Paludisme : l’urgence de trouver de nouveaux traitements
Paludisme : l’urgence de trouver de nouveaux traitements
Par Paul Benkimoun
L’apparition de résistances aux antipaludiques est un enjeu majeur de santé publique. Les dérivés de l’artémisinine, la classe thérapeutique la plus récente, sont utilisés en association, et non en monothérapie, afin de préserver leur efficacité.
La prévention du paludisme vise à se mettre à l’abri des piqûres (vêtements, répulsifs, moustiquaires) et inclut, dans le cas des voyageurs, la prophylaxie (prévention) médicamenteuse.
S’y ajoute la lutte contre les moustiques vecteurs de la maladie au moyen d’insecticides. Dans cette lutte vectorielle, des expériences de modifications génétiques sont également menées sur les moustiques, visant à les rendre stériles.
Le traitement des personnes infectées consiste quant à lui à détruire le parasite. En ciblant en premier lieu sa vacuole nutritive, petite cavitéoù le parasite digère l’hémoglobine, ou bien son cytoplasme, où peuvent être synthétisés les acides nucléiques (ADN, ARN).
Les principaux médicaments antipaludiques ciblent soit la forme à laquelle aboutit le parasite dans les globules rouges (le schizonte), soit les acides nucléiques. Agissant rapidement, les « schizonticides » comprennent deux types de médicaments : les dérivés quinoléiques et les dérivés de l’artémisinine, principe actif extrait d’une plante, Artemisia annua, variété d’armoise chinoise. Dans les deux cas, le médicament interfère avec l’utilisation de l’hémoglobine. Parmi les dérivés quinoléiques, on retrouve les antipaludiques historiques (quinine, chloroquine) et d’autres plus récents : amodiaquine, méfloquine, halofantrine, luméfantrine.
Les dérivés de l’artémisinine constituent la classe thérapeutique la plus récemment apparue. Ils sont également actifs sur les gamètes du plasmodium et sont utilisés en association et non en monothérapie afin de limiter l’apparition de résistances, comme cela s’est produit avec les antipaludiques classiques. De plus, afin d’améliorer l’efficacité des dérivés de l’artémisinine, d’autres voies que la prise orale d’artésunate (sel d’artémisinine) sont utilisées chez l’enfant et l’adulte, comme l’injection – intraveineuse ou intramusculaire – ou la voie rectale (suppositoires).
L’autre grande classe d’antipaludiques est représentée par les médicaments qui ciblent les acides nucléiques. Elle comprend trois familles : les antifoliques (l’acide folique est impliqué dans la synthèse des acides nucléiques) tel le proguanil, les molécules qui inhibent les fonctions des mitochondries du plasmodium, comme l’atovaquone, et certains antibiotiques comme les macrolides ou les tétracyclines.
Parasites mutants
Le traitement varie selon l’espèce de plasmodium en cause (elle diffère selon les régions du globe). La plus fréquemment rencontrée, Plasmodium falciparum, est a priori traitée soit par une association artémisinine-luméfantrine, soit par la combinaison atovaquone-proguanil (commercialisée sous le nom de Malarone). D’autres associations telle la combinaison de deux antifoliques (sulfadoxine-pyriméthamine ou Fansidar)ont l’inconvénient de faire rapidement émerger des parasites mutants devenus résistants au traitement.
Comme avec tous les anti-infectieux, qu’ils s’attaquent à des bactéries, des virus ou des parasites, le problème majeur des traitements du paludisme demeure le phénomène des résistances du plasmodium. Des monothérapies avec de l’artésunate ont ainsi engendré des résistances qui se sont étendues aux cinq pays de la région du Grand Mékong : Cambodge, Laos, Myanmar (Birmanie), Thaïlande et Vietnam. La crainte, évidemment, est de les voir s’exporter en Afrique subsaharienne, comme précédemment avec la chloroquine. D’où l’urgence de développer de nouveaux traitements.
Ce dossier a été réalisé dans le cadre d’un partenariat avec Unitaid.