Sadio Mané, l’étoile de Liverpool que le Sénégal aimerait voir briller avec les Lions de la Teranga
Sadio Mané, l’étoile de Liverpool que le Sénégal aimerait voir briller avec les Lions de la Teranga
Par Alexis Billebault (contributeur Le Monde Afrique)
Extrêmement prometteur, le discret attaquant des Reds sera scruté comme aucun autre joueur lors du match Naples-Liverpool ce mercredi.
L’attaquant Sadio Mané (à gauche) lors d’un match entre son club de Liverpool et celui de Chelsea, à Londres, le 29 septembre 2018. / GLYN KIRK / AFP
Au Sénégal, Sadio Mané n’est pas observé comme n’importe quel joueur. L’exigence de ses compatriotes quand il revêt le maillot de la sélection nationale est proportionnelle à son statut. A 26 ans, l’attaquant des Reds de Liverpool est considéré comme l’un des meilleurs joueurs du monde à son poste. Mercredi 3 octobre, le Sénégalais sera l’un des joueurs les plus scrutés lors du match qui opposera Naples à Liverpool sur la pelouse du stade San Paolo di Napoli. Riche, célèbre et discret, le Casamançais brille plus avec son club qu’avec les Lions de la Teranga.
La saison qu’il a réalisée avec le club anglais en 2017-2018 est à ce jour la plus aboutie de sa carrière. Auteur de dix buts et de sept passes décisives en Premier League, Sadio Mané avait éclaboussé de son talent la scène continentale en marquant dix fois en Ligue des champions, lors d’une épopée qui s’était fracassée en finale face à l’impitoyable Real Madrid (1-3), un soir de mai 2018.
« Toujours en formation »
Depuis le moins d’août, Sadio Mané surfe sur des bases élevées (quatre buts en championnat), à l’aube d’affronter le Napoli de son compatriote Khalidou Koulibaly, l’autre star sénégalaise. Le joueur brille avec Liverpool, presque à chaque fois qu’il enfile le légendaire maillot rouge. Mais la question de ses performances en sélection est l’un des sujets de conversation préférés de ses compatriotes. L’ancien international Alassane Ndour en attend plus : « Il n’est ni étincelant, ni décevant. Il commet peu d’erreurs techniques ou tactiques, mais il ne prend pas assez de risques dans son jeu. »
L’ancien joueur de Saint-Etienne admet que la pression autour de Sadio Mané peut partiellement l’inhiber. « Il y a une telle attente autour de lui qu’il a peut-être peur de mal faire. Et le brassard de capitaine est-il trop lourd à porter actuellement ? », s’interroge Alassane Ndour. Le 9 septembre, après le match nul du Sénégal à Madagascar (2-2) en qualifications pour la CAN 2019, les critiques s’étaient de nouveau abattues sur l’attaquant, jugé trop discret sur la pelouse du stade Mahamasina d’Antananarivo.
Mady Touré, fondateur de Génération Foot, le centre de formation partenaire du FC Metz dont est sorti Sadio Mané, estime que son ex-protégé doit être davantage responsabilisé. « Il doit être le patron de la sélection nationale, le dépositaire du jeu. Aliou Cissé, le sélectionneur, doit le lui dire. S’il fait de grands matchs en club, c’est parce que Jürgen Klopp sait comment l’utiliser. Sadio a besoin qu’on lui parle, qu’on le galvanise. »
L’attaquant Sadio Mané (au centre), lors d’un entraînement au stade San Paolo de Naples, le 2 octobre 2018. / CARLO HERMANN / AFP
Le Casamançais est un joueur « toujours en formation », poursuit Mady Touré. Sadio Mané fonctionne par cycle de deux ans, toujours soucieux de ne pas griller les étapes. « Il a toujours dit qu’il finirait par jouer au Real Madrid ou à Barcelone. Je pense que cela arrivera. Après Metz puis Salzbourg [2012-2014], il a rejoint le FC Southampton [2014-2016], puis Liverpool. Il ne veut pas aller trop vite. »
360 000 euros par mois
A Liverpool, Sadio Mané est plutôt du genre casanier. « Il mène une vie tranquille. Il s’entraîne, joue, se repose. Même s’il gagne beaucoup d’argent, il a la tête sur les épaules. Cette discrétion est le fruit de son éducation », ajoute Mady Touré. Le joueur, qui a vu le jour à Bambaly, une petite commune de Casamance, est d’origine modeste et a perdu son père très jeune. « Sadio savait qu’il n’y avait que le foot pour lui permettre d’aider les siens », poursuit le formateur. A 13 ans, après avoir passé plusieurs tests, l’adolescent rejoint Dakar et Génération Foot. « C’est un garçon timide, mais qui a toujours cru en lui. Il ne doute pas. C’est sa force. Il me disait souvent : “Ne vous inquiétez pas, président, je vais réussir” »
A Metz, en Ligue 2 et en National, le jeune homme laisse deviner un potentiel qui n’échappe pas aux Anglais d’Arsenal et aux Autrichiens du Red Bull Salzbourg, où Gérard Houllier, l’ancien sélectionneur de l’équipe de France et alors directeur mondial de la branche football du groupe américain, lui propose un plan de carrière. Pragmatique, Sadio Mané préfère poursuivre sa formation en privilégiant le temps de jeu dans le modeste championnat autrichien plutôt qu’un exil précoce en Premier League anglaise où de nombreux jeunes, partis trop tôt, ont été broyés.
Liverpool, qui a déboursé 36 millions d’euros pour l’attirer à Anfield Road, va devoir lutter avec plus fortunés que lui pour conserver son phénomène. Cela passera probablement par une revalorisation des émoluments du Sénégalais, qui atteignent 360 000 euros par mois. Contrairement à d’autres footballeurs très bien rémunérés, Sadio Mané ne dilapide pas son argent. « Il ne possède pas cinq ou six voitures », précise Mady Touré, qui lui a plusieurs fois rendu visite en Angleterre.
Sa famille est à l’abri, et le joueur, soucieux de son avenir, a investi dans des biens immobiliers au Sénégal. « Il ne finira pas dans le besoin. Ce n’est pas l’argent et la gloire qui vont lui monter à la tête. Il est bien entouré », insiste Mady Touré. Le joueur reste discret sur ses actions humanitaires. Il a récemment offert près de 240 000 euros pour la construction d’un lycée moderne à Bambaly. Et, au printemps, 300 maillots de Liverpool ont été envoyés dans son village natal. Preuve de son indéfectible attachement au Sénégal.