A Lille, le 1er mars. / PHILIPPE HUGUEN / AFP

L’accumulation de mesures anti-tabac aurait-elle fini par payer ? Avec près d’un million de fumeurs quotidiens en moins entre 2016 et 2017, la consommation de tabac en France enregistre une baisse d’une ampleur inédite depuis une dizaine d’années. Selon le Baromètre santé publié lundi 28 mai par Santé publique France, cette diminution touche également pour la première fois depuis 2000 les fumeurs aux revenus les plus faibles.

Les résultats de l’enquête réalisée entre janvier et juillet 2017 auprès d’un échantillon représentatif de 25 319 personnes âgées de 18 à 75 ans sont spectaculaires. En 2017, un peu plus d’un quart des Français (26,9 %) fumaient quotidiennement, contre 29,4 % un an plus tôt, soit une baisse de 2,5 points. Cette diminution, qui correspond à un passage de 13,2 à 12,2 millions de fumeurs quotidiens en un an, est jugée « considérable » par François Bourdillon, le directeur général de Santé publique France dans un éditorial publié lundi.

C’est chez les hommes âgés de 18 à 24 ans que le phénomène est le plus net, avec une baisse de 8,9 points (de 44,2 % à 35,3 %), soit environ 240 000 fumeurs de moins. Il s’agit du « plus bas niveau atteint depuis 2000 pour cette tranche d’âge », relève Santé publique France. Cette baisse serait « en partie liée » à une moindre entrée des jeunes dans le tabagisme ou à un passage moins fréquent au tabagisme quotidien.

Forte variation d’une région à l’autre

Autre bonne nouvelle : cette diminution s’observe pour la première fois depuis 2000 chez les personnes ayant les niveaux de diplôme et de revenus les moins élevés (38,8 % de fumeurs quotidiens en 2016 contre 34 % en 2017) et parmi les demandeurs d’emploi (49,7 % de fumeurs quotidiens en 2016 contre 43,5 % en 2017), les populations qui fument le plus. Les ouvriers (36,4 %) fument par exemple deux fois plus que les cadres (15,9 %). Pour Santé publique France, « les inégalités sociales en matière de tabagisme se sont stabilisées en 2017 ».

L’étude relève par ailleurs que l’usage quotidien de tabac varie fortement d’une région à l’autre. Quatre régions présentent des pourcentages élevés de fumeurs quotidiens : le Grand Est (30,1 %), l’Occitanie (30,3 %), les Hauts-de-France (30,5 %) et Provence-Alpes-Côte d’Azur (32,1 %), contre 21,3 % en Ile-de-France et 23 % en Pays de la Loire.

A l’origine de ces bons chiffres, selon Santé publique France, une « intensification des mesures réglementaires et de prévention » menées dans le cadre du Programme national de réduction du tabagisme élaboré en 2014. On y trouve pêle-mêle l’entrée en vigueur du paquet neutre le 1er janvier 2017, ainsi que le quasi doublement de la taille des avertissements sanitaires sur les paquets, l’interdiction des arômes, la meilleure prise en charge du forfait de remboursement des substituts nicotiniques le 1er novembre 2016 à hauteur de 150 euros par an pour tous les fumeurs (contre 50 euros auparavant), le lancement du « Mois sans tabac »…

Résultats jugés « encourageants »

Signe d’une certaine dénormalisation du tabac, ces résultats confirment les chiffres de la consommation chez les jeunes de 17 ans, publiés en février par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), montrant une baisse de la consommation quotidienne de 7 points en trois ans chez les adolescents. Seul un quart d’entre-eux fumait quotidiennement en 2017, contre près d’un tiers en 2014.

Autre indicateur au vert : pour la première fois depuis 2000, le nombre de patients « traités » pour l’arrêt du tabac a dépassé les 2,5 millions de personnes en 2017, selon les chiffres de l’OFDT publiés en mars.

Même si le tabagisme reste à un niveau plus élevé en France que dans les autres pays d’Europe occidentale, ces résultats sont jugés « encourageants » et rendent plausible l’objectif fixé par le Programme national de réduction du tabagisme de parvenir au-dessous de 20 % de tabagisme quotidien en 2024.