès, Ta-Nehisi Coates est considéré comme l’un des penseurs afro-américains les plus influents de sa génération. Mais c’est sa contribution à l’univers des comic books — et plus particulièrement à Black Panther, dont l’adaptation au cinéma vient de dépasser le milliard de dollars de recettes — qui a été au cœur de son intervention au festival South by Southwest (SXSW), à Austin (Texas), samedi 10 mars.
Great conversation between The Atlantic’s Ta-Nehisi Coates and Jefferey Goldberg. #sxsw https://t.co/ZeIjSQzSjQ https://t.co/jUnqEUDtft
— CurrencyTim (@Tim McAlpine)
Devant plusieurs centaines de personnes, il s’est exprimé sur sa décision d’accepter d’écrire, pour Marvel, une partie des prochains épisodes de la célèbre franchise Captain America. Pourtant, Ta-Nehisi Coates le reconnaît : dans sa jeunesse à Baltimore bercée par la figure de Malcolm X — « il était comme Jésus à la maison » — ce héros blanc ultra-patriote ne l’intéressait pas. « Captain America est comme Barack Obama, il croit en l’idéal de l’Amérique », affirme l’écrivain avant de préciser : « Soyons clairs, il ne s’agit ni de louanges ni de critiques. Il croit vraiment en cet idéal ».
C’est justement ce qui amuse l’auteur de Une colère noire, lettre à mon fils (Autrement, 2016), fervent critique politique de l’administration Trump, mais aussi un grand déçu de la présidence Obama. Écrire Captain America est une façon de s’attaquer à cet idéalisme américain :
« Quand tu écris des comic books, tu ne peux pas rester dans ton monde. »
« Bizarrement optimiste »
Quid de la politique d’écriture dans l’univers Marvel ? « Quand vous faites des bandes dessinées dans un endroit comme Marvel, vous prenez une histoire qui est déjà en cours. Pour l’écrire, vous devez faire toutes ces recherches historiques, vous devez lire tous ces autres bandes dessinées. » Une règle à laquelle l’auteur ne dérogera pas pour Captain America :
« Toute proposition que je ferai sera basée sur ce qui s’est passé avant. J’aime ce genre de chose. Je pense que c’est vraiment, vraiment cool. J’aime faire partie d’un plus grand arc et d’une histoire plus grande. »
Ta-Nehisi Coates n’a pas tari d’éloges sur Ryan Coogler, « le grand réalisateur » du film Black Panther. Cette adaptation sur grand écran a été en partie inspirée par le travail de M. Coates en tant que scénariste de la bande dessinée depuis 2016.
« Ryan Coogler a réussi quelque chose que l’on avait jamais vu. Regardez le casting qui regroupe des acteurs noirs venus du monde entier. C’est un message important pour la diaspora. »
« Le racisme est un luxe »
Jeffrey Goldberg, son rédacteur en chef à l’hebdomadaire The Atlantic et l’animateur de la conférence, a bien tenté de revenir sur le sujet de sa venue — le journalisme à l’ère de Donald Trump — en demandant à l’auteur comment il percevait la couverture médiatique de l’actuelle présidence : « Je me sens bizarrement optimiste. Je vois beaucoup moins d’indécision concernant Trump qu’il n’y en a eu dans le passé ». Et de lui demander s’il était se sentait militant : « mon travail d’écrivain est différent. Celui d’un activiste est de convaincre les gens de s’engager, faire quelque chose. Ce n’est pas ce que je fais ».
À la fin de la conférence, Ta-Nahisi Coates s’est aussi exprimé sur le racisme, thème central de son œuvre. Jeffrey Goldberg lui a demandé ce qui pourrait y mettre fin :
« Une perte complète de la blancheur et de sa suite de privilèges. Une redistribution massive de la richesse. […] Le racisme est un luxe. Tant que vous pouvez vous le permettre, vous allez faire ce que vous pouvez pour le garder. Quand il devient trop coûteux de garder, le racisme devient inutile. »