La livraison en zone urbaine, nouveau terrain de jeu des distributeurs
La livraison en zone urbaine, nouveau terrain de jeu des distributeurs
LE MONDE ECONOMIE
Face à la concurrence d’Amazon, les enseignes élargissent leur offre de services.
A Landerneau (Finistère), en juin 2013. / JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP
Après la guerre des prix, la livraison à domicile alimentaire en zone urbaine est devenue le nouveau terrain de jeu des enseignes de la grande distribution alimentaire. Leclerc entre dans la danse à Paris, le 26 mars, après avoir effectué une phase de test pendant quinze jours auprès de ses salariés.
Son nouveau service à domicile, « Leclerc chez moi », sera d’abord lancé dans le nord de Paris, puis dans le sud de la capitale, à partir du 15 mai. Il promet des tarifs inférieurs de 15 % à 20 % à la concurrence, pour des courses alimentaires livrées en vingt-quatre heures, et compte générer le chiffre d’affaires d’un grand hypermarché dès la première année.
Les commandes seront livrées depuis un nouveau site logistique de 6 000 m2, situé à Pantin (Seine-Saint-Denis). Mais Leclerc a aussi l’ambition d’ouvrir des magasins dans la capitale. Après un premier point de vente ouvert en 2016 dans le 19e arrondissement, un deuxième sera inauguré en avril 2020 dans le centre commercial du quartier de la Gaîté-Montparnasse, à deux pas de la gare.
Montant des frais de livraison, critère le plus important
Après avoir adopté le système du drive, où les consommateurs viennent récupérer eux-mêmes les courses commandées par Internet, les enseignes cherchent à compléter l’éventail de leurs services, avant que le géant américain Amazon ne se développe massivement. Pour le moment, ce dernier propose, depuis juin 2016, un service de livraison express de courses alimentaires sur Paris, baptisé Prime Now, qui repose sur un entrepôt situé dans le nord de Paris.
Mais, en plus de construire une nouvelle offre, les distributeurs doivent rivaliser avec l’image d’Amazon. Dans une étude pour Generix parue mi-février, 52 % des Français interrogés par OpinionWay estiment que le champion de l’e-commerce tient mieux ses engagements que les distributeurs français dans la ponctualité des délais de livraison. Et 48 % d’entre eux jugent le montant des frais de livraison comme étant le critère le plus important. D’ailleurs, 64 % des Français ont déjà abandonné un achat sur Internet en raison du coût de la livraison, d’après un baromètre de GS1 France et Sprint project, paru mi-mars.
Le créneau attire les enseignes
Habitués à la gratuité par le géant américain, les consommateurs veulent de moins en moins payer la livraison, ce qui rend le service difficile à rentabiliser pour les distributeurs traditionnels. Ils évoquent un coût compris entre 15 et 18 euros pour livrer dans Paris à partir d’un entrepôt situé en périphérie. L’un des prestataires d’Amazon facturerait ainsi 15 euros le service. Une course qu’Amazon fait payer 5,90 euros à ses clients abonnés à son programme de fidélisation Amazon Premium, s’ils veulent être livrés en une heure, et qui est gratuite pour une livraison en deux heures.
Pourtant, le créneau attire les enseignes. Franprix livre, depuis novembre 2017, à Paris et en région parisienne, en trente minutes, avec les coursiers de Stuart, les commandes faites à partir d’une application sur téléphone mobile, et prélevées dans les magasins. Le service, gratuit au-delà de 30 euros d’achats, est aujourd’hui rentable, assure-t-on chez Franprix, dont l’application a été téléchargée 600 000 fois.
Occuper le terrain de la communication
Carrefour a, de son côté, lancé, il y a un an et demi, Carrefour Express dans 15 villes de France, également avec Stuart. Monoprix (groupe Casino) s’est rapproché, en décembre 2017, de la start-up Epicery, qui livre dans l’heure des produits issus de commerces de bouche de proximité. D’ici dix-huit à vingt-quatre mois, le groupe livrera ses commandes à partir d’un nouvel entrepôt automatisé, avec la technologie du distributeur alimentaire sur Internet Ocado. En attendant ce nouveau site logistique, Monoprix serait, selon le magasine LSA, sur le point de s’allier avec Amazon pour utiliser son service Prime Now de livraison express.
Chez Casino, on relativise l’arrivée de Leclerc, estimant que si celui-ci parvenait à récupérer 10 % du marché parisien, cela ne toucherait pas plus que 1 % du chiffre d’affaires de Monoprix et de Franprix. S’ils se disent sereins, les distributeurs cherchent néanmoins à occuper le terrain de la communication, à l’image de Carrefour et sa vaste campagne de publicité rappelant sa présence auprès des habitants de la capitale.