Affaire Benalla : les cinq éléments-clés de l’audition de Collomb à l’Assemblée
Affaire Benalla : les cinq éléments-clés de l’audition de Collomb à l’Assemblée
Le ministre de l’intérieur s’est défendu, lundi matin, de toute faute personnelle, renvoyant la responsabilité d’éventuels manquements au préfet de police et au cabinet d’Emmanuel Macron.
Affaire Benalla : l’audition de Gérard Collomb résumée en 5 séquences-clefs
Durée : 04:03
Dans le cadre de l’« affaire Benalla », ce proche collaborateur du président de la République, auteur de violences filmées visant deux manifestants, en marge du défilé du 1er-Mai, place de la Contrescarpe, dans le 5e arrondissement de Paris, le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, a été auditionné, lundi 23 juillet dans la matinée, par la commission des lois de l’Assemblée nationale, constituée pour l’occasion en commission d’enquête.
Alexandre Benalla a été mis en examen ce week-end, de même que quatre autres personnes, dont trois fonctionnaires de la préfecture de police de Paris suspendus jeudi et suspectés d’avoir transmis à M. Benalla une vidéo captée par des caméras de vidéosurveillance le jour des faits.
Retour sur les éléments forts de l’audition de M. Collomb qui a duré deux heures et demie.
Quand et comment le ministre de l’intérieur est-il mis au courant des faits ?
M. Collomb assure avoir été mis au courant des faits par le truchement de son directeur de cabinet et de son chef de cabinet, le 2 mai, en début d’après-midi, au lendemain de la manifestation du 1er-Mai.
« Ils m’informent de l’existence d’une vidéo montrant des faits de violence sur la place de la Contrescarpe, de l’implication de M. Benalla dans ces faits et de la qualité de celui-ci. Ils m’indiquent s’être entretenus avec le préfet de police et avoir porté cette information à la connaissance du cabinet du président de la République, ce qui est une démarche tout à fait appropriée, puisque c’est à l’autorité hiérarchique de prendre toutes les mesures qui s’imposent sur le plan administratif comme sur le plan judiciaire. »
La veille, Gérard Collomb et Alexandre Benalla étaient tous deux dans la salle de commandement. Interrogé sur l’accolade qu’il aurait donnée à M. Benalla, Gérard Collomb affirme qu’il l’a « sans doute salué ». « J’ai coutume d’être urbain », affirme-t-il.
Pourquoi n’a-t-il engagé aucune action après avoir eu connaissance des faits ?
M. Collomb explique ne plus s’être occupé des exactions commises par M. Benalla après en avoir été informé, ce dernier ne faisant pas partie des « effectifs placés sous son autorité ».
M. Collomb a également tenu à justifier le lancement très tardif de l’enquête de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) en mettant en cause la préfecture de police et l’Elysée. « Je vous rappelle que, comme je vous l’ai indiqué, je m’étais assuré le 2 mai que tant le cabinet du président de la République que la préfecture de police avaient été destinataires de l’information de la vidéo mettant en cause M. Benalla. Il leur appartenait donc d’agir. C’est la règle pour tous les manquements », a rappelé M. Collomb.
Il a précisé avoir demandé à son directeur de cabinet de saisir l’IGPN le 19 juillet, au lendemain de l’article du Monde révélant l’affaire. Toutefois, M. Collomb a reconnu que l’IGPN avait eu connaissance de la vidéo dès le 3 mai à travers sa plate-forme de signalement, mais qu’elle n’a pas donné de suite.
« Le chef adjoint de l’IGPN a informé mon cabinet qu’un internaute avait signalé anonymement la vidéo à la plate-forme de l’IGPN. L’opérateur de l’IGPN n’avait pas estimé les conditions réunies pour l’ouverture d’une enquête », a affirmé M. Collomb.
Pourquoi n’a-t-il pas alerté l’autorité judiciaire ?
M. Collomb a été accusé, entre autres par le député PCF Stéphane Peu, d’avoir failli à ses responsabilités en n’alertant pas immédiatement l’autorité judiciaire, après avoir eu connaissance des faits de violence.
Selon l’article 40 du code de procédure pénale, cité par le député, « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ».
M. Collomb a répondu en affirmant qu’il n’appartient pas au ministère de l’intérieur de transmettre un dossier au procureur, sur le fondement de l’article 40, à chaque fois qu’il a connaissance d’une infraction pénale. « Ce n’est pas mon rôle de saisir individuellement chaque procureur », a déclaré M. Collomb.
Que savait-il du rôle de M. Benalla ?
« Quelles étaient, à votre connaissance, les fonctions de M. Benalla en ce 1er-Mai ? », a interrogé le député Les Républicains (LR) Guillaume Larrivé, corapporteur de la commission d’enquête. « Je n’en savais strictement rien, monsieur le député », a répondu le ministre de l’intérieur.
M. Collomb a par ailleurs affirmé ne pas savoir « qui avait invité » Alexandre Benalla et Vincent Crase – un gendarme réserviste, par ailleurs employé de la République en marche, également mis en examen dans cette affaire – à venir théoriquement en observateurs sur la manifestation du 1er-Mai.
« Je n’en sais rien. Le préfet de police devait être au courant, en tout cas je le pense, il faudra lui poser la question. Le chef d’état-major était au courant qu’ils devaient participer », a expliqué M. Collomb. Qui a ajouté que si M. Benalla avait été « accueilli le matin du 1er mai » et qu’il lui avait « été remis un casque, selon l’IGPN », « ni le brassard ni le poste de radio ne lui ont été remis à cette occasion ». M. Collomb a affirmé ne pas avoir été directement en présence de M. Benalla le 1er mai au soir, dans la salle de commandement de la préfecture de police de Paris.
Interrogé sur le fait que M. Benalla dispose d’un port d’arme, M. Collomb a précisé que « M. Benalla a sollicité à plusieurs reprises les services du ministère de l’Intérieur pour obtenir une autorisation de port d’arme, la première fois en 2013, en janvier 2017 – donc avec mes prédécesseurs – et enfin en juin 2017 auprès de mon cabinet. » Le ministre a assuré que toutes ces demandes avaient été refusées, car « M. Benalla ne remplissait pas les conditions requises, l’exposition à des risques exceptionnels d’atteinte à sa vie, pour se voir délivrer une telle autorisation ministérielle ».
M. Collomb a expliqué qu’Alexandre Benalla s’était vu délivrer une autorisation de port d’arme sans que son cabinet en soit avisé, par un arrêté du préfet de police du 13 octobre 2017. « Je l’ai découvert mercredi dernier [18 juillet] », a assuré Gérard Collomb.
S’est-il entretenu de l’« affaire Benalla » avec M. Macron ?
M. Collomb a affirmé ne jamais avoir évoqué cette affaire avec le président de la République au cours des dernières semaines. « Nous avons des ordres du jour très précis », a-t-il souligné.
Un peu plus tard au cours de l’audition, il a précisé n’avoir jamais évoqué « le problème de M. Benalla » avec le président de la République avant le 14 juillet. Le ministre de l’intérieur a également affirmé avoir parlé de l’affaire Benalla « le moins possible » avec le président de la République dimanche 22 juillet, lors d’une réunion sur convocation à l’Elysée.
Il a assuré que M. Macron s’était surtout montré « préoccupé par la réforme constitutionnelle », déclenchant l’hilarité de la salle.