Le peloton du Tour de France lors de la 9e étape de l’édition 2017 entre Nantua et Chambéry, le 9 juillet. / BENOIT TESSIER / REUTERS

La chasse aux moteurs est déclarée. L’Union cycliste internationale (UCI) met en place dès ce week-end un contrôle par rayons X, dans le cadre d’un vaste plan de lutte contre la fraude technologique. Il s’agit d’abord de « protéger les coureurs contre les rumeurs » et démontrer que le peloton roule à la force du vent et des mollets.

Même s’il n’existe aucun cas avéré de présence de moteur dans un le vélo d’un grand coureur actuel (malgré de nombreuses rumeurs), l’UCI veut aller plus loin et répondre aux critiques sur la présumée absence de fiabilité de ses systèmes de contrôle utilisés jusqu’à maintenant. Le Français David Lappartient, qui a succédé en septembre à l’Anglais Brian Cookson à la tête du cyclisme mondial, avait fait du combat contre le dopage technologique une des priorités de sa campagne électorale.

Quatre mois plus tard, il passe à l’acte. « Le rôle de l’UCI, c’est de garantir la fiabilité du résultat, de protéger les athlètes, mais aussi de les protéger contre de nombreuses rumeurs », a insisté M. Lappartient à Genève, lors de la présentation de son plan d’action. « Nous souhaitons démontrer que nos coureurs n’utilisent pas de moteur. Le but est de démontrer qu’il n’y en a pas et que tout le monde se bat à armes égales. Il nous est apparu important d’élaborer des documents et des méthodes pour lutter efficacement », a-t-il ajouté.

Péraud en expert

Pour ce faire, une unité de contrôle des vélos par rayons X va être « mise en œuvre dès ce week-end » dans une course du WorldTour. Un tel système de contrôle par rayons X avait déjà été utilisé sur le Tour de France 2010. Cette unité mobile, sorte de gros cube installé sur une remorque et construit par la société VJ Technologies et dont l’UCI ne possède pour le moment qu’un seul exemplaire, est « une solution indéniable, qui permet de lire dans le vélo comme dans un livre ouvert et évite le démontage », a expliqué Jean-Christophe Péraud, ancien coureur professionnel français et ingénieur en génie énergétique.

Vice-champion olympique de VTT et 2e du Tour de France 2014, Péraud a été recruté en novembre par l’UCI pour diriger la commission « matériel et lutte contre la fraude technologique » de l’UCI. « Nous serons présents avec cette technologie sur les cinq continents et dans 18 pays. Nous allons couvrir 50 % du calendrier WorldTour, mais aussi d’autres disciplines, comme le mountain bike [VTT] ou la piste », a-t-il affirmé.

L’UCI va continuer dans le même temps à utiliser son système de tablettes magnétométriques, mais souhaite développer avec le Commissariat français à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) un outil plus abordable « à destination des fédérations nationales », a annoncé M. Lappartient.

Le précédent Van den Driessche

« Nous conservons aussi la possibilité d’utiliser les caméras thermiques et on n’exclut pas non plus de faire des démontages physiques des vélos, comme on l’a fait aux Mondiaux de cyclo-cross », a-t-il ajouté. « La crédibilité n’a pas de prix, mais elle a un coût », a relevé le président breton de l’UCI, précisant que l’instance avait pour le moment investi « 500 000 euros » dans ce nouvel outil à rayons X, ainsi que sur la recherche fondamentale et sur la future tablette à magnétométrie.

Le CEA, qui développe le nouveau système de détection à magnétométrie, devrait livrer une étude de faisabilité « d’ici à neuf mois », a expliqué son directeur général adjoint, Gabriele Fioni. L’UCI souhaite aussi à terme avoir recours à la technologie RFID qui permet grâce à des « tags » de marquer et d’identifier tous les éléments présents dans le peloton et ensuite de lire les « tags ». Cela peut être utile en cas de changement « intempestif » de vélo par un coureur, explique l’UCI.

Un premier cas prouvé d’un vélo aidé par un moteur dissimulé, en janvier 2016 aux Mondiaux de cyclo-cross, avait valu à la Belge Femke Van den Driessche une suspension de six ans par l’UCI. En France, le premier cas avéré d’une telle fraude technologique a été détecté en octobre lors d’une course amateur, sur le vélo d’un coureur de 43 ans.

Par ailleurs, le parquet national financier (PNF) français a lancé des investigations sur des soupçons d’escroquerie et de corruption dans le cyclisme professionnel, notamment au moyen de moteurs dissimulés dans les vélos. Il n’y a pas que le contrôle « anormal » de Chris Froome au salbutamol qui risque d’animer les prochaines discussions du peloton.