La presse américaine s’interroge sur les suites politiques des marches anti-armes
La presse américaine s’interroge sur les suites politiques des marches anti-armes
Par Stéphanie Le Bars (Washington, correspondance)
Des centaines de milliers de personnes ont défilé samedi, maintenant au premier plan le sujet du contrôle des armes. Mais l’effet du mouvement sur les élections de novembre reste incertain.
Après la mobilisation et l’émotion, les questions. La Marche pour nos vies qui a rassemblé des centaines de milliers de personnes dans plusieurs villes des Etats-Unis, samedi 24 mars, trouvera-t-elle un second souffle politique ? La presse américaine a abondamment relaté les manifestations qui, pour la première fois dans l’histoire du pays, sont parvenues à réunir sur un mot d’ordre d’ordinaire clivant : le contrôle des armes.
Le pays a partagé les larmes d’Emma Gonzalez, la lycéenne devenue l’une des efficaces porte-voix des jeunes de Parkland (Floride), lieu de la tuerie qui en février a réveillé le mouvement anti-armes. Comme le relate le Washington Post, les longues minutes de silence qu’elle a imposées à l’immense foule rassemblée devant le Capitole, à Washington, resteront comme l’un des « moments qui a bouleversé la nation », « le rappel que les instants les plus forts peuvent être ceux sur lesquels on n’essaye pas de mettre des mots ».
Pour autant, les éditorialistes s’interrogent sur les effets à court terme de ce succès. Certains semblent penser que « quelque chose » est en train de se passer. Comme le constate Vox, les jeunes de Parkland, et les manifestants avec eux, demandent des changements régulièrement plébiscités par l’opinion publique : plus de contrôle sur les ventes, interdiction des armes de guerre, restrictions pour les personnes souffrant de troubles psychiques.
Mais les lois ne suivent pas car « le contrôle des armes n’est pas une priorité pour les électeurs, alors qu’au contraire les opposants en font un critère de choix lors du vote ». Or, poursuit le magazine, « si le succès n’est pas garanti », on voit aujourd’hui « un mouvement totalement dédié à ce sujet, ce qui pourrait influencer le vote de certains Américains ».
« Risques et périls »
L’analyse est partagée par le New York Times pour qui la détermination des rassemblements anti-armes de ce week-end montre que « le sujet de la violence des armes ne va pas disparaître du paysage pour les élections de mi-mandat en novembre ». Ce nouveau contexte pourrait même mettre « des candidats républicains sur la défensive pour la première fois depuis des décennies ».
Selon le quotidien, républicains et démocrates reconnaissent que « la question des armes est en train de devenir un point de ralliement important pour les électeurs anti-Trump et pour ceux qui en ont assez de l’immobilisme de Washington face aux fusillades de masse ».
Ainsi, le gouverneur républicain de l’Ohio, John Kasich, a estimé dimanche sur CNN que les électeurs « voulaient des changements » ; ajoutant que les républicains qui l’ignoreraient « le feraient à leurs risques et périls ».
Mais pour le quotidien USA Today, le pari des jeunes de Parkland n’est pas gagné. En dépit des promesses des orateurs qui, lors de la Marche, ont invité les manifestants à poursuivre « la révolution » dans les urnes, « ce ne sera pas facile d’ouvrir la voie ».
La bataille du mouvement «#NeverAgain ne fait que commencer, estime le journal, qui prédit que beaucoup se jouera désormais « au niveau local, en maintenant la pression sur les élus ». Il rappelle aussi la force de la National Rifle association (NRA) qui depuis des années « a ralenti ou détruit tous les efforts » pour améliorer le contrôle sur les armes.