Réforme du code du travail : première évaluation mitigée pour les ordonnances
Réforme du code du travail : première évaluation mitigée pour les ordonnances
Par Bertrand Bissuel
Un sondage, réalisé auprès de 605 dirigeants de sociétés (de 11 à 300 personnes) et de 703 représentants des salariés, montre que « le contenu des ordonnances est dans l’ensemble connu mais reste encore flou ».
Ceux qui s’étaient opposés en 2017 aux ordonnances réécrivant le code du travail y voient la validation de leurs critiques. Mardi 26 juin, une première évaluation de cette réforme majeure du quinquennat d’Emmanuel Macron a été rendue publique. Il ne s’agit pas d’une recherche de grande ampleur mais de plusieurs coups de sonde, effectués à travers deux enquêtes d’opinion et plusieurs auditions d’acteurs de terrain. Une analyse qualitative conduite par un comité dans lequel siègent l’économiste Sandrine Cazes, l’ex-responsable du patronat de la métallurgie, Jean-François Pilliard, et l’ancien numéro deux de la CFDT, Marcel Grignard.
Bien qu’impressionnistes, les résultats de leurs travaux fournissent des enseignements intéressants sur la manière dont les patrons de petites et moyennes entreprises (PME) et les élus du personnel s’approprient les mesures. Un sondage, réalisé auprès de 605 dirigeants de sociétés (de 11 à 300 personnes) et de 703 représentants des salariés, montre que « le contenu des ordonnances est dans l’ensemble connu mais reste encore flou » – avec des écarts importants suivant la taille de l’entreprise. Ainsi, la moitié des employeurs de 50 à 300 personnes disent, au sujet de la réforme, qu’ils « voi[ent] bien de quoi il s’agit » mais le pourcentage est nettement plus faible dans les établissements de 11 à 19 salariés (28 %).
« Statu quo »
Les dispositions qui ont le plus retenu l’attention des patrons concernent trois champs. Primo : tout ce qui a trait à la rupture du contrat de travail – le plafonnement des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif étant la mesure la mieux identifiée. Ont également été bien repérées les ruptures conventionnelles collectives (une nouvelle procédure permettant de faire partir des salariés sur la base du volontariat), ainsi que la simplification des formalités dans le cadre d’un licenciement.
Deuxième thématique que les employeurs ont intégrée : la possibilité de conclure un accord sans passer par un délégué syndical. Enfin, la création du comité social et économique (CSE) – issue de la fusion des diverses instances de représentation du personnel (IRP) – fait également partie des nouveautés que les entreprises ont plutôt bien appréhendées.
Cependant, la mise en place du CSE, qui est censée régénérer les relations entre les salariés et leur hiérarchie, reste encore « balbutiante ». Tout comme l’installation de représentants de proximité et de commissions chargées des questions de santé et de sécurité au travail. « Le grand chambardement qui était annoncé en matière de dialogue social ne se produit pas, à ce stade », observe Philippe Portier, secrétaire national de la CFDT. A ses yeux, c’est « plutôt le statu quo » qui prévaut, avec une « diminution des moyens » puisque le nombre de représentants du personnel baisse, du fait du rapprochement des IRP.
Les premiers constats du comité d’évaluation « légitiment ce que nous disions, l’an passé, à propos des ordonnances », dénonce Fabrice Angei, du bureau confédéral de la CGT : « Elles sont surtout vues comme un moyen de faciliter les licenciements, sans qu’il y ait de volonté de la part des employeurs de favoriser le dialogue social. »