TV – Avec « Sandwich », Benjamin Carle croque le fait-maison
TV – Avec « Sandwich », Benjamin Carle croque le fait-maison
Par Christine Rousseau
Notre choix du soir. En confectionnant un pan-bagnat de A à Z, le journaliste interroge la mode du « do-it-yourself » (sur Canal+ à 21 heures).
« Professeur Nimbus » du documentaire de société, Benjamin Carle aime s’immerger, expérimenter, se lancer des défis au long cours. Comme il y a trois ans, lorsqu’il a décidé de vivre, durant une année, en ne consommant que des produits 100 % français. Après cette expérience « made in France », celuiqui ne rechigne pas à donner de sa personne, a décidé de « reprendre en main… [ses] mains ».
Conscient de pas savoir faire grand-chose concrètement de ses dix doigts, le journaliste a décidé de se fabriquer un sandwich de A à Z, sans passer par la case « supérette du coin ». Ecartant le traditionnel jambon-beurre trop simple de prime abord – quoique – histoire de pimenter l’affaire, notre « jusqu’au-boutiste » a jeté son dévolu sur le plus célèbre des casse-croûte méridionaux : le pan-bagnat. Pour donner une petite idée de l’expérience, rappelons que la recette comporte une quinzaine d’ingrédients, assaisonnement compris. Et presque autant de métiers et de savoir-faire à découvrir et à mettre en pratique.
« Individualisme extrême »
Au fil des mois et des rencontres avec des agriculteurs, jardinier, pêcheur, oliveron, éleveur, boulanger, Benjamin Carle va apprendre à retourner la terre, à semer du blé à l’ancienne, à monter une jardinière sur le toit d’un immeuble, à élever des poules, à confectionner son sel, sa farine et son pain. Entre ces multiples apprentissages, relatés avec saveur, loin de croiser ses bras, le journaliste est allé interroger sociologue, anthropologue et philosophe, sur ce que recouvre le phénomène de mode « do-it-yourself » (« faire soi-même ») dont le philosophe Gaspard Koening pointe à juste titre « l’individualisme extrême » ; et, au-delà, ce qui pousse certains à se reconvertir dans un métier manuel, voire, dans les cas les plus extrêmes, à vivre en autarcie.
En cause : la société de consommation et son prêt-à-consommer, mais également l’organisation complexe du travail, qui donne le sentiment de n’être qu’« un maillon dans un grand tout », etune forme de dématérialisation qui nourrissent sentiment de dépossessionet de frustration. Une sensation que l’on éprouve à l’issue de ce film, certes goûteux, mais par trop léger dans sa garniture sociologique.
Sandwich, de Benjamin Carle, Neels Castillon et Félix Seger (Fr., 2018, 90 min).