Prélèvement de l’impôt à la source : comment s’y préparer
Prélèvement de l’impôt à la source : comment s’y préparer
LE MONDE ARGENT
La mesure entrera en vigueur en janvier. Changement de situation familiale, variation de revenus, taux appliqué à un enfant rattaché au foyer fiscal, revenus de placements, départ à la retraite, frais professionnels… Tout savoir pour bien anticiper.
« La retenue à la source est calculée sur le montant du salaire net, avant déduction des frais. Mais cela n’empêchera pas les salariés qui ont de « gros » frais professionnels de continuer à les déduire. » / Chez Gertrud
Sauf coup de théâtre, le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu entrera en vigueur en janvier 2019. L’impôt sera prélevé douze mois sur douze par les employeurs, les caisses de retraite, Pôle emploi… sous la forme d’une retenue effectuée sur les salaires, les pensions de retraites, les allocations-chômage.
Pour les artisans, commerçants et professions libérales ainsi que pour tous ceux qui perçoivent des revenus sans « tiers collecteur », tels que des loyers, des pensions alimentaires, ce prélèvement donnera lieu à des acomptes mensuels – ou trimestriels sur option – prélevés directement sur leur compte bancaire par l’administration fiscale.
Le taux applicable à partir du mois de janvier et jusqu’en août 2019 figure sur l’avis d’imposition que vous avez dû recevoir. Il est également indiqué dans votre espace personnel sur impots.gouv.fr à la rubrique « Gérer mon prélèvement à la source ». Il a été calculé à partir de vos revenus et de vos charges de 2017, compte tenu de votre situation conjugale et des personnes à charge. Il sera réactualisé au vu de votre déclaration de revenus 2018, déposée en mai-juin prochains, et s’appliquera de septembre 2019 à août 2020. Et ainsi de suite chaque année…
Que faire si votre situation familiale change ?
En cas de mariage, de conclusion d’un pacs, de divorce, etc., vous devrez désormais déclarer ces changements dans les soixante jours. Aucune sanction n’étant prévue si vous vous abstenez de le faire, vous pourrez toujours indiquer ces changements ultérieurement lors du dépôt de votre prochaine déclaration de revenus.
Toutefois, la déclaration de changement permet à l’administration fiscale de calculer un nouveau taux mieux adapté à votre nouvelle situation. Elle le communiquera directement à votre ou vos employeurs et recalculera le montant de vos acomptes. Ce nouveau taux s’appliquera au plus tard le troisième mois suivant la déclaration de changement, sans que vous n’ayez aucune démarche à accomplir auprès de votre employeur.
Quel sera le taux appliqué aux enfants qui travaillent et sont rattachés au foyer fiscal ?
Si votre enfant rattaché à votre foyer fiscal travaille pendant ses études, est stagiaire ou accomplit un stage en entreprise, le taux de votre foyer fiscal ne sera pas transmis à son employeur. S’il est en stage ou en apprentissage, tant que le montant cumulé de sa rémunération n’aura pas atteint la limite annuelle d’exonération des indemnités de stage (17 982 euros en 2018), il ne supportera pas de prélèvement à la source.
Dès le mois où ce seuil sera dépassé, il sera soumis au prélèvement à la source. L’employeur devra appliquer le taux issu d’une grille préétablie en fonction de son niveau de salaire (taux par défaut). La règle est un peu différente dans le cas d’un jeune qui travaille pendant ses études : l’employeur devra normalement appliquer le taux par défaut, dès le 1er euro versé. Mais ce taux est nul tant que son salaire est inférieur à 1 368 euros.
En outre, s’il s’agit d’un job de moins de deux mois, l’employeur doit appliquer un abattement de 615 euros au montant du salaire pour calculer la retenue à la source. Par exemple, si son salaire est de 1 500 euros, l’assiette du prélèvement est de 885 euros (1 500 – 615), et l’employeur n’appliquera aucune retenue à la source dans la mesure où le taux correspondant à cette tranche de rémunération est égal à zéro.
Que se passe-t-il si vos revenus varient ?
Principal intérêt du prélèvement à la source : il s’ajuste automatiquement et en temps réel aux variations de revenus, sauf pour les revenus sans « tiers collecteur » (employeur, caisse de retraite…). Cependant, il se peut que cela ne soit pas suffisant, compte tenu de la progressivité du barème de l’impôt. Il sera alors possible de demander un taux plus élevé ou plus faible en cas de variation des revenus ou des charges déductibles (pensions alimentaires, par exemple).
Il ne sera toutefois pas possible de demander un taux moins élevé pour tenir compte d’une baisse de l’impôt à payer grâce à l’imputation d’un crédit ou d’une réduction d’impôt. Le service sera accessible à compter du 2 janvier 2019. Mais attention, les contribuables ne pourront obtenir un taux moins élevé que s’il existe un écart de plus de 10 % et de plus de 200 euros entre l’ancien taux et le nouveau taux.
Et pour les revenus de placement ?
Les revenus de vos placements financiers – dividendes, intérêts – ne seront pas soumis au prélèvement à la source mais resteront imposés, comme aujourd’hui, au prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % (30 % avec les prélèvements sociaux). Idem pour les plus-values de cession de valeurs mobilières qui continueront à être imposées en N + 1 au prélèvement forfaitaire unique. Mais vous pourrez opter lors du dépôt de votre déclaration de revenus pour une imposition au barème progressif. Comme c’est déjà le cas aujourd’hui, cette option sera globale et concernera l’ensemble des revenus et plus-values soumises au prélèvement forfaitaire unique.
Comment les frais professionnels sont-ils pris en compte ?
La retenue à la source est calculée sur le montant du salaire net, avant déduction des frais. Mais cela n’empêchera pas les salariés qui ont de « gros » frais professionnels de continuer à les déduire. L’option pour les frais réels s’exercera toujours l’année suivante lors du dépôt de la déclaration de revenus. Et si vous aviez déjà déduit vos frais pour leur montant réel pour l’imposition de vos revenus de 2017, le taux d’imposition de votre prélèvement en tient compte.
Et quand on change d’employeur ?
Si vous changez d’employeur, ce n’est en principe qu’après le versement de votre premier salaire que l’administration fiscale pourra lui transmettre votre taux personnalisé. Même si vous lui fournissez vos anciennes feuilles de paie sur lesquelles figure votre taux, il n’aura pas le droit de les utiliser. Dans l’attente, il devra utiliser un taux neutre calculé uniquement en fonction du niveau de votre salaire, mais qui ne tiendra pas compte de votre situation familiale. Toutefois, un nouveau service devrait être mis en place à partir de décembre 2018 pour permettre aux employeurs d’aller récupérer les taux des personnes qu’ils embauchent sans attendre le paiement de la première paie.
Quelles conséquences si on part à la retraite ?
Si vous partez à la retraite début 2019, la retenue à la source sera effectuée directement sur vos pensions de retraite. Mais le taux utilisé par vos caisses de retraite sera celui calculé à partir de vos revenus professionnels de 2017.
« Si vous ne signalez pas le plus rapidement possible ce changement à l’administration fiscale, ce n’est qu’à partir de septembre 2020, soit près d’un an et demi plus tard, que le taux du prélèvement sera adapté à votre nouvelle situation. Ce n’est qu’une fois que vous aurez déposé votre déclaration de revenus de 2019, en mai-juin 2020, que l’administration pourra avoir connaissance de votre baisse de revenus et calculer un nouveau taux en conséquence. Cependant, l’impôt sera tout de même en net recul, car appliqué sur une pension de retraite moins importante que votre salaire », souligne Sophie Borenstein, avocate associée chez KGA Avocats.
D’une manière générale, la situation est identique pour tout changement professionnel se traduisant par une baisse importante de revenus : chômage, congé parental ou sabbatique, passage à temps partiel… Certes le prélèvement sera plus faible, car calculé sur un revenu en diminution, mais son taux sera toujours le même. Pour éviter d’avoir à faire l’avance d’un impôt qui vous sera remboursé, vous devrez anticiper ces situations, en demandant un nouveau taux basé sur votre estimation future de revenus. Ainsi les prélèvements s’adapteront plus facilement à votre nouvelle situation.