Comment transmettre son patrimoine dans une famille recomposée
Comment transmettre son patrimoine dans une famille recomposée
Par Marie Pellefigue
On peut choisir de privilégier l’un de ses enfants ou préférer répartir ses biens entre tous. Dans tous les cas, mieux vaut anticiper.
Chaque enfant bénéficie d’une part réservataire minimale dans la succession. Le solde peut être transmis par testament. / Aflo Foto/Photononstop
Vous êtes parents d’enfants nés d’une ou plusieurs unions, vous avez constitué un patrimoine avec un nouveau conjoint qui a lui-même des enfants d’un premier lit… Attention, terrain miné ! Mal prévue, la transmission de votre patrimoine, qu’elle soit anticipée par des donations ou finale avec une succession, pourrait être compliquée. « Quand des personnes en couple investissent, seules ou à deux, elles doivent avoir le réflexe de se projeter dans le temps pour savoir ce que deviendra ce patrimoine », conseille Arlette Darmon, présidente du groupe Monassier.
Première règle à connaître : en France, le code civil interdit de déshériter ses enfants. Chacun bénéficie d’une part réservataire minimale dans votre succession. « En présence d’un enfant, elle correspond à la moitié de la succession, deux enfants se partagent les deux tiers et trois enfants et plus les trois quarts », explique Sophie Bizien, notaire à Saint-Pol-de-Léon. Vous pouvez ensuite transmettre le solde, appelé quotité disponible, à qui vous souhaitez par testament. A défaut, cette part sera partagée entre vos héritiers légaux.
Il est donc possible, en donnant la quotité disponible à l’un de vos enfants, de l’avantager. Mais pour anticiper les querelles, expliquez à la fratrie pourquoi vous le privilégiez ou fournissez cet éclaircissement dans votre testament. Les raisons de votre choix peuvent être très factuelles : handicap d’un des enfants, envie de protéger le moins fortuné. En outre, « les enfants qui s’estiment lésés n’en voudront pas à leur frère ou sœur avantagé, mais à leur parent si ce dernier a expliqué son geste », souligne Sophie Bizien.
L’autre moyen de favoriser l’un de vos enfants, ou de donner à un bel-enfant non adopté, consiste à le nommer bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie. « Au décès du titulaire, il recevra les fonds hors succession, donc sans que les règles de réserve ne s’appliquent dessus, et avec une fiscalité très attrayante », précise Elisabeth André, membre du directoire d’Altaprofits. Dans une famille recomposée, l’assurance-vie peut aussi être utilisée pour rééquilibrer une succession entre enfants de différents lits.
Donation simple, donation-partage
Pour favoriser l’un de vos enfants de votre vivant, accordez-lui une donation. « Elle peut être réalisée en avance de part successorale ou hors part successorale, dans le premier cas l’enfant recevra le même montant que ses frères et sœurs le jour de la succession, dans le second, il aura plus puisque la donation s’imputera d’abord sur la quotité disponible », explique Nathalie Couzigou-Suhas, notaire à Paris. Attention, si vous ne gratifiez qu’un seul enfant, il s’agit d’une donation simple dont la valeur sera réévaluée au jour de votre décès. Si votre enfant a fait fructifier les sommes données (investissement dans un portefeuille titres, achat d’un appartement…), il devra partager les plus-values avec sa fratrie.
Pour éviter cela, privilégiez si vous le pouvez la donation-partage. Réalisée devant notaire, elle réunit tous vos héritiers et fige la valeur des biens donnés dans le temps. Si l’un des enfants dilapide le capital donné il ne pourra donc pas demander d’indemnisation à ses frères et sœurs le jour de la succession. Avantage supplémentaire, « La donation-partage implique que chacun reçoive un bien différent, elle permet donc de transmettre en pleine propriété à chacun, ce qui évite l’indivision le jour de la succession », ajoute Arlette Darmon. Enfin, depuis 2007, la donation-partage est ouverte aux familles recomposées. Chaque parent donne alors à chacun de ses enfants issus de toutes ses unions. Les enfants non communs aux deux conjoints ne peuvent recevoir de biens communs qu’avec l’accord explicite du nouvel époux de leur parent, les biens propres ne peuvent être transmis qu’à des enfants « de sang ».