Marvin Chatillon a rejoint en septembre l’Ecole supérieure de fonderie et de forge, à Sèvres (Haut-de-seine), comme élève ingénieur. / Marvin Châtillon

« Je pensais devenir technicien », lâche le jeune homme de 20 ans. C’était logique, dans le sens des choses. Né à Brou-sur-Chantereine (Seine-et-Marne), dans la deuxième couronne de la région capitale, un père chaudronnier et une mère assistante maternelle, Marvin Chatillon n’a pas hérité de la carte qui peut vous guider vers des études longues.

Lorsqu’il a 9 ans, sa famille quitte la Seine-et-Marne et tente sa chance dans l’Aveyron, à Villefranche-de-Rouergue, encore plus loin de Paris, de ses grandes écoles et de ses universités. En fin de 3e, Marvin obtient son brevet sans briller, mention « assez bien », avec juste la moyenne en mathématiques et de « grosses difficultés en anglais et en français », se souvient-il.

« J’ai toujours douté »

En fait, rien n’est simple. L’ado souffre de dyspraxie, une forme de maladresse pathologique, un défaut de coordination qui rend l’écriture pénible et complique les apprentissages. Difficile de se voir graine d’ingénieur, bête à concours et marcheur vers la « voie royale ». En jetant un regard derrière lui, le garçon reconnaît : « J’ai toujours douté. » Et pourtant.

Le fils de chaudronnier a rejoint en septembre l’Ecole supérieure de fonderie et de forge, à Sèvres (Haut-de-seine), comme élève ingénieur. Après deux années de classe préparatoire, « Marvin Chatillon a répondu à toutes les exigences du concours. Il a montré le niveau d’enseignement nécessaire pour intégrer notre école et fait la preuve d’une motivation structurée », rend compte Pierre-Yves Brazier, directeur de l’ESFF.

Pour en arriver là, le chemin a été long et parsemé de petites dépressions. Quelle orientation choisir ? La question est posée aux lycéens dès la 2de. Quel bac ? Général, pro ou techno ? Avoir 15 ans et déjà un plan pour sa vie est une gageure pour la plupart des jeunes. A Marvin, alors élève au lycée Raymond-Savignac de Villefranche-de-Rouergue, les enseignants ne promettent pas des études longues. « J’ai commencé à me faire peur dès la première année », se souvient l’ancien lycéen. Un bac S ? « Je n’avais pas la méthode de travail. Je voulais faire du concret. Le théorique à n’en plus finir, cela commençait à être barbant, essoufflant », dit-il.

A la fin du troisième trimestre, malgré la « volonté » et la « persévérance » soulignées dans son dernier bulletin, l’avis du conseil de classe est sans appel : « Des résultats fragiles voire insuffisants dans la plupart des disciplines ». Pas de bac général donc. « Ce n’est pas pour toi », l’avertit son prof de physique.

Mais il existe d’autres filières, parmi lesquelles le bac technologique STI2D, terme barbare pour « sciences et technologies de l’industrie et du développement durable ». Une voie vers les métiers de l’industrie, de l’énergie, de l’environnement et de l’innovation – « du concret ». Un petit tour à la journée portes ouvertes du lycée Monteil de Rodez (Aveyron) et la rencontre de « professeurs très pédagogues » convainquent Marvin. Sage décision : « Après un premier trimestre à travailler sur mes lacunes en sciences et en technologie, mes notes décollent en décembre et je termine l’année avec les félicitations ! » Sous le logo des courriers de l’établissement on peut lire : « Développeur de talents ». Celui de Marvin va se développer.

Encouragements

En terminale, arrive le moment de l’orientation postbac. BTS et DUT sont les deux principales autoroutes sur lesquelles s’engagent les bacheliers STI2D. Le jeune homme s’apprête à suivre la file, quand sa tante, ingénieure, lui rappelle qu’il existe un chemin plus étroit : une classe préparatoire aux grandes écoles. « Mais c’est pour les meilleurs ! », balaie le neveu.

Ses professeurs de mathématiques et de philosophie joignent leurs voix à celle de la tante pour pousser le lycéen à se porter candidat. « Malgré ses difficultés à l’écrit, du fait de son handicap, c’est un élève curieux, mature, tellement désireux de réussir que cela n’aurait pas eu de sens de ne pas l’encourager à aller plus loin », souligne Maëlle Le Ligné, sa professeure de philosophie. Et Marvin tombe de sa chaise : le lycée Louis-Rascol d’Albi (Tarn) lui ouvre grand les portes de sa classe préparatoire TSI (technologie et sciences industrielles). Le baccalauréat ne sera qu’une formalité : il obtient la mention bien et un 19 en mathématiques.

Reste à bosser. Bosser le jour, bosser la nuit, bosser le week-end. Après quelques mois, « les notes commencent à remonter ».

La CPGE, c’est une autre histoire. « Très rapidement, cela commence à “piquer”, raconte Marvin. La différence d’exigence avec le lycée est violente. » Pour son premier devoir sur table, il encaisse un 6,5 sur 20. « Les profs nous disent : “Vous ne savez pas faire de mathématiques” » « “Qu’est ce que vous faites en prépa ?”, nous balance le prof de physique. » Et la petite machine à créer des doutes se remet en marche, petit vélo obsédant qui tourne dans le cerveau : « Est-ce que je n’ai pas fait une erreur en intégrant cette classe ? »

Reste donc à bosser. Bosser le jour, bosser la nuit, bosser le week-end. Seul ou en binôme. Après quelques mois, « les notes commencent à remonter », se rassure Marvin. Puis l’année se termine en pente ascendante. Certes, pas pour tout le monde : 25 % de la classe ne passe pas en seconde année. Qui n’est pas différente de la première pour le futur ingénieur chaudronnier : « Après un mois, je suis largué complet. » Mais la méthode pour remonter le courant est acquise et le concours de fin d’année, passé avec succès.

« Vous devez persévérer sans vous décourager car les efforts portent leurs fruits », prédisait un bulletin de classe de 2de. Avec raison.

« Le Monde » organise son Salon des grandes écoles les 10 et 11 novembre

La 13e édition du Salon des grandes écoles (SaGE) aura lieu samedi 10 et dimanche 11 novembre à Paris, aux Docks, cité de la mode et du design (13e arrondissement), de 10 heures à 18 heures.

Plus de cent cinquante écoles de commerce, d’ingénieurs, IAE, IEP, écoles spécialisées et prépas y seront représentées, permettant d’échanger sur les différents programmes et leur accessibilité (post-bac, post-prépa ou après un bac + 2, + 3 ou + 4). Lycéens, étudiants et parents pourront également assister à des conférences thématiques animées par des journalistes du Monde Campus. Une équipe de vingt coachs pourra également conseiller lycéens, étudiants et parents pour définir leur projet d’orientation, préparer les concours ou rédiger leur CV.

L’entrée en sera gratuite, la préinscription en ligne est conseillée pour accéder plus rapidement au Salon.

Liste des exposants et informations pratiques sont à retrouver sur le site Internet du SaGE.