Coupe Davis : Rafael Nadal forfait, Yannick Noah peut encore dire merci à sa bonne étoile
Coupe Davis : Rafael Nadal forfait, Yannick Noah peut encore dire merci à sa bonne étoile
Par Alexandre Pedro
Trois fois vainqueur de l’épreuve, le capitaine de l’équipe de France a souvent pu compter sur la chance. L’absence du numéro 1 espagnol pour la demi-finale le prouve.
C’est sans doute une mauvaise nouvelle pour le tennis, moins pour l’équipe de France de Coupe Davis. Rafael Nadal a annoncé son forfait pour la demi-finale programmée du 14 au 16 septembre au stade Pierre-Mauroy de Villeneuve-d’Ascq. « Sa blessure au genou subie à l’US Open l’empêche d’être en mesure de jouer », a déclaré le capitaine de l’équipe espagnole, Sergi Bruguera qui a décidé de le remplacer par Albert Ramos, 52e joueur mondial.
Privé de son numéro 1 blessé au genou, l’Espagne ne devient pas pour autant un tigre de papier (Pablo Carreno-Busta et Roberto Bautista-Agut pointent quand même à la 12e et 22e place du classement ATP), mais la tâche paraît plus accessible pour des Français pas au mieux cette saison au niveau individuel.
Surtout si l’on jette un coup d’œil dans le rétroviseur sur la dernière demi-finale entre les deux pays en 2011. Malgré une finale de l’US Open disputée (et perdue) le lundi contre Novak Djokovic, Nadal avait pris le premier avion privé pour Cordoue et fait abstraction de la fatigue pour corriger Richard Gasquet et Jo-Wilfried Tsonga. Sur sa chaise, Guy Forget n’avait pu que constater les dégâts.
A croire que la réussite a choisi son capitaine. Yannick Noah paraît accompagné par ce que certains qualifient de chance, d’autres de réussite ou encore de baraka. « Oui, j’ai la chance. Mais ensuite, il faut la saisir », admettait l’intéressé au soir de la demi-finale remportée face à une Serbie privée de Novak Djokovic en septembre 2017.
Guerre de Yougoslavie et conséquences
Son trèfle à quatre feuilles, le tout jeune retraité des courts le trouve dès 1991 pour sa première campagne. S’il faut lui reconnaître des choix audacieux et payants (le tout jeune Fabrice Santoro lancé dans un cinquième match décisif contre l’Australie, le revenant Henri Leconte relancé face aux Etats-Unis en finale), l’histoire a un peu oublié le scénario de la demi-finale. La France affronte la Yougoslavie emmenée par le redoutable Goran Ivanisevic et Goran Prpić (alors membre du Top 20). Mais le pays est en plein démantèlement et les deux Croates déclinent la sélection. A Pau, Guy Forget et le jeune Arnaud Boetsch déroulent sans problème face aux Serbes Slobodan Zivojinovic (195e), Srdan Muskatirovic (442e).
Yannick Noah encourage Guy Forget lors de la finale face aux Etats-Unis, le1 décembre 1991 à Lyon / AFP
Cinq ans plus tard, capitaine Noah est de retour. Entre-temps, le chanteur a laissé sa place à Georges Goven, dont le nom reste associé à cette improbable défaite contre l’Inde sur la terre battue de Fréjus en 1993. Après un premier tour vite avalé face au Danemark, les Bleus retrouvent l’Allemagne en quart de finale. Un tirage corsé, sauf que Michael Stich n’est pas du déplacement à Limoges et que Boris Becker – à peine remis d’un virus – se contente de disputer (et perdre) le double.
En finale, une autre légende du tennis des années 80/90 attend la bande à Noah. Stefan Edberg fait ses adieux à Malmö. Même sur le déclin, le serveur volleyeur reste un client pour Cédric Pioline. Mais le Suédois ressent dès les premiers jeux une blessure à la cheville et baisse pavillon en trois sets. Le Saladier tend les bras aux Français, pourtant lors du 5e match décisif Arnaud Boetsch frôle la catastrophe face au modeste Nicklas Kulti (64e mondial). Le Français sauve trois balles de match avant de l’emporter à 23 h 30 et tomber dans les bras de capitaine Noah.
Festival de forfaits
Pendant presque deux décennies, le vainqueur de Roland-Garros 1983 prend ses distances avec le tennis avant de revenir aux affaires en 2016 au moment où sa carrière musicale bat de l’aile. « Le tennis, Yannick ne veut même pas en entendre parler. On parle de la gagne, de l’approche des matchs, de la tension, du poids du public », résume Lucas Pouille à propos de la méthode de son capitaine.
Si Noah paraît à 58 ans parfois décalé dans un monde du tennis devenu très (trop ?) sérieux pour lui, la réussite le suit toujours. Sa campagne 2017 vire ainsi au jeu de massacre pour ses adversaires. La France domine respectivement le Japon sans Kei Nishikori, la Grande-Bretagne sans Andy Murray et la Serbie privé Novak Djokovic. Le Britannique, Dan Evans, 44e mondial, est le joueur le mieux classé battu par un tricolore (Jérémy Chardy) dans ce parcours victorieux conclu face par Lucas Pouille face au numéro 2 belge, Steve Darcis… diminué par une blessure au bras.
Noah, lui, ne boude pas son plaisir. « Je n’ai jamais chialé autant, je n’ai jamais vu autant de larmes, de douleurs », souffle-t-il au moment de soulever pour la troisième fois le Saladier d’argent. Sa bonne étoile brillait encore. A voir si elle sera encore visible – malgré le toit du stade Pierre-Mauroy – ce week-end face à l’Espagne. D’ailleurs, aux dernières nouvelles Pablo Carreno-Busta est toujours en délicatesse avec sa cuisse gauche depuis son abandon au deuxième tour à l’US Open.