Cela fait deux ans qu’ils attendent des réponses. La famille et les soutiens d’Adama Traoré, ce jeune homme mort après une interpellation musclée le 19 juillet 2017 sur le sol de la gendarmerie de Persan (Val-d’Oise) dans des circonstances encore non élucidées, organisent une marche, samedi 21 juillet, pour réclamer « la vérité et la justice ». « Cela fait deux ans que la famille patiente. Il y a des limites. La justice doit être égale pour tous » résume l’un des membres du comité Adama, à l’origine de la manifestation, Youcef Brakni.

Depuis la plainte déposée par la famille en 2016 pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner » et « non-assistance à personne en danger », l’enquête piétine. La famille, qui dénonce une bavure policière, s’impatiente. Dans une lettre ouverte intitulée « La mort de mon frère mérite des réponses » et publiée dans L’Obs, la sœur d’Adama Traoré, Assa Traoré, s’adresse directement à Emmanuel Macron et Nicole Belloubet, la ministre de la justice : « Pourquoi cette mort en France, en 2016, dans une gendarmerie ? Comment cela se peut-il ? », interroge-t-elle.

« Plusieurs milliers » de personnes attendues

L’année dernière, le rassemblement avait réuni environ 2 000 personnes, cette fois, M. Brakni en attend « plusieurs milliers ». L’organisateur a des raisons d’espérer : toutes les formations de gauche – PS mis à part – ont appelé à rejoindre le rassemblement, ce qui n’était pas le cas le 22 juillet 2017, pour le premier anniversaire de la mort d’Adama Traoré, 24 ans aux moments des faits.

Cette année, le groupe La France insoumise de l’Assemblée nationale a appelé collectivement à s’y rendre, quand ils n’étaient que quelques-uns l’année dernière. Jean-Luc Mélenchon n’y sera pas personnellement mais les députés Alexis Corbière, Danièle Obono, Eric Coquerel et Mathilde Panot seront présents. « J’ai mobilisé dans ma circonscription, les réunions étaient pleines !, raconte M. Coquerel, député de Seine-Saint-Denis. On ne peut pas toujours parler des quartiers populaires sans aller les soutenir sur les sujets qui les concernent. »

Génération.s, Europe Ecologie-Les Verts, le Parti communiste et le Nouveau Parti anticapitaliste appellent à s’y rendre. Les chefs de file des deux premiers mouvements, Benoît Hamon et David Cormand, seront présents. Le Parti socialiste qui n’était au départ « pas au courant » de cette marche, selon son premier secrétaire, Olivier Faure, envoie finalement un représentant, Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis et « des militants mobilisés », selon l’entourage d’Olivier Faure.

« On ne veut pas du soutien » du PS

Ces appels à venir manifester sont « une bonne nouvelle » pour M. Brakni, qui dit avoir « bataillé pendant un an pour se faire entendre du mouvement social et de la gauche », notamment en participant aux manifestations de cheminots ou d’étudiants cette année, jusqu’à prendre – « apothéose » – la tête du cortège du 26 mai, la dernière manifestation en date. « Avant, ils ne voyaient pas. C’était timide et hésitant. On a dû s’imposer et on a été entendus », se satisfait le responsable du collectif Adama.

Seul le Parti socialiste n’appelle pas à se rendre à cette marche. « Nous apportons notre soutien à la famille et demandons que le rapport relatif aux conditions de décès soit remis le plus rapidement possible », indique Rachid Temal, sénateur du Val-d’Oise et membre de la direction de la rue de Solférino. « Le PS n’est pas de gauche, ils sont de centre droit. Adama est mort sous un gouvernement de gauche où Bernard Cazeneuve soutenait les forces de l’ordre. On ne veut pas de leur soutien », rejette M. Brakni.

Le cortège débutera à 14 heures de la gare de Persan-Beaumont, pour s’achever à Boyenval, le quartier où habitait Adama Traoré. La marche sera suivie de la projection d’un documentaire inédit, Pour Adama, chapitre 1, et d’un concert gratuit.