Accusé d’avoir participé à des heurts violents entre migrants et forces de l’ordre à la frontière serbo-hongroise en 2015, un Syrien a vu sa peine confirmée lors d’un nouveau jugement en Hongrie, mercredi 14 mars. Ahmed H., devenu le symbole d’une dérive sécuritaire dans ce pays d’Europe centrale, a été condamné à sept ans de prison pour terrorisme et entrée irrégulière. Selon Eda Seyhan, d’Amnesty International :

« Lui qui aura simplement tenté d’aider sa famille à fuir la Syrie a été injustement diabolisé dans le tribunal tout comme à l’extérieur. Aucune des preuves à son encontre ne constitue un acte de terrorisme. »

La décision de justice survient en pleine campagne électorale et alors que le premier ministre souverainiste, Viktor Orban, candidat à sa réélection le 8 avril, a publiquement reproché à l’Union européenne de « soutenir le terrorisme ». Cette dernière, comme Washington, s’était inquiétée du caractère disproportionné de la condamnation d’Ahmed H. lors de son premier procès.

La Commission européenne a ouvert une procédure d’infraction à l’encontre de la Hongrie, accusée de bafouer les droits humains : les magistrats collent étrangement, concernant les dossiers de migrants entrés illégalement dans le pays, au discours de fermeté du gouvernement. Le Parlement européen a aussi fait référence au cas d’Ahmed H. pour réclamer en mai 2017 le déclenchement d’une procédure de sanctions à l’encontre de Budapest.

Mauvais endroit au mauvais moment

Le 16 novembre 2016, Ahmed H., décorateur résidant à Chypre, avait été reconnu coupable de « franchissement illégal de la frontière, acte de terrorisme et participation à un attroupement portant atteinte à l’ordre public ». Le jugement le qualifiait alors de « dangereux fanatique religieux », parce qu’il avait approfondi sa connaissance du Coran et était membre d’une organisation sunnite ayant pignon sur rue.

Quadragénaire, réfugié depuis neuf ans à Chypre, marié à une Chypriote chrétienne, père de deux petites filles, Ahmed H. s’était trouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Il avait pris la route des Balkans à l’été 2015, dans le but d’arracher ses parents et d’autres membres de sa famille aux combats sévissant à Alep. Il souhaitait les conduire en Allemagne, où l’attitude ouverte de la chancelière Angela Merkel tranchait avec celle de ses voisins. Mais il s’était présenté à la frontière hongroise, le 16 septembre, au moment où Budapest venait de se barricader et de pénaliser toute traversée sauvage de la clôture. Des centaines de migrants s’étaient alors retrouvées dans une impasse côté serbe et avaient imploré les forces de l’ordre de les laisser passer.

Des affrontements avaient éclaté et onze d’entre eux avaient été emprisonnés. Depuis, ceux que les ONG avaient surnommé les « onze de Röszke », du nom du poste frontière en question, ont tous été libérés, sauf Ahmed H., que Viktor Orban persiste à vouloir décrire comme un « terroriste ». Il est l’unique migrant condamné à ce titre en Hongrie. Il peut encore faire appel.