Lors du tirage au sort, jeudi soir 24 mai, en présence de Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron : Rafael Nadal, Jelena Ostapenko, et le président de la FFT, Bernard Giudicelli. / THOMAS SAMSON / AFP

A peine avait-il mis les pieds dans l’Orangerie, au milieu du jardin botanique des serres d’Auteuil où venait de se dérouler le tirage au sort, que Rafael Nadal n’a pas pu s’empêcher de jeter d’abord un œil furtif au tableau. Roland-Garros ne démarre officiellement que dimanche, mais jeudi soir 24 mai, le tenant du titre avait déjà la tête à son premier match, derrière un sourire de façade.

  • NADAL, TOUJOURS

En 2017, sa « decima » avait été unanimement saluée, contrairement à ses précédents succès porte d’Auteuil, souvent banalisés. Une « undecima » ferait peut-être à nouveau grimacer ses détracteurs… Exactement comme l’an dernier avant d’arriver à Paris, Rafael Nadal (tête de série no 1) a connu une seule défaite, à Madrid, et un seul bourreau depuis le début de la saison sur ocre : l’Autrichien Dominic Thiem. En finale à Rome, dimanche dernier, Alexander Zverev (no 2) a su s’engouffrer dans la brèche quand l’Espagnol a subitement déraillé, alors que l’orage grondait. Mais cela n’a pas suffi.

Le numéro un mondial ne peut de toute façon pas les croiser avant la finale. Au meilleur des cinq manches, les deux plus gros outsiders, promis à un affrontement en quart, se sont jusque-là fait punir : 6-1, 6-4, 6-4 pour l’Allemand début avril en Coupe Davis ; 6-3, 6-4, 6-0 pour l’Autrichien (no 6) sur le Central parisien l’an passé. Si Nadal (qui commencera la défense de son titre contre le fantasque Dolgopolov) ne connaît aucune défaillance physique, on imagine mal qui viendra le détrôner. Sauf si…

Sauf si Docteur Novak redevient Mister Djokovic (no 20). S’il a enfin soigné son tennis blues, le Serbe a montré à Rome qu’il lui arrivait encore de se disperser, mais il n’est désormais plus loin d’avoir recouvré son jeu de métronome, l’un des rares à faire plier Nadal. Derrière, Goffin, Nishikori et Coric sont en embuscade.

  • LES FRANÇAIS, TOUJOURS PAS

Tiercé perdant blessure-opération-forfait pour Jo-Wilfried Tsonga, touché au ménisque gauche depuis février. Gilles Simon ? Depuis son titre à Pune (Inde) début janvier, il a enchaîné 11 défaites au premier ou au deuxième tour, évanoui à la 75e place. Richard Gasquet ? Sur terre, il enchaîne le bon (demi-finale à Marrakech, quart à Monte-Carlo), et le mauvais (défaites d’entrée à Budapest et Rome). Surtout, il pourrait retrouver Nadal au troisième tour…

Lucas Pouille ? En quatre tournois, il reste sur une défaite au deuxième tour et trois défaites d’entrée. Même bilan pour Gaël Monfils. D’ordinaire bien inspiré à Roland-Garros (trois quarts de finale, une demi-finale), il espère déjà passer… le premier tour cette année, où il se mesurera à son jeune compatriote Elliot Benchetrit. « Honnêtement, si je gagnais un match, je serais très content », disait-il en début de semaine à Lyon après sa sortie outrageante.

Les bilans victoires-défaites de Benoît Paire (14-12) et Adrian Mannarino (10-12) cette saison n’incitent pas à davantage d’optimisme.

  • SERENA, POURQUOI ÇA ?

La seule présence de Serena Williams, de retour en Grand Chelem après avoir donné naissance à sa fille en septembre et absente de l’édition 2017, devait suffire à clore les débats côté favorites. Oui mais non. Car cette année, la triple vainqueure de Roland-Garros n’est pas tête de série… Son classement protégé lui permet seulement d’accéder aux tournois sans passer par les qualifications (comme son 453e rang devrait normalement l’y contraindre).

L’Américaine a hérité d’un premier tour plutôt clément, puisqu’elle affrontera la Tchèque Krystina Pliskova, 70e (sœur jumelle de Karolina Pliskova, classée, elle, au 6e rang). Mais elle pourrait retrouver la Russe Maria Sharapova, lauréate en 2012, en huitièmes de finale.

Comme chez les hommes, les années se suivent et se ressemblent dans le tableau féminin. Pas à cause d’une hégémonie inouïe. Si dimension historique il y a, c’est bien à cause du contraire. Chez les dames, les astres filent et aussitôt s’effilent. Le tableau est donc une fois de plus grand ouvert.

Aucune joueuse du haut du classement n’émerge clairement comme favorite. D’autant qu’être tête de série numéro une à Paris se révèle souvent un cadeau empoisonné. Sur les 21 derniers tournois parisiens, seules deux joueuses auréolées de ce statut ont soulevé la coupe Suzanne-Lenglen : Justine Henin en 2007 et Serena Williams en 2013 et 2015. Elina Svitolina (lauréate à Rome et Stuttgart), Petra Kvitova (titrée à Madrid et Prague), Simona Halep (finaliste à Rome) et Kiki Bertens (finaliste à Madrid) feraient bien de se méfier.

  • GARCIA, POURQUOI PAS

Côté Françaises, Caroline Garcia peut légitimement viser plus haut que son quart de finale de l’an dernier. Longtemps allergique à la terre battue, la tête de série no 7 l’a cette année apprivoisée au point d’enchaîner demi-finale à Stuttgart et Madrid, et quart de finale à Rome. Avec, pour corollaire, la tâche de porter sur ses épaules les espoirs d’un tennis français valétudinaire.

Sauf que Garcia n’a pas été gâtée par le tirage… Si son premier tour est largement à sa portée (Duan Yingying, 112e), elle pourrait croiser le fer avec sa bête noire, Kiki Bertens (15e), dès les huitièmes de finale (ou bien Angelique Kerber), avant de retrouver Simona Halep en quart.

Halep… que pourrait croiser dès le troisième tour Kristina Mladenovic (29e), qui débutera face à Petkovic. En détresse à Rome, la numéro deux française, qui traverse une saison délicate, a abandonné en larmes.

Alizé Cornet (32e), elle, a longtemps douté de sa présence à Paris : après ses trois no-show à des contrôles antidopage (pour lesquels elle risquait jusqu’à deux ans de suspension), elle a été blanchie in extremis le 15 mai. Pour la première fois de sa carrière, elle devrait arriver porte d’Auteuil l’esprit léger.

Les premiers tours des Français :

Andreas Seppi (ITA)-Richard Gasquet
Steve Johnson (USA)-Adrian Mannarino
Qualifié-Pierre-Hugues Herbert
Jérémy Chardy-Tomas Berdych (RTC)
Nicolas Mahut-Juan Martin Del Potro (ARG)
Ivo Karlovic (CRO)-Corentin Moutet
Elliot Benchetrit-Gaël Monfils
Benoît Paire-Roberto Carballes Baena (ESP)
Lucas Pouille-Daniil Medvedev (RUS)

Les premiers tours à suivre dans le tableau féminin :

Garbine Muguruza (ESP)-Svetlana Kuznetsova (RUS)
Kristyna Pliskova (RTC)-Serena Williams (USA)
Katerina Siniakova (RTC)-Victoria Azarenka (BLR)
Andrea Petkovic (ALL)-Kristina Mladenovic
Yingying Duan (CHN)-Caroline Garcia
Alizé Cornet-Sara Errani (ITA)
Chloé Paquet-Pauline Parmentier