Podcast sur Arte Radio à la demande

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Hier encore, elles avaient 20 ans. C’était le temps où elles se couvraient le corps de robes griffées et de ­bijoux ; où les soirées déjantées se terminaient en plein après-midi… Soraya et Mélissa flirtaient alors avec de vrais voyous, qui roulaient dans de belles voitures, sans penser au lendemain. Bref, c’était une autre époque, plus légère et sans contraintes.

Autour d’un thé, les deux vieilles copines se remémorent leur jeunesse avec une immense nostalgie, ainsi que leur passé de « marginales », comme elles se définissent. Et à les écouter, ce furent les meilleures années de leur vie, durant lesquelles « on s’est bien ­fatiguées » à sniffer, fumer ou s’injecter dans les veines de la coke, regrette l’une des deux femmes.

Soraya, 56 ans, est une ancienne cambrioleuse qui « aimait bien voler, ni vu ni connu », comme elle le relate de sa voix totalement éraillée. Entrer en douce chez des inconnus pour dérober de l’argent et des bijoux lui procurait une montée d’« adrénaline », des « palpitations au cœur » et « de la force pour réussir [s]es coups ». Elle ajoute : « Ça marchait tellement bien. J’étais heureuse. »

Récits sans filtre

Mais Soraya assure avoir eu, tout de même, de « l’empathie » pour ces gens qu’elle braquait. C’est son mari, « un truand », dit-elle,qui lui a tout appris, précisant : « Avec les douze ans de vie commune, moi je ne faisais absolument rien. Je voyais tout ce qu’il faisait, et puis voilà, j’ai réussi à devenir plus forte que lui. Il était au chômage, et moi j’amplifiais mes conneries. »

Mélissa, 46 ans, est une ex-prostituée qui a mis tout ce qu’elle gagnait dans des galettes de crack. Ce métier lui permettait d’être indépendante, de ne pas être à la merci d’un mac. Séropositive, elle touche aujourd’hui l’allocation aux adultes handicapés, soit quelque 800 euros par mois. « Une retraite bien méritée », dit-elle en riant.

Le passage le plus touchant de ce reportage sonore se révèle être le moment où Soraya parle de son fils, qui ne lui en veut pas et qui, dès l’enfance, se débarrassait des objets volés lorsqu’il savait que la police allait perquisitionner leur maison. Dans La Galette des reines, ces deux femmes se racontent sans filtre, nous plongeant avec humour et sensibilité dans leur univers : celui des larcins à l’ancienne, de la nuit et de la drogue.

La Galette des reines, de Géraldine Gacon (France, 2018, 34 min).