Macron envoie des signaux positifs à Hulot
Macron envoie des signaux positifs à Hulot
Par Cédric Pietralunga (Côtes d'Armor et Finistère, envoyé spécial)
En déplacement en Bretagne, le chef de l’Etat a conforté son ministre sur le glyphosate et sur plusieurs dossiers miniers et énergétiques.
« Je bois du petit-lait bio ! » Souvent dépeint comme un ministre en sursis, Nicolas Hulot affichait une mine réjouie, mercredi 20 juin, sur les falaises du cap Fréhel (Côtes-d’Armor), où il était venu annoncer, au côté d’Emmanuel Macron, le maintien des six premiers projets de parcs éoliens offshore français, menacés d’annulation par le gouvernement en raison de leur coût trop élevé. « C’est un moment important pour moi », reconnaissait le ministre de la transition écologique et solidaire, souvent accusé de ne pas gagner d’arbitrages.
Un brouillard tenace avait beau recouvrir la côte bretonne, impossible d’assombrir l’humeur de l’ex-animateur de TF1. Sa mésentente avec le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, Stéphane Travert ? « Des tableaux caricaturaux », s’est-il défendu. La preuve, vendredi 22 juin, les deux hommes réuniront ensemble « tous les acteurs de la filière agricole pour bâtir des plans d’action pour sortir du glyphosate ». Ses relations avec le chef de l’Etat, qui parfois s’agace en privé des états d’âme de son ministre ? « On s’entend très, très bien », a rassuré M. Hulot, ajoutant : « L’un et l’autre, on est incapables de dissimuler. »
Le 16 mai, l’ex-candidat à la primaire écologiste de 2011 avait pourtant annoncé qu’il évaluerait « à l’été » sa présence au sein du gouvernement, laissant entendre qu’il pourrait partir s’il ne se sentait plus utile. Une attitude régulièrement adoptée par Nicolas Hulot depuis son arrivée à l’hôtel de Roquelaure et qui a le don d’agacer une partie de la majorité, voire de l’exécutif. « Il se permet des choses qu’aucun autre ministre n’oserait, de peur de prendre la porte », grince un conseiller ministériel.
Mais depuis sa dernière sortie, l’« insatisfait » Hulot dit avoir fait avancer plusieurs dossiers, sur le glyphosate, sur l’interdiction des permis d’exploration des hydrocarbures, sur la fermeture des centrales à charbon ou nucléaires. Signe de sa nouvelle idylle avec le ministre le plus populaire du gouvernement, Emmanuel Macron a ainsi profité de son séjour breton pour annoncer la fin du projet d’extraction de sable coquillier en baie de Lannion. « Les conditions d’exploitation ne sont aujourd’hui pas satisfaisantes », a plaidé le chef de l’Etat.
Autre concession environnementale, le président a déclaré mettre un terme aux projets d’exploration minière en Centre-Bretagne, qui devaient permettre à terme d’extraire du zinc, du cuivre, du plomb ou des métaux précieux comme de l’or ou de l’argent, mais qui étaient contestés par des associations et des élus locaux. Un signal fort : c’est Emmanuel Macron lui-même qui avait accordé ces permis à la société Variscan, en 2014 et 2015, alors qu’il était ministre de l’économie.
« Ça ne va jamais assez vite »
Lors d’un discours à Quimper, jeudi 21 juin, le chef de l’Etat a surtout tenté de mettre un terme au débat qui agite encore une partie des professionnels de l’agriculture sur le glyphosate, en établissant un parallèle entre le pesticide de Monsanto et le chlordécone, un autre produit phytosanitaire utilisé dans les Antilles françaises durant des années, alors que sa toxicité était avérée. « Vous pensez qu’on peut être fier de ce qu’on a fait ?, a interrogé M. Macron. Vous voulez qu’on réplique ça avec le glyphosate ? » Manière de dire qu’il ne laisserait pas l’Etat prendre la responsabilité de différer l’interdiction du produit, alors que certains mettent en doute sa volonté d’y parvenir d’ici trois ans, comme il s’y est engagé.
Seul bémol de ce séjour breton pour Nicolas Hulot : M. Macron a réitéré sa volonté de réaménager la loi littoral, « une bonne loi » mais qui « a des aberrations », selon lui. « Nous avons construit une vision excessive » de cette loi, que l’« on n’arrive plus à expliquer avec bon sens », a-t-il plaidé à Quimper, citant en exemple la difficulté de certaines communes côtières à réhabiliter un centre nautique ou des équipements sanitaires. Malgré les divisions de la majorité sur ce sujet, le chef de l’Etat a assuré que le dispositif sur les « dents creuses », ces parcelles de terrain déclarées inconstructibles le long du littoral, serait « corrigé ».
Mais pas de quoi refroidir Nicolas Hulot, qui donne parfois le sentiment d’avoir du mal à se convertir au pragmatique « en même temps » du chef de l’Etat. « Ça ne va jamais assez vite, compte tenu de l’urgence climatique, de l’urgence sur les sujets santé et environnement. Mais on n’est pas dans un conte de fées, il faut tenir compte d’un certain nombre de réalités », a ainsi déclaré le ministre de la transition écologique lors de son périple breton. Presque un brevet de macronisme.