C’était pas censé être interdit, les fumigènes sur le bord de la route ? / Christophe Ena / AP

18E ÉTAPE : TRIE-SUR-BAÏSE - PAU, 171 KM

Habile Tour de France : au cas où l’on aurait commencé à s’amuser le mercredi, il nous met dans les pattes 171 kilomètres de plat le jeudi entre Trie-sur-Baïse et Pau.

Tiens, Pau ! Ca faisait longtemps. Au moins depuis l’an dernier.

Les plus anciens des suiveurs connaissent mieux Pau que François Bayrou et Didier Gadou réunis. Pau est devenue pour nous la ville du Tour de France avant d’être la capitale du Béarn et l’on se demande si, dans la catastrophique éventualité où le Tour disparaîtrait un jour, il ne faudrait pas raser la ville ou au moins la rebaptiser, pour lui offrir un nouveau départ.

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Cela dit, l’étape du jour n’aurait pas dû exister. Lorsque ce Tour a été dessiné, il devait initialement s’élancer une semaine plus tôt. L’Union cycliste internationale l’a finalement décalé d’une semaine pour subir moins de concurrence de la Coupe du monde, et cela n’a pas été sans conséquences pour le parcours. Alors que les organisateurs prévoyaient trois étapes consécutives dans les Pyrénées, un contre-la-montre autour de Pau - évidemment - et une étape en ligne au Pays basque le samedi. Mais non : le 28 juillet, l’étape en ligne au Pays basque n’était plus possible en raison de la concurrence avec les fêtes de Bayonne. Il a donc fallu réorganiser la troisième semaine et glisser une étape de plaine entre les trois étapes de montagne.

Voilà comment Trie-sur-Baïse a bouché un trou mais ne s’en plaint pas : pour recevoir le Tour, le département a refait les routes, et c’est sur un enrobé d’aérodrome que les coureurs s’élanceront. Au moins sur les trois premiers kilomètres, puisqu’on arrive ensuite dans le Gers, qui n’avait aucune raison de refaire la route qui est déjà très bien comme ça.

Trie-Pau, donc, où chacun aura le droit de tenter sa chance, surtout la (Groupama-)FDJ. L’un des sprinteurs encore debouts roule sous ses couleurs. Parfois même un peu vite dans les cols, où Arnaud Démare est soupçonné de s’accrocher de temps à autres à la voiture de son directeur sportif pour rentrer dans les délais, ces deux derniers jours.

La vraie beauté du Tour de France, c’est ça. / MARCO BERTORELLO / AFP

Démare traîne cette réputation de coureur à la portière depuis plusieurs années, notamment lors de sa victoire sur Milan-San Remo 2016, où des coureurs italiens l’avaient soupçonné d’avoir été remorqué dans la côte de la Cipressa. André Greipel, rentré à la maison dans l’étape de l’Alpez d’Huez lorsqu’il avait compris qu’il finirait hors-délais, a mis ses grosses cuisses dans le plat, mercredi soir sur Twitter : « Peut-être que quelqu’un devrait dire à Arnaud Démare et Groupama-FDJ qu’il y a des traceurs GPS sur le Tour de France. Chapeau pour avoir perdu seulement 9 minutes en 17 km sur Nairo Quintana ». Puis #notthefirsttime, ce qui veut dire #paslapremièrefois.

Démare a répondu, Greipel a effacé son tweet : Rohff et Booba sont encore un petit cran au-dessus en terme de clash, mais c’est un bel effort de la part de l’Allemand, soutenu en cela par deux autres sprinteurs, ce qui augure assez mal de la popularité de l’ancien champion de France dans sa confrérie.

« Je vous avais pas reconnu M. Froome. Mais pourquoi vous avez pas mis votre maillot jaune, aussi ? »

Trie-Pau toujours : on ne conseille pas au résident monégasque le plus célèbre du peloton, Christopher Froome, de tenter sa chance ces jours-ci, au rythme où les emmerdes s’accumulent sur son porte-bagage. Après les chutes, le coup des gaz lacrymogènes et la perte du Tour de France au profit de son ami Geraint Thomas, il a été hier pris à partie par un policier dans la descente du col du Portet vers son hôtel. Il l’avait pris pour un spectateur descendant à vélo. A la décharge du sifflet, Froome, en anorak gris, n’avait pas la dégaine d’un quadruple vainqueur de l’épreuve.

Froome a dit « Fuck you », ce qui permet de constater que même lorsqu’il laisse échapper une insulte, il a l’air d’un petit moineau inoffensif.

Jusqu’à preuve du contraire, la gendarmerie française est donc la grande animatrice de ces Pyrénées. Que trouvera-t-elle aujourd’hui ? Enlever la voiture de Dave Brailsford garée en double file ? Mettre une contravention à Geraint Thomas pour excès de vitesse dans une descente ? Désosser le bus de la Sky pour y trouver des produits ? Imposer un Ricard à toute la Sky avant le départ, étant donné qu’il aura lieu à 14 heures, bien après l’heure du Ricard ? Que de pistes possibles. L’an prochain, c’est elle qui trace le Tour et décide des règles. On va se marrer.

Départ à 13 h 55 ; Arrivée prévue vers 17 h 45.

Le Tour du marché : Bagnères-de-Luchon

Chaque matin du Tour, En danseuse vous envoie une carte postale du comptoir d’un établissement de la ville-départ de la veille.

Où l’on a mangé un gâteau.

On cherche un café, on tombe sur un gâteau. Fascinant gâteau que ce long cylindre de pâte à pics, on dirait des pignons de vélo collés les uns aux autres.

Mickäel Van Mo Alves aurait pu être belge, avoir l’accent belge, et être éliminé en demi-finale, puisque son père est belge. Il aurait pu être portugais, parler portugais, et être éliminé en huitième de finale, puisque sa mère est portugaise. Mais il est français, il parle français avec l’accent du sud-ouest, et il est champion du monde, puisque ses parents se sont rencontrés et l’ont fabriqué à Bagnères-de-Luchon.

Lui fabrique désormais ce merveilleux gâteau, qui s’appelle « gâteau à la broche », en raison de la présence d’une broche pour aider à sa confection, dont nous vous délivrons ici les secrets.

Pas de lait. Un quart de beurre, un quart de farine, un quart de sucre, un quart d’œuf, tel un quatre quarts. Mickaël ajoute rhum, vanille et poudre d’amende fraîche, sa touche personnelle. Certains mettent de la fleur d’oranger. L’ancienne école se contente de rhum et de Ricard. Dans l’Aveyron – qui dispute aux Pyrénées la paternité du gâteau, lequel aurait été importé en France par les soldats de Napoléon lors de la retraite de Russie –, on ne parfume pas du tout la pâte.

Prenez un cône en bois (en général du pommier, solide, pour ne pas que ça se fende sous l’effet de la chaleur). Recouvrez d’un papier de cuisson. Mettez le cône sur votre broche. Placez votre broche devant votre brasier. Aspergez le cône de couches de pâtes successives, et faites tourner la broche. Pour un petit gâteau, comptez trois quarts d’heure de cuisson. Pour les plus gros, trois ou quatre heures. Une crème anglaise ou un coulis de fruit rouge feront l’affaire.

Le gâteau à la broche des Pyrénées, à Bagnères-de-Luchon
Durée : 00:54

C’est hypnotisant. Plutôt que les roues des cyclistes, on pourrait regarder cette broche tourner pendant des heures.

Et bon appétit bien sûr.

The French Cake Cooked on a Spit
Durée : 02:45