La démission du ministre de l’électricité faisait partie des slogans des protestataires lors des récentes manifestations, ici à Bagdad le 27 juillet. / THAIER AL-SUDANI / REUTERS

Faut-il y voir une tentative d’apaisement du gouvernement irakien envers les manifestants ? Le premier ministre, Haïder Al-Abadi, a limogé dimanche 29 juillet le ministre de l’électricité, Qassem Al-Fahdaoui, à la suite des manifestations qui agitent depuis trois semaines le sud de l’Irak, notamment pour dénoncer la pénurie chronique de courant.

Cette décision a été prise « en raison de la détérioration du secteur de l’électricité », précise le bureau du premier ministre. La démission de M. Fahdaoui faisait partie des slogans des protestataires lors des récentes manifestations dans le sud de l’Irak, mais aussi à Bagdad, où les foyers n’ont accès qu’à quelques heures d’électricité par jour.

M. Abadi a dans les faits « suspendu » M. Fahdaoui, selon le communiqué, car seul le Parlement est autorisé à démettre définitivement un ministre de ses fonctions. L’Irak ayant procédé au début de juillet à un nouveau comptage des résultats des législatives de mai, l’ouverture de la nouvelle session parlementaire est cependant retardée.

Selon le dernier bilan, datant du 23 juillet, quatorze personnes ont été tuées et 275 manifestants blessés depuis le 8 juillet, date du début de manifestations contre la corruption et l’absence de services publics. Le mouvement de protestation, parti de la ville côtière de Bassora avant de s’étendre au sud du pays, puis de gagner récemment Bagdad, a toutefois perdu en intensité, notamment du fait de dispersions violentes par les services de sécurité.

Coupures de courant quotidiennes

Les pénuries et coupures de courant sont chroniques dans ce pays riche en pétrole et où les températures estivales avoisinent 50 °C. Le portefeuille de l’électricité est ainsi un poste à haut risque dans les gouvernements. L’Irak a officiellement alloué depuis la chute du dictateur Saddam Hussein, en 2003, 40 milliards de dollars (34 milliards d’euros) pour remettre sur pied son réseau électrique, mais une partie de cette somme a été détournée.

Au moins deux anciens ministres de l’électricité sont accusés de corruption, notamment pour des contrats fantômes de plusieurs millions de dollars. En 2010, l’un des prédécesseurs de M. Fahdaoui, Karim Wahid, avait déjà dû démissionner après d’importantes manifestations.

Depuis l’invasion emmenée par les Etats-Unis en 2003, la consommation d’électricité en Irak est montée en flèche avec l’arrivée massive d’appareils électroménagers, d’ordinateurs, de paraboles et de téléphones portables. Mais les Irakiens doivent compter davantage sur les générateurs installés à chaque coin de rue par des entrepreneurs privés que sur les quelques heures quotidiennes d’électricité publique.

Récemment, les compagnies iraniennes qui fournissaient une importante part d’électricité au sud du pays ont cessé leurs livraisons en raison de très importants impayés. Les responsables irakiens tentent de justifier le manque d’investissements et la vétusté du réseau par la baisse des cours du pétrole, qui est la principale source de revenu pour le budget de l’Etat. Ils pointent également du doigt la population qui, dans sa grande majorité, ne paie pas les factures d’électricité aux compagnies publiques.