M. McCain est considéré comme un héros de la guerre du Vietnam, où il a passé plus de cinq ans comme prisonnier de guerre et a été torturé pendant sa captivité. / TASOS KATOPODIS / AFP

On ne s’en prend pas impunément au sénateur républicain John McCain. Agé de 81 ans, six mandats de sénateur à son actif, ancien candidat à l’élection présidentielle de 2008, il souffre d’un glioblastome, diagnostiqué en 2017, une forme agressive de cancer du cerveau dont est mort en 2009 le sénateur démocrate Ted Kennedy.

Absent du Congrès, où il n’a pas fait d’apparition depuis le début de l’année, il n’en reste pas moins, au sein du camp républicain, l’un des rares à faire entendre sa différence face aux errements de Donald Trump.

Le rôle de Gina Haspel après le 11-Septembre

Depuis son fief, M. McCain s’est en effet opposé à la nomination de Gina Haspel – choisie par le président Trump pour diriger la CIA, où elle a passé plus de trente ans – en raison de son rôle controversé dans des programmes d’interrogatoires poussés après le 11-Septembre. Elle avait dirigé pendant au moins une partie de l’année 2002 une prison secrète de la CIA en Thaïlande, où des détenus suspectés d’appartenir à Al-Qaida avaient été torturés.

« Je crois que Gina Haspel est une patriote qui aime son pays et a consacré sa vie professionnelle à son service et sa défense. Cependant, son rôle dans Ia supervision de l’utilisation de la torture est inquiétant, et son refus de reconnaître l’immoralité de la torture est rédhibitoire », a-t-il écrit dans un tweet.

En réponse, Kelly Sadler, une conseillère en communication de la Maison Blanche, aurait déclaré, jeudi à huis clos, que l’opposition du sénateur à la nomination de Gina Haspel n’était pas grave. « Il va mourir, de toute façon », a réagi Mme Sadler. Les propos de cette dernière ont déclenché une vive polémique.

McCain, héros de la guerre du Vietnam

Si les critiques de McCain contre Gina Haspel rencontrent peu d’écho auprès des élus républicains, le sénateur est considéré comme un héros de la guerre du Vietnam, où il a passé plus de cinq ans comme prisonnier de guerre et a été torturé pendant sa captivité, comme l’a rappelé Paul Ryan, le speaker républicain à la Chambre des représentants.

L’ancien vice-président démocrate Joe Biden, un ami proche de M. McCain, s’est indigné. « Les gens se demandaient quand l’administration toucherait le fond en matière de décence. C’est arrivé hier », a-t-il dit dans un communiqué. « Etant donné le manque de respect de la Maison Blanche envers John et d’autres, cette collaboratrice n’est pas l’exception à la règle, mais son incarnation », a-t-il ajouté.

Le clan McCain a aussitôt montré son indignation. La fille de John McCain, Meghan, a estimé que Kelly Sadler, l’auteure de cette remarque, devait être limogée. « Je ne comprends pas l’environnement dans lequel [ces propos] seraient acceptables et que vous puissiez revenir au travail le lendemain et garder votre emploi », a-t-elle dit sur ABC. « Ne vous en faites pas pour notre famille, nous sommes forts », a-t-elle ajouté. L’épouse de John McCain, Cindy, a elle aussi réagi : « Puis-je vous rappeler que mon mari a une famille, sept enfants et cinq petits-enfants ? », a-t-elle écrit sur Twitter, en s’adressant directement à Kelly Sadler.

Mais Sarah Sanders, porte-parole de la Maison Blanche, a refusé de s’excuser au nom de l’exécutif ou d’aborder le sujet frontalement, affirmant n’avoir aucun commentaire à faire sur des propos tenus « lors d’une réunion interne ». « Nous respectons tous les Américains », a-t-elle simplement affirmé, confirmant par ailleurs que Kelly Sadler travaillait toujours à la Maison Blanche. Mme Sadler a présenté ses excuses à Meghan McCain pour ses propos.

Attaques de Donald Trump contre John McCain

Le président Donald Trump s’en était déjà pris aux états de service de M. McCain pendant la campagne électorale de 2016. « C’est un héros parce qu’il a été capturé ? J’aime les gens qui n’ont pas été capturés », avait-il lancé.

Un animateur de la chaîne TV Fox Business a également présenté ses excuses jeudi auprès du sénateur sur Twitter pour ne pas avoir contredit le général en retraite Thomas McInerney, un de ses invités, qui affirmait que M. McCain avait parlé sous la torture pendant sa détention au Vietnam. Cette accusation, déjà lancée en 2008, s’était révélée fausse. La chaîne a annoncé vendredi que le général en retraite Thomas McInerney ne serait désormais plus invité.